Mohand Oumoussa Awaguenoun, une légende oubliée

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Mohand Oumoussa Awaguenoun est un illustre nom dans le registre de la poésie kabyle ancienne. Cité par Mouloud Mammeri, dans «Poèmes kabyles anciens», le poète n’a pas encore la place qui lui sied et lui revient dans l’univers culturel de notre pays. Méconnu des autorités en charge de la Culture en Algérie, on ne trouve pas trace de lui dans les annales culturelles hormis dans l’œuvre de Mammeri déjà citée. Né d’une famille très pauvre dans le milieu du 17ème siècle à Agouni Hamiche, dans la région de Makouda, Mohand est déjà orphelin de père à un âge précoce. Tout petit, il mène une vie de berger sur les hauteurs de son village Azrou Ouguetouf, près de Tala Bouzrou. En ces temps de misère, le petit Mohand ne se doutait guère de l’avenir qui l’attendait. Gardant ses brebis et jouant de sa flute, un illustre tambourinaire (Adhebbal) de passage avec sa troupe par ces hauteurs de la Kabylie maritime, le trouva tirant de son «roseau» des notes d’une grande justesse. Le tambourinaire Hand Ouali de Tala Gahia des Aït Ouaguenoun fut subjugué par la manière de jouer et la maitrise du petit berger. C’est ainsi qu’il demanda à sa mère de l’autoriser à l’accompagner dans ses périples pour lui apprendre le métier. Le désir de la veuve de faire sortir son fils de la misère, a vite fait de la décider à accepter. En peu de temps, Mohand Oumoussa acquiert une notoriété. L’élève dépassant le maître, ce dernier le laissa s’envoler de ses propres ailes. Son nom se répandit très vite dans toute la Kabylie. Mohand Oumoussa enchanta les fêtes des pauvres comme celles des notables par son art et sa poésie. A 17 ans, sa réputation amena le caïd des Aït Kaci à l’inviter dans sa résidence à Tizi-Ouzou. Ses visites se feront si fréquentes que Mohand s’imposa aussi comme conseiller de la famille. Approché par les français pour transcrire ses poèmes, Mohand Oumoussa exprima son refus par cette célèbre rime:

Ay guqa lwerd rrebi

Alama megregh taafert

Lhila tettagem t rennu

Ma d nettat tugi tachert

Ma mlighas nbi iwrumi

Awar yichfeâ di lakhert

Après un long parcours qui le mena à faire des fêtes dans les villes algériennes, ainsi qu’en Tunisie et en France, Mohand Oumoussa décida de revenir définitivement dans son village Agouni Hamiche à Makouda. Il mènera une vie toute de simplicité avec les siens, refusant le faste des notables. Il mourut aux environs de 1932, léguant sa demeure à sa bru, la femme de son fils, «Taatouchit» qui s’était occupé de lui dans ses derniers jours. Plusieurs chanteurs kabyles se sont inspirés de ses poèmes comme Lounes Matoub qui a repris le fameux «win iqimen di tmurt a, ma khettan-t wallah ur yettghad». Aujourd’hui, les responsables de la Culture, au niveau national et surtout au niveau de la wilaya, sont interpellés pour sortir de l’oubli ce grand poète et le faire connaître pour enfin occuper sa vraie place parmi les siens.

Akli N.

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