«L’affaissement du terrain est une catastrophe»

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Le maire d’Illoula, M. Belkalem Yazid, parle dans cet entretien de son bilan, des projets réalisés au niveau de sa commune et des problèmes auxquels l’assemblée qu’il préside est confrontée.

La Dépêche de Kabylie : Pour commencer, pouvez-vous dresser un état des lieux global au niveau de votre commune ?

Yazid Belkalem : La commune d’Illoula est une localité isolée et enclavée, sans ressources ni investissements. Elle vit seulement des subventions de l’État et encore, avec cette austérité qui a contraint les pouvoirs publics à une restriction des budgets, nous nous sommes confrontés à un grand problème dans la répartition de nos projets. Cet état de fait s’est impacté même sur les salaires des fonctionnaires que nous n’arrivons pas à honorer dans certains cas.

Qu’en est-il du programme du logement ? La commune a bien eu droit à un programme ?

Je ne peux répondre par la négative. Effectivement nous avons des chantiers qui ont débuté en 2002, à l’exemple des 32 et 18 logements LSP. Il y avait un problème entre les acquéreurs et le promoteur qui a exigé d’eux une augmentation. L’affaire s’est retrouvée en justice avec gain de cause pour les acquéreurs mais sans suite, puisqu’on a retiré le projet pour l’entrepreneur et la situation a stagné. Jusqu’au jour d’aujourd’hui, le chantier est resté une simple carcasse en pleine dégradation. L’entrepreneur voulait reprendre le projet, mais les bénéficiaires sont-ils prêts à supporter des nouvelles charges qui vont y découler ? On est quand même à plus de 10 ans de retard, il y a une grande différence dans les charges. Et voilà la problématique de ces 50 logements qui restent suspendus jusqu’à nos jours. Même son de cloche pour le logement social, il y avait un programme qui a démarré en 2004 et qui, malheureusement, se trouve actuellement à l’arrêt. Donc, une quarantaine de logements encore à l’arrêt. On a essayé de relancer les travaux, mais en vain. Nous avons 50 logements qui sont prêts à être distribuer et 50 autres en voie de réalisation par une entreprise connue pour son sérieux. Nous avons, aussi, 100 autres logements lancés récemment. Et puis, nous avons demandé un autre quota pour l’OPGI puisque le problème foncier ne se pose pas chez nous. Nous disposons des assiettes où on peut réaliser d’autres logements. Il y a des sites où on peut construire jusqu’à 1000 logements. Donc, la balle est dans le camp de la direction du logement et l’OPGI. Nous privilégions le logement social car le citoyen ne peut pas construire sa maison actuellement comme c’était le cas auparavant. Dans ce cadre, justement, nous avions 700 dossiers déposés par des citoyens et nous n’avions droit qu’à une centaine d’aide dans le cadre de l’habitat rural, ce qui est vraiment minime et insuffisant même si ce n’est pas évident de construire une maison avec une aide de 70 millions de centimes. J’espère que cette aide sera revue à la hausse, au moins à 100 millions.

Et le gaz, peut-on connaître le taux d’avancement du raccordement au niveau de la municipalité ?

Le problème du gaz est une catastrophe. Les études réalisées en 2009 n’ont pas été actualisées depuis, pour prendre en considération l’extension des habitations. À cela s’ajoute le laisser-aller des entreprises chargées de sa réalisation. Depuis 2014, elles ne font que traîner sur le terrain en engendrant des désagréments par leurs travaux au niveau des villages. Et pourtant, nous avions mis tout un arsenal à leur disposition : nous avions transformé des maisons de jeunes en bases de vie pour leur personnel, des parkings pour leurs engins et puis les citoyens leur ont facilité la tâche en les aidant du mieux qu’ils pouvaient. Ces derniers temps, les entrepreneurs soulèvent des contraintes d’argent. D’après eux, les caisses de leurs entreprises sont vides, car ils n’ont pas encore reçu leur dû. À cet effet, des décisions ont été prises, ces jours-ci, au niveau de la wilaya pour trouver un terrain d’entente avec ces entreprises, puisque qui dit projet ou marché dit argent. En fait, l’argent de ces projets existe. C’est une évidence. Mais, aujourd’hui, on leur dit qu’il n’y a pas d’argent. Une question se pose : où est passé cet argent qu’ils ont affecté à ces réalisations ? On peut supposer qu’il a été transféré à d’autres projets ! Alors, ils ont trouvé une petite solution qui consiste à récupérer la caution de garantie par les entrepreneurs. Une caution qui devait être récupérée qu’après la réception définitive des projets et le hic dans tout cela, on demande au président de l’APC de signer la réception, comme si c’était lui le maître d’ouvrage. Une procédure qui s’inscrit contre le code des marchés. Je ne vois pas comment un président d’APC signera la réception d’un projet soi-disant fait en bonne et due forme qui n’a pas été réalisé, réellement, sur le terrain. À mon avis, ce n’est pas une solution.

Revenons aux infrastructures et équipements publics, où en est-on ?

Auparavant, nous avions le meilleur stade communal et on a pu lancer une équipe de football au niveau pré-honneur. Malheureusement, le manque de moyens et d’infrastructures nous ont vraiment pénalisés, ces derniers temps, jusqu’à la disparition pure et simple de l’équipe sur l’échiquier sportif, à cause du stade qui ne pouvait pas être homologué faute de tartan synthétique. Nos athlètes font le bonheur des autres équipes de la région, mais bon, tant mieux pour eux. Et pourtant, il y avait une promesse de le prendre en charge pour l’année 2015, mais jusqu’à présent, rien n’est fait, en attendant cette année 2017. Nonobstant le manque flagrant de maisons de jeunes dans notre région, sachant que plusieurs festivals et autres fêtes sont organisés annuellement, à l’instar de la fête de la robe kabyle, de la figue, le festival de la plante médicinale, le festival des arts plastiques… C’est une commune qui bouge et qui active beaucoup avec ces nombreuses associations. Les pouvoirs publics doivent prendre tout ça en considération et satisfaire, un tant soit peu, les doléances légitimes des citoyens. Notre commune regorge des talents de différentes compétences à lesquels on doit donner des chances d’être propulsées au devant de la scène nationale et même au-delà.

Et le problème d’eau, il se pose aussi ?

Eu égard à l’eau de l’Oued Sébaou déversait en mer et le barrage de Taksebt qui alimente la majorité des villages, la commune d’Illoula souffre terriblement de la pénurie d’eau. Et pourtant, nous sommes qu’à 9 kms d’Aït Zellal, un village raccordé à l’eau du barrage de Taksebt. Donc, la solution n’est pas sorcier. Il suffit de l’acheminer de ce village vers notre commune et le problème sera réglé définitivement. L’eau du barrage de Taksebt alimente d’autres wilayas et notre commune, qui est à 9 kms, vit un problème récurrent de ce précieux liquide. Je pense que c’est une condition sine qua non pour encourager l’habitat rural, et par ricochet, désengorger les grandes villes et éviter cet exode massif des montagnards. Mais cette aide doit être suivie de commodités. Sur le terrain, ces extensions n’ont pas bénéficié ni de l’électrification, ni de l’eau et encore moins du gaz. Nonobstant la non-actualisation des études faites en 2009, comme je l’ai déjà souligné.

Votre région est réputée pour les affaissements de terrain. Avez-vous pris des mesures de prévention pour cet hiver ?

Voilà une autre catastrophe. Nos routes sont dans un état de dégradation avancée. Ces glissements de terrain sont non seulement une catastrophe pour les routes, mais aussi une menace sérieuse pour les habitations de nos citoyens, qui appréhendent souvent le réveil des anciens glissements, même si leurs habitations sont construites dans les normes. En ce qui concerne nos routes, je constate qu’elles sont souvent réalisées dans la précipitation, pour ne pas dire bâclées, par des entreprises et sans le moindre suivi des services publics. Pour les préventions, nous mettrons tous les moyens dont dispose notre APC au service du citoyen, et nous serons toujours près de lui. Nous comptons aussi sur notre valeur ancestrale qui la solidarité et l’entraide entre les citoyens.

Entretien réalisé par Hocine Moula

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