«La chanson kabyle a connu des hauts et des bas»

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Dans cet entretien, la star kabyle Taleb Tahar aborde l’état des lieux de la chanson kabyle et parle de la sortie de son nouvel album, prévue le 21 décembre prochain.

La Dépêche de Kabylie : En ces moments d’affirmation de l’identité par la jeune génération, quel est l’apport de l’artiste au combat ?

Taleb Tahar : Nous étions de tout temps au devant de la scène dans le combat identitaire, et pour la langue amazighe. L’artiste est celui qui fait sienne la revendication de sa communauté. Et puis, chacun défend sa culture, c’est la moindre des choses à mon avis. La chanson kabyle a beaucoup donné pour la promotion de la culture amazighe, et ce depuis des décennies. Même si on a enregistré quelques avancées et acquis ces dernières années, comme un statut de langue nationale et officielle, force est de constater que Tamazight n’a pas pu atteindre la place qui lui revient de droit au niveau national.

Et la chanson kabyle, se porte-elle bien actuellement ?

Je dirai que oui. C’est vrai qu’il y a eu des hauts et des bas, mais la chanson a tenu bon et elle a résisté, tant bien que mal. Je dis ceci pour éviter de tomber dans le pessimisme qui gangrénait, à un moment donné, une frange du public. La chanson kabyle recèle beaucoup de talents, elle a été hissée au summum dans plusieurs manifestations internationales. Mais, c’est vrai aussi qu’on enregistre des chansons de très mauvaise qualité. Et c’est normal aussi, car ce n’est pas spécifique à la chanson kabyle. Je peux même aller plus loin en disant que la chanson kabyle se porte actuellement mieux qu’avant. En effet, les icônes de la chanson kabyle sont toujours là les anciennes stars sont toujours vénérées par le public et la nouvelle génération de chanteurs, qui propose une bonne qualité de produit, est adulée par la population.

Cette fois-ci, vous n’avez pas tardé pour sortir un nouvel album. Peut-on savoir pourquoi ?

J’ai enregistré un album l’année passée avec l’aimable collaboration de Ali Ideflawen et le regretté Lounès Kheloui. Il a eu un bon écho auprès du public. Je soulignerai au passage l’aide précieuse qui m’a été apportée dans la promotion de l’album par la Direction de la culture et la Maison de la culture de Tizi Ouzou. Cet état de fait m’a encouragé et m’a aidé à enregistrer un autre produit, d’autant plus que de nouvelles chansons étaient déjà prêtes.

Parlons justement de ce nouvel album, si vous le voulez bien…

Ce nouvel album contient neuf titres. J’ai tenu à ce que le produit soit d’une bonne qualité sur le plan musical, mais aussi sur le plan poétique. Néanmoins, je laisse l’appréciation au public, c’est à lui que reviendra le dernier mot.

Peut-on en savoir un peu plus sur les différents titres ?

Le premier titre est «Ameksa», où je raconte l’histoire d’un berger qui grade les troupeaux des autres. Le deuxième titre «Ay amendil d tqendurt» traite de la sauvegarde du patrimoine qui est en voie de déperdition dans notre société. En réalité, j’appréhende la disparition de notre habit traditionnel qui est remplacé par des tenues étrangères à notre culture et à nos traditions. J’essaie modestement de sensibiliser les gens à sa sauvegarde, en disant : «Ay amendil d tqendurt, tecbeh yis-sen teqbaylit. D Kemmini i d lasel di tmurt, ma d tayed i tebghu tels-it ». Quant à l’autre titre «Qqim kan qqim», c’est un proverbe que j’ai piqué à Cheikh Mohand Ou Lhocine qui disait «Qqim kan qqim, yir serdun, ur t-ttdeqqim, yir asghar, ur t-tettleqqim, yir amdan, hder negh qqim», un sujet sociétal. Amudin’’, est une chanson que j’ai faite pendant mon hospitalisation. En plus de l’expérience personnelle, il se veut aussi un hommage à Lounis Kheloui, Cid Messaoudi et Ahcène Mezani. La musique est de Cid Messaoudi et l’istixbar d’Ahcène Mezani. «Jeddi et jida» teraite d’un thème que j’ai déjà traité dans mon précédant album, donc, c’est une suite logique. Jeddi (mon grand-père) a disparu, il m’a laissé une clé pour plusieurs portes. Avec l’aide de Jida (la grand-mère), je tâtonne pour trouver la bonne demeure. Le titre suivant c’est «Tamurt’iw», j’y affirme que nous sommes Kabyles et Algériens : « Ur yelli anda ara nruh, nekni yis-m kan i nesâa. Fell-agh, âzized am rruh, am yigenni d lqâa». Dans une autre chanson «Amehraz», je rends un autre hommage, les concernés se reconnaîtront.

On vous laisse conclure…

Les paroles et les musiques de cet album sont de mon cru, comme d’habitude. La sortie de l’album est prévue pour le 21 décembre prochain. J’ai prévu, d’ailleurs, le jour même de sa sortie, une vente dédicace et un gala à la Maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Je profite de cette occasion pour remercier les choristes à leur tête Atmani, Sahel, Malik Kezoui, Djamy Kerdja et Said Khazen, un grand merci aussi à Samir Bouakline et les Editions Massinissa, sans oublier évidement le journal La Dépêche de Kabylie.

Farida Elharani

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