Une prouesse

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Brindille par brindille l’oiseau construit son nid, dit l’adage.  Il en est de même pour la langue amazighe. Longtemps confinée dans l’oralité et méprisée sur le plan institutionnel, cette langue a acquis au fil des années une meilleure considération et connu des progrès non négligeables, grâce aux efforts de ses enfants, et ce depuis le début des années 70 qui a vu l’engament d’artistes et d’hommes de culture  de renom qui l’ont défendue, à l’instar de Lounis Aït Menguellet, Idir, Mouloud Mammeri, Salem Chaker, Matoub Lounes, Ferhat Mhenni et tant d’autres. Le premier coup de pouce fut, bien sûr, impulsé par Mouloud Mammeri qui stabilisa la transcription de la langue en la codifiant par une  grammaire et une orthographie qui peut à peu devinrent une norme admise par tous. Ce travail gigantesque de notre écrivain a permis l’apparition des premiers romans en tamazight comme ceux de Rachid Alich, Amar Mezdad et autres.  L’élan était désormais pris et le rêve de faire accéder la langue  berbère au statut de langue écrite devint possible. Les premiers journaux en tamazight,  comme «Asalu», «Amaynut», «Izuran», «Tamurt», firent leur apparition en 1990, grâce à l’ouverture du pays au multipartisme. En parallèle, les premières pièces théâtrales kabyles se jouaient un peu partout dans nos villages grâce au travail des associations culturelles nouvellement créées. On sentait que quelque chose de solide commençait à se construire petit à petit. Le premier film amazigh tiré du roman « La colline oubliée » et réalisé par Bouguermouh en fut une confirmation pour les plus sceptiques. Le chemin étant tracé et balisé il n’était plus question de s’arrêter en si bon chemin. L’apparition du Net allait donner une autre dimension à la langue kabyle (amazighe). En effet, l’Internet fut une opportunité à saisir pour valoriser la langue et renforcer ses acquis. D’instinct, les internautes, surtout depuis la mise en ligne du clavier kabyle via le système Unicode, se mirent à échanger sur les réseaux sociaux, comme face book et tweeter, en tamazight. Des blogs et des pages dédiés à la littérature amazighe et alimentés au quotidien par des textes, des poèmes  et de la prose en  kabyle virent le jour. Mais pour stabiliser définitivement la langue, il fallait  des règles standardisées et admises par tous. C’est pour répondre à ce besoin que des dictionnaires en ligne « kabyle/ français- français/kabyle », comme le fameux « Asegzawal tamaziɣt /tanfransist » qu’on peut consulter sur ce lien : http://www.tutlayt.net/asegzawal-taf.php, ont vu le jour. Le dernier dictionnaire mis en ligne, et qui à notre sens peut satisfaire les plus exigeants, est «Dictionnaire encyclopédique kabyle» que l’on peut consulter sur le lien suivant : http://dukabyle.lescigales.org/. Ce dictionnaire nous semble être le plus complet car il ne se contente pas de néologismes et son  champ d’investigation est large puisqu’il prend en charge non seulement les mots kabyles (usuels et techniques) mais aussi les domaines de l’anatomie, la botanique, les cartes, la cuisine, les devinettes, les nombres, les proverbes et la zoologie. C’est dire si ce nouveau dictionnaire est un véritable petit trésor à la portée de tous et de toutes. Autre point de satisfaction, la mise en circulation de correcteurs et de conjugueurs de la langue amazighe. Doit-on dès lors s’étonner de voire se faire des traductions de grandes œuvres littéraires universelles  en kabyle, à l’instar de celle de « Le vieil homme et la mer » d’Hemingway par Mohamed Arab Aït Kaci, «Roubaiates» d’Omar Khayyam et « Ainsi parlait Zaratoustra » par A.S Hamid et  «L’étranger» d’Albert Camus également par l’écrivain Mohamed Arab Ait Kaci ? Assurément non et cela ne peut qu’augurer d’un avenir radieux pour la langue amazighe. Comme le disait le grand dramaturge kabyle Mohya : le meilleur est à venir !

A. S.  Amazigh

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