Au pays de l'aveugle dans les librairies

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Au pays de l’aveugle est une nouvelle production de l’auteur Mocrani Hamdane, un cadre de l’éducation à la retraite passionné par l’écriture. Il en est à son troisième ouvrage. Dans cet entretien, il nous parle de ce qui l’inspire

La Dépêche de Kabylie : Présentez-vous à nos lecteurs…

Mocrani Hamdane : Je suis né le 12 décembre 1943 à Tizi-Gheniff dans la wilaya de Tizi-Ouzou. J’ai passé toute ma carrière dans l’enseignement. J’ai été successivement instituteur, directeur d’école primaire, professeur au collège Boubaghla Saïd de Tizi-Gheniff, professeur au lycée Ouarzedine Achour de la même ville et j’ai terminé ma carrière de cadre de l’éducation en qualité de directeur de collège.

Vous venez de signer votre 3ème roman : Au pays de l’aveugle. Et pourquoi pas : Au pays des aveugles ?

Non, Au royaume de l’aveugle. C’est un seul aveugle qui dirige toute la cité, contre toute attente ! Et si vous permettez, voici une pensée de l’un des assassinés des hommes de l’aveugle : Mohand Malou : « Quand ceux qui ont une bonne acuité visuelle demande à un aveugle de leur montrer le chemin, c’est que la déraison est devenue la source de l’entendement. Il ne faut pas alors s’étonner que l’anarchie et la folie prennent le dessus sur la sagesse. Seules la raison et la sagesse peuvent guider nos pas et nos jugements. Hors la raison et la sagesse, il n’y a point de salut ! » Le premier roman est « Malika ou le bonheur retrouvé » paru aux éditions El Amel, Tizi-Ouzou en 2013. Le second est « Le revers de la médaille » paru également aux éditions El Amel, Tizi-Ouzou en 2016.

Comment cette idée vous est-elle venue ? Vous vous êtes inspiré de quoi ?

C’est en observant ce qui se passe autour de moi, ce qui se dit ici et là. Les exemples et les circonstances ne manquent pas dans notre pays : la décennie noire, des gens qui croient tout ce qu’on leur dit. Quand vous avez des médecins, des ingénieurs qui croient qu’un bouc donne du lait qui guérit le diabète, alors, il ne faut pas s’étonner qu’un aveugle réussisse à faire croire au citoyen lambda qu’il a le don de guérir des maladies sur lesquelles la médecine moderne reste impuissante et se faire passer pour le représentant de Dieu sur terre. Il y a aussi, l’ambition démesurée qui anime bien des gens qui ne reculent alors devant rien pour atteindre leurs objectifs. Il y a ceux qui sont obligés de fuir pour sauver leur peau ou pour d’autre raisons. Il y a enfin, ceux qui refusent le fait accompli et décident de prendre leurs responsabilités dans l’intérêt de tous quels que soient les obstacles qui se dressent sur leur chemin. C’est tout cela à la fois qui m’a donné l’idée d’écrire ce roman.

Parlez-nous en détail de cette histoire palpitante : les différentes parties, les personnages, éventuellement le lien que vous faites avec l’actualité…

Le lien que je fais avec l’actualité, je viens d’en parler. L’histoire se passe dans le village de Luḍa qui se trouve dans une vallée riche et paisible. Elle se compose de trois parties : Une vallée riche et paisible, le complot et à quel saint se vouer ? Dans la vallée riche et paisible, les terres étaient fertiles. La faune et la flore étaient riches et variées. Il y avait rarement de différends entre les habitants de Luḍa et quand cela arrivait, le comité du village, présidé par Ali Flane, un homme plein de sagesse, les réglait en prenant soin de ne léser personne. La sagesse du président et les arguments qu’il utilisait finissaient par ramener à la raison la personne à l’origine du litige. La décision du comité du village se terminait toujours par du café ou du thé offert par l’une ou l’autre des parties que le différend opposait. Preuve que la bonne entente y régnait. L’entraide était une tradition dans le village. Elle touche tous les aspects de la société et de la vie quotidienne : travaux des champs, notamment Thiwizi, moisson ponctuée par une grande fête au village organisée par Ali Flane. Une tradition qui perdure de nos jours. Ce président eut alors un sérieux problème avec le comité. Pris à partie par des membres du comité du village parce qu’il avait porté secours à un jeune homme ivre du village, un jeune homme complètement trempé et allongé dans un fossé, Ali Flane réunit l’assemblée générale à laquelle il donne sa démission et lui donne un mois pour lui trouver un successeur. Les habitants de Luḍa organisent alors une manifestation et oblige Ali Flane à revenir sur sa décision avec un nouveau bureau.

Dans la deuxièmpe partie , à savoir Le complot, un soir d’octobre, un aveugle arrive au village. Il marchait cependant vite pour un aveugle ! Il est hébergé par Nassim Zourar. Au cours de la discussion, l’aveugle dit à Nassim Zourar que sa vie allait changer sous peu, en bien, bien entendu. Nassim Zourar décide de le garder chez lui malgré la protestation de Yamina, sa femme. L’aveugle parle de ses connaissances dans le domaine agricole et de ses dons de guérisseur. Il arrive à subjuguer son monde en disant à un habitant du village qu’il a une fracture au poignet mal soignée. La nouvelle de l’aveugle aux pouvoirs miraculeux se répandit vite dans le village où il rencontre des crédules, des incrédules, des sceptiques. Accorder du crédit à tous ses propos n’est pas chose aisée dans cette contrée qui en a vu des vertes et des pas mûres. Mais prédire une sécheresse, ça donne à réfléchir il fait même croire à ses partisans que la sécheresse est une punition de Dieu. Des gens le croient car il avait beaucoup de soutiens. L’assassinat de Mohand Malou perturba la cité …et la désignation de Nassim Zourar comme président du comité du village par l’aveugle n’arrange guère les choses. C’est la psychose générale ! Dans un prêche, l’aveugle devenu cheikh, s’indigne contre les femmes qui sortent seules et habillées à l’occidentale. Il décide alors de créer une police qui serait chargée de veiller au respect des bonnes mœurs. La tyrannie s’installe au village.Les femmes réagissent : Avant l’arrivée de l’aveugle, les femmes de Luḍa étaient libres. Elles sortaient seules. Elles s’habillaient indifféremment en robe, en jupe ou en pantalon. Elles ne portaient jamais le voile même quand elles se rendaient en ville seules ou accompagnées. C’était ainsi que s’habillaient leurs mères et leurs grands-mères.

Qu’en est-il de la 3e partie ?

L’aveugle et Nassim Zourar décident de faire peur à Rachid Abous et Farid Lazak qui constituaient un danger pour les deux associés. Ces deux opposants n’avaient pas, du moins ouvertement, de soutiens à leur cause, mais le cheikh et Nassim Zourar ne pouvaient rien négliger, c’est pourquoi ils se concertèrent sur la façon de les soumettre. La fin justifie les moyens. Les principes moraux ne sont que des idées auxquelles les faibles, les mécréants, les lâches donnent de l’importance. Il n’y a que l’action qui a de l’importance, se dit l’aveugle. Nassim Zourar charge le chef de la police d’arrêter Rachid Abous et Farid Lazak. La police frappe à leur porte pendant la nuit. Chacun se lève aussitôt qu’il entend les coups donnés sur sa porte et prend son fusil. Les visiteurs s’éloignent à toute vitesse. Rachid Abous et Farid Lazak se rencontrent dans la montagne .Les intellectuels sont départagés. Incapables, les membres de la police démissionnent tous à la fois. La terreur est répandue dans le village où chacun ne fait plus confiance à l’autre. C’est l’isolement individuel ! La cassure tant redoutée venait de se produire. Des enfants du village allaient s’en prendre à d’autres enfants du village. Les Loudhiens avaient réellement peur. Qu’allait-il se passer ? Que pouvaient-ils faire ? N’était-il pas trop tard maintenant pour faire quoi que ce soit ? L’aveugle avait réussi à inverser la situation à son avantage. Il avait sa propre police prête à en découdre avec celui qui se mettrait en travers de son chemin.

Ce roman est-il disponible dans les librairies ? Date de sortie ? Son prix ? Maison d’édition ?…

Il est sorti le 8 octobre courant. Le gérant des Éditions la Pensée m’a affirmé que le livre est disponible au niveau des librairies de Tizi-Ouzou depuis mercredi dernier (17/10/2018) et à partir de la semaine prochaine au niveau des librairies d’Alger et de Béjaïa. Son prix est de 700 DA.

Entretien réalisé par M A Tadjer

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