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Édition : Quand Fournier et Lang parlent de Mohand Tazrout…

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Les éditions Frantz Fanon viennent d’éditer un livre de M. Jacques Fournier, ancien secrétaire général du gouvernement français, qui traite de la vie et l’œuvre du grand écrivain kabyle Mohand Tazrout. Intitulé Mohand Tazrout, la vie et l’œuvre d’un intellectuel algérien, ce livre retrace l’itinéraire et les évolutions qu’a connus l’homme tant sur le plan professionnel que sur le plan intellectuel. Dans la préface signée par Jack Lang, ce dernier souligne la dualité du personnage de Mohand Tazrout et le compare à Ferhat Abbas. En effet, l’un comme l’autre ont cru à une possible assimilation de ce qu’on appelait à l’époque «Les indigènes» et une chimérique coexistence pacifique qui conduirait à une véritable émancipation de leurs coreligionnaires, avant de prendre fermement une décision de s’engager pour la libération du pays. Dans ce livre, Jacques Fournier revient sur l’itinéraire et l’œuvre d’un philosophe, germaniste et sociologue kabyle qui l’a connu personnellement, du fait qu’il est son beau-fils. D’abord M. Fournier, qui est un enfant pied-noir, rétablit quelques vérités sur Mohand Tazrout comme le voyage qu’aurait entrepris ce dernier l’amenant en Tunisie, en Égypte, En Iran, en Chine et en Russie où il aurait appris le perse, le mandarin et le russe. Ce récit, qui fait de Mohand Tazrout une sorte de globe trotter pendant sa jeunesse, qu’on retrouve sur Wikipedia et même dans l’encyclopédie des auteurs en langue française, est d’après les recherches de M. Fournier et de Mme Lalmi est irréfutablement fantaisiste. D’après les archives militaires que l’auteur a consulté, il en résulte qu’a cette période, c’est-à-dire au début de la première guerre mondiale, Mohand Tazrout est mobilisé dans l’armée française, naturalisé français et participe à la bataille de Charlerois en Belgique où il est fait prisonnier et déporté en Allemagne. C’est d’ailleurs à cette époque qu’il commence à apprendre l’allemand et s’intéresse à la culture allemande. Décortiquant la vie d’un grand penseur mais dont l’œuvre reste hélas peu connue, l’auteur la scinde en trois étapes importantes. La première est celle de sa formation en Kabylie. On apprend que le jeune Mohand Tazrout, né en 1893 à Tazrout dans la commune des Aghribs, a reçu une éducation à l’école coranique et fréquenta l’école primaire des Aghribs dont il aura comme instituteur les époux Janin. Il se lia d’amitié avec ce couple jusqu’à sa mort, survenue en 1973 à Tanger. Il fait l’école normale et devient instituteur à Theniet El Hed. Il s’est mobilisé à la deuxième guerre mondiale et eu pour marraines une institutrice vendéenne qui s’appelle Angelle Foucher avec laquelle il s’est sympathisé et qui deviendra sa femme. De retour au pays en 1919, une brouille familiale le conduit à quitter le pays de ces ancêtres et regagner la France. C’est à partir de cette date que commence la deuxième période de sa vie, celle de l’intégration dans la société française. Pendant cette période, Mohand Tazrout poursuit et termine ses études en langue allemande et devient professeur de cette langue. Sa vocation de germaniste s’est affirmée. Les décennies 1920 et 1930 seront pour Mohand une période d’intense production intellectuelle au cours desquelles il s’imposera comme germaniste et sociologue. Et c’est assez logiquement à lui que les éditions Gallimard confie la traduction de l’œuvre monumentale de Spengler «le déclin de l’occident, esquisse d’une morphologie de l’histoire universelle». Entre temps, l’enfant des Aghribs aura été un chroniqueur assidu des travaux de la sociologie allemande qu’il publie régulièrement dans la revue internationale de sociologie. Le couronnement de cette activité sera un ouvrage volumineux de trois tomes qui traite «les éducateurs sociaux de l’Allemagne moderne». En 1935, on va le voir écrire un livre sur «l’état de demain». À la fin de la seconde guerre mondiale et les massacres du 8 mai 1945, le général Tubert est chargé d’un rapport sur ces événements. Mohand Tazrout lui adressa une lettre que le général publiera de larges extraits. Dans cette lettre, où on trouve l’intellectuel algérien s’intéresser pour la première fois au problème de son pays, il préconise l’application aux Européens et aux indigènes un même régime scolaire et la reconnaissance des mêmes droits politiques. À partir de 1949 jusqu’à sa mort en 1973, on va voir Mohand Tazrout, qui entre temps contracte un nouveau mariage suite à la mort de sa première épouse, renouer avec son pays natal et s’engage à travers ses écrits pour l’indépendance du pays. Parmi ses œuvres, on trouve «L’Algérie de demain» publiée en 1960 sous le pseudonyme de Moutawakil, «Histoire politique de l’Afrique du Nord» en 1961, «Manifeste contre le racisme» en 1963, «Essai génétique sur la race, les peuples, les nations, la démocratie» en 1959 et «Les problèmes de la coexistence pacifique» en 1960, mais dont l’œuvre majeure est «Au congrès des civilisés» qui comporte cinq volumes publiés entre 1955 et 1959. Cette entreprise monumentale est consacrée à la métaphysique intellectuelle d’Extrême-Orient, la foi religieuse du Proche-Orient, la philosophie amoureuse de l’antiquité, le capitalisme mondial du 14ème siècle à nos jours, le communisme soviétique et la sociologie de la coexistence pacifique. Jacques Fournier, accompagné de M. Ingrachen des éditions Frantz Fanon, a donné trois conférences au sujet de don livre à Aghribs, Tazmalt et Alger.

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M. I. B

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