La chanson kabylie est en regression

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Rencontré en marge du gala artistique qu’il a animé récemment au village Aït Ouatas, dans la commune d’Imsouhal, Djilali Hamama nous a accordé cet entretien.

La Dépêche de Kabylie : Comment êtes-vous venu à la chanson ?

Djilali Hamama : Depuis mon enfance, je touchais déjà à tout ce qui est artistique, surtout la chanson.

Quel est le chanteur qui vous a le plus inspiré ?

Pour ne rien vous cacher, j’adore Lounis Ait Menguellet, je me retrouve dans ses textes. d’ailleurs, étant amateur, j’interprétais les chansons de ce grand poète et philosophe dans les fêtes du village.

Quel est votre style de musique ?

Comme la plupart des artistes kabyles, le folklore, un style sentimental, de l’oriental combiné avec le folklore kabyle, un cocktail quoi?

Combien de chansons comptez-vous dans votre répertoire ?

J’ai enregistré «Isfra», mon premier album en 1999, mais qui n’est commercialisé qu’en 2001. J’ai à mon répertoire actuellement 90 chansons regroupées dans 12 albums.

Une préférence ?

Je ne fais pas de distinction entre mes chansons, je les ai toutes puisées dans mes tripes, elles sont comme les doigts de la main, c’est mon âme, pour ainsi dire.

Ces derniers temps, beaucoup de chanteurs, notamment les nouveaux, font dans la reprise. Votre avis là-dessus ?

Ceux-ci doivent au moins demander, ne serait-ce que par respect à l’auteur, l’autorisation de reprendre ses succès. Cependant, il y a de belles voix qui ont réussi des reprises saluées par leurs auteurs. Je suis outré quand une chanson sentimentale est reprise dans un non-stop destiné aux fêtes.

Aujourd’hui, la chanson raï envahit la Kabylie, on la diffuse partout. Y a-t-il une alternative à cela ?

Avant oui, mais maintenant, de moins en moins et ce, grâce certains chanteurs, à l’instar de Mohamed Allaoua, qui ont donné un autre souffle à la chanson kabyle. Un bon travail s’impose par lui-même et conquiert l’oreille musicale. Allaoua et Takfarinas ont bien rempli le Zénith ou l’Olympia en France, contrairement aux autres chanteurs d’expression arabe.

Comment voyez-vous la chanson kabyle aujourd’hui ?

Sans tomber dans la surenchère et l’amalgame, je pourrais dire que la chanson kabyle est aujourd’hui en régression, et ce pour diverses raisons. Nous Kabyles, je dirais qu’on est jaloux les uns des autres, on est à la fois, rossignol (voix), compositeur et poète, au lieu de laisser chacun dans son domaine. L’union d’un parolier, d’un compositeur et d’une voix ne peut engendrer que des tubes. Je suis plus que persuadé que de belles voix existent mais qu’il faut trouver. Pourquoi ne pas faire des émissions radiophoniques et télévisuelles pour les dénicher, comme cela se fait ailleurs ? Mais, il ne faut pas désespérer, il y a certains jeunes «Ikhulaf» qui commencent à faire renaître l’espoir.

Avez-vous un nouvel album en préparation ?

Je n’ai encore rien enregistré mais pour, ne rien vous cacher, je suis en train de préparer de nouvelles chansons, je préfère vous réserver une surprise.

Comment trouvez-vous le public d’Aït Ouatas ?

Sociable et très accueillant. Je tiens d’ailleurs à remercier tout ce beau monde pour cet accueil chaleureux.

Un message à passer ?

Je demande aux artistes kabyles de se respecter et d’être solidaires les uns les autres afin de porter très haut notre culture. Le disque vinyle 33 tours «Tachemlit» qui a réuni une poignée d’artistes que Kateb Yacine surnomma «Les maquisards de la chanson» est encore dans les esprits. Quand pourrions-nous rééditer cet exploit ?

Je vous laisse le soin de conclure…

Je vous remercie de m’avoir permis de m’exprimer à travers les colonnes du Journal des Hommes Libres. La dépêche de Kabylie est un quotidien qui a toujours fait la promotion de la chanson kabyle. Je saisis cette occasion pour souhaiter aussi à tous les Algériens une bonne rentrée sociale et une joyeuse fête de l’Aïd el Kébir.

Entretien réalisé par Madjid Aberdache

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