Le symbole de l'engagement syndical et républicain

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C’était le 28 janvier 1997, sur le perron de la Maison du peuple sur la place du 1er mai à Alger. Benhamouda, secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) venait de sortir d’une réunion de travail.

 

Par Amar Naït Messaoud

Il n’avait pas encore rejoint sa voiture lorsqu’une détonation se fit entendre à quelques mètres de là. Benhamouda s’affala sur le coup. La période allant de janvier 1992 à janvier 1997 fut une sorte de « sursis » accordé à l’un des initiateurs du Comité national pour la sauvegarde de l’Algérie (CNSA). Avant lui, ont été tués d’autres animateurs de ce mouvement de salut public et d’autres cadres appartenant au Conseil national de transition (CNT) désigné par Mohamed Boudiaf. Furent également assassinés les représentants de la fine fleur de l’intelligence et de la culture algériennes (Djaout, Boucebsi, Madjoubi, Djilali Liabès, Smaïl Yafasah,…). Abdelhak Benhamouda, ce « gourou » du syndicalisme constantinois, a su allier dans un heureux mariage, action syndicale et engagement politique. Sans trop de bruit, sans grande ostentation, il estimait que la première ne pouvait pas aller sans le second. Son expérience du terrain et son franc engagement dans l’Est du pays le menèrent naturellement droit à la tête de l’UGTA, organisation à laquelle il redonna vigueur, authenticité et combativité au moment où s’ouvrait le champ du pluralisme syndical, dans le sillage du pluralisme politique introduit par la Constitution du 23 février 1989. Ce pluralisme avait charrié sa précipitation et dans les calculs politiques malsains du sérail de l’époque, la naissance du « Syndicat islamique du travail » (SIT), une véritable phalange de l’ex-FIS, destinée à casser l’UGTA et à mieux préparer les ouvriers de la future république islamique, rêvée par ceux qui avaient programmé l’assassinat de l’Algérie de Novembre 54. Le SIT commençait à investir les entités économiques, les ateliers, les écoles et les administrations. Le défi de l’UGTA était double: reprendre les forteresses prises par le SIT et défendre la République menacée d’écroulement. Les nécessités et les priorités de la lutte armée pendant la guerre de Libération nationale, a fait que l’UGTA, créée le 24 février 1956, se soit consacré à cette mission, plus pressante que l’action syndicale pure.  On vécut presque le même scénario, en janvier 1992, lorsque la République chavira, menacée dans ses fondements par l’intégrisme islamiste. L’UGTA fut mobilisée par son secrétaire général, Abdelhak Benhamouda, pour mener, avec d’autres forces politiques, de la société civile et de l’armée, la bataille pour l’interruption du processus électoral mortel, dont le premier tour, qui eut lieu le 26 décembre 1991, fit monter le monstre islamiste en lui donnant la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Afin de couronner le combat pour la sauvegarde de la République, Benhamouda entreprit de créer un parti patriotique qui cristalliserait les aspirations les plus profondes du peuple algérien à la démocratie, à la justice sociale et à la modernité. C’en était sans doute « trop » aux yeux des fossoyeurs de l’Algérie. Quatre ans et demi après l’assassinat de Mohamed Boudiaf, la bête immonde s’en prit à l’un des plus grands symboles de l’engagement républicain et syndical du pays.

A.N.M.

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