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Hamid Benamra, cinéaste algérien : «Je rêve de faire un film sur mes racines»

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Hamid Benamra a étudié la philosophie à Alger, puis est allé à l’ESEC. Il a aussi fréquenté les cours d'histoire et de cinéma de Marc Ferro à l'École des Hautes Études, à Paris. En 2012, il réalisa «Pièces de vie, pièces de rêve», documentaire de 52’ sélectionné par 17 Festivals sur trois continents, notamment Meilleur documentaire au Festival du film panafricain (Cannes) 2014 et Choix de l'auditoire au Festival international du film d'Alger (JCA) 2012.

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La Dépêche de Kabylie : Parmi vos œuvres, il y a votre film documentaire Hizam où vous faites un lien entre le karaté et la danse. Pouvez-vous nous expliquer ce rapport ?

Hamid Benamara : Le karaté et la danse ont une chose très importante en commun, c’est le ventre. Le ventre est en effet très sollicité en danse et les Japonais, dans le karaté, l’appellent le «Hara». C’est le centre de l’énergie vital. Tout est centralisé dans un seul endroit. En même temps, dans le ventre il y a le nombril qui représente l’égoïsme, le «moi». Mon film parle donc de tout cela à la fois, mais ce n’est certainement pas un film pour apprendre à danser. C’est par ailleurs un hymne, une histoire d’amour entre moi et les femmes.

Si on classait votre œuvre, ce serait dans les films ou dans les documentaires ?

C’est entre les deux. Dans mes films, j’utilise la réalité, j’y puise mon inspiration, mais je détourne aussi cette réalité pour la rendre fictionnelle.

Revenons à votre film Hizam, pourquoi ce titre ?

Chez nous, quand on dit de quelqu’un qu’il est «mhazem», on insinue qu’il est capable. Assia, le personnage principal du film, apprend à ses danseuses du grand art, elle prend son travail très au sérieux et avec beaucoup de conviction. Et le karaté, dont il est également question dans le film, c’est aussi un sport, un art d’un niveau très élevé. Dans les deux disciplines, l’exigence est poussée à l’extrême. Mais l’amour est le moteur premier de tout ce qu’on fait. Si on ne fait pas la chose par amour, ça ne marche pas.

Vous avez confié qu’il vous a fallu 16 ans pour réaliser ce film. Est-ce à dire qu’il vous a été inspiré par une histoire d’amour qui a duré 16 ans ?

C’est une histoire d’amour qui dure depuis toujours et pour toujours ! Cela n’a pris que seize ans, parce qu’à un certain moment il fallait le faire, il fallait trancher. Mais c’est une histoire d’amour qui a commencé il y a très longtemps. Ce sont les femmes qui m’ont appris comment aimer, comment me comporter. Je suis redevable à toutes les femmes du monde. Je m’incline devant elles. Quoi de plus éloquent que le fait que c’est la femme donne la vie.

Et vous parlez de toutes les danses dans votre œuvre…

C’est pour montrer ce qu’elles ont en commun, tous ces gestes qui sont très loin d’être vides.

C’est donc l’universalisme de la danse ?

Comme le dit une danseuse dans le film, «quand je danse, c’est toute la terre qui danse à travers moi, c’est du feu, de l’eau… Tous les éléments de la nature».

Un dernier mot ?

L’Algérie me manque même si j’y reviens souvent. Elle me manque dans le sens où je veux retourner à l’endroit de mes racines, je rêve de tourner en Algérie avec les moyens et l’argent de l’Algérie. Ça m’agace que pas assez d’argent n’est consacré au cinéma libre. Il est temps de miser sur des individus qui maîtrisent leur métier, qui ont une approche cinématographique originale et qui font honneur à leur pays dans le monde entier. Tous mes films parlent de l’Algérie, alors que l’Algérie n’y a mis aucun centime. Je suis endetté, mais je tiens fermement à ce que mes films portent la bannière algérienne. «Hizam» est un film 100% algérien, aucun technicien étranger n’y a contribué. Néanmoins, concernant les acteurs, il y a des filles de l’Equateur, du Costa-Rica, de la Tunisie, du Maroc… Trente nationalités différentes en tout. C’est un film libre qui traverse les frontières.

Entretien réalisé par S. M.

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