Journée mondiale des langues maternelles et après…

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S. Ait Hamouda

Les langues maternelles, ou plutôt la langue de notre enfance s’invite sans qu’on en soit conscient, par prescience, par reflexe à nos discussions, à nos débat, à nos palabres. Elle est accordée de surcroît par notre mémoire collective et on la cultive, on l’entretient, on la greffe, parfois à d’autres acquis linguistiques. Elles, les langues maternelles, sont l’expression de naïve enfance. Jean El Mouhouv Amrouche écrivait : «Je sais tout faire avec la langue française, mais je ne sais pleurer qu’en Kabyle». C’est ce parler bu avec le lait maternel, collé à notre gosier, et qui parle en nous et dit le monde, comme nous le sentions alors. Absou Elimam, linguiste traduit ainsi ces langues «À cause de sa nature complexe, une langue c’est à la fois un habillage sonore, une mémoire collective, l’expression de ses propres désirs, un patrimoine collectif. Allez tirer tout cela au clair ! La nature fuyante des langues facilite cette fuite en avant qui réifie, non pas la langue (puisqu’elle est fuyante), mais ses productions (mots, phrases, textes). On refoule le producteur et la genèse de production au profit du produit fini. On est dans la position du primitif qui implore son bout de bois qui lui sert de « gri-gri ». Attribuer à des productions langagières des vertus et autres valeurs identitaires, c’est oublier que la valeur est dans le producteur et non pas dans le produit fini. Elle est dans l’Homme, quoi !» C’est quoi une langue maternelle, sinon le produit sonore de notre enfance et les sonorités de nos jeux, de nos souvenances nostalgiques d’antan. Aujourd’hui, elle s’efface devant un charabia berbéro-arabo-sabir qui ne veut exprimer nos origines authentiques et qui à chaque mot prononcé, relance en quelque sorte des reniements, des trahisons quelquefois et des répliques déracinées du langage de nos mères. Que l’on jacte en Tamazight, en Daridja, ou les deux à la fois, le français et l’arabe classique s’introduisent dans ce qu’on disait et exilent de facto de notre mémoire la langue maternelle. Que nous reste-t-il de celle-ci sinon des borborygmes que nos mères ne comprennent plus ? Advienne que pourra, les langues de nos mères sont en voie d’extinction et que pourrons-nous faire pour les maintenir en vie ? Rien…

S. A. H.

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