“Je suis être humain avant d’être femme”

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La Dépêche de Kabylie : Présentez-vous à nos lecteurs… ll D’abord, je suis contente d’être ici au village de Taos et de Fadhma Nait-Mansour Amrouche, deux grandes dames pour lesquelles j’éprouve une admiration sans bornes. Sur ce, je viens de réaliser un rêve qui me tenait à cœur depuis des années!Pour revenir à votre question, Lynda Koudache est une poétesse du village Ait-Boumehdi, de la Haute Kabylie. Dans la vie, je suis photographe de formation. En septembre 2001, j’ai contribué à un recueil de poésie collectif intitulé Comme une forêt de maudits édité au Petit-Pavé en France. En 2003, j’ai édité en Algérie L’Aube vierge qui est un recueil de poésie en français et en 2005, j’ai publié un autre recueil de poésie en berbère intitulé Lligh Weqbel ad iligh. Par ailleurs, j’ai participé récemment au festival du film amazigh à Ghardaia. J’ai eu alors l’honneur de déclamer avec Amine Zaoui, Rabiaa Djelti, et bien d’autres talentueux poètes. J’ai également pris part au premier festival de poésie féminine organisé à Skikda, et à nombre d’activités culturelles. L’an dernier, j’ai été choisie comme membre de jury lors des poésiades de Si Mohand Ou M’hend à Tizi Ouzou. Parlez-nous des thèmes que vous abordez dans votre poésie… ll Il y a en premier lieu la paix qui est la condition sine qua non de tout espoir de vie. Evoquer la paix, c’est aussi parler de la femme, de l’enfant, de la liberté, des droits des humains, et j’en passe.

La condition des femmes est assez récurrente dans votre œuvre ; vous réclamez-vous porte-parole de la femme kabyle ? ll J’ignore si, à travers la poétesse que je suis, j’incarne mes concitoyennes. Je ne suis pas sans savoir que ce n’est nullement une tâche facile et j’avoue que cela n’a jamais été mon dessein. Il me semble qu’à chaque femme kabyle une façon à elle de s’exprimer. Si certaines, comme moi, trouvent dans la poésie un moyen idéal pour dire leurs sentiments profonds, d’autres en revanche préfèrent s’exprimer à travers le tapis, la poterie, etc, et je trouve cela aussi génial !

Pourquoi le choix d’écrire dans deux langues ?ll A vrai dire, ce n’est guère un choix. C’est quelque chose qui vient spontanément. C’est vrai, j’ai commencé à écrire en français. Ensuite, je me suis initiée également à l’écriture en tamazight. Ce n’est pas une conversion, ni un quelconque sentiment de dualité culturelle. Loin s’en faut. Les deux langues cohabitent en moi en toute harmonie. Je me laisse totalement guidée par mon inspiration. De plus, la langue berbère a toujours été une langue d’ouverture qui respecte les autres langues. Au fait, la poésie n’a pas de langue. Ceci dit, je trouve que c’est extrêmement important d’écrire dans notre langue, le tamazight.

Où et quand prenez-vous votre inspiration ? ll En fait, c’est l’inspiration qui me prend ! C’est quelque chose d’ésotérique et d’amphigourique. Habituellement, j’écris pendant la nuit. L’idéal est que moi et l’inspiration soyons toutes les deux présentes. Car il y a des moments où je veux écrire, mais la muse est absente et des moments où la muse est présente et moi absente. Quant au lieu, j’aime écrire souvent à la maison. Ceci dit, à titre d’exemple, ce beau paysage (d’Ighil Ali) m’inspire !

Qu’insinuez-vous par Lligh weqbel ad iligh, le titre de votre recueil de poésie kabyle? ll Je voudrais simplement dire que nous sommes des êtres humains avant d’êtres des femmes et ce, avec notre sensibilité, notre raison et notre susceptibilité de corriger nos défauts. Femmes et hommes, nous sommes d’abord des humains et, de fait, égaux.

Un dernier mot pour conclure…ll Je pense que le meilleur hommage qu’on puisse rendre à Taos, Jean et Fadhma Nait Mansour Amrouche est de les lire ainsi que de saisir leur message et le sens de leur combat. Marcher dans leur sillage, c’est le rêve de tout artiste.

Propos recueillis par Karim Kherbouche

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