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Taghzout L’auteur du quadruple meurtre passe aux aveux

Les confessions du meurtrier

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«Le conflit est ancien et très compliqué. Nous avons déployé plus de deux cents éléments de la Gendarmerie nationale en plus de ceux de l’armée pour le localiser.

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Il s’est rendu sans aucune résistance. L’auteur du quadruple meurtre a avoué, lors de l’interrogatoire, ses crimes. Il voulait se suicider à l’aide de son arme au maquis. Il a expliqué son acte par ‘’la pression’’ qu’il subissait depuis plusieurs années, en raison d’un conflit qui l’opposait à son frère sur le passage d’un chemin agricole. L’enquête se poursuit toujours». C’est, en somme, ce qu’a déclaré, hier samedi, le lieutenant-colonel Mahdjoub Aribi-Kamal, chef du groupement de la Gendarmerie nationale de la wilaya de Bouira, au cours d’une conférence de presse spécialement dédiée à l’affaire du quadruple meurtre de la commune de Taghzout. Ainsi et selon le récit du lieutenant-colonel Mahdjoub Aribi-Kamal, l’affaire a commencé dimanche 18 juin vers 17h30, quand les services de la GN ont reçu un appel faisant état d’un triple meurtre au niveau du village El Kef Ouârkouv, relevant de la commune de Taghzout, au Nord de la wilaya de Bouira. Une fois sur place, les éléments de la Gendarmerie n’ont eu qu’à constater le décès de trois personnes, âgées de 57, 39 et 32 ans, toutes de la même famille. Il s’agit respectivement d’une mère, son fils aîné et de sa fille. L’auteur, le dénommé B. Amar 62 ans, qui prendra la fuite quelques minutes après avoir accompli son crime, n’est autre que l’oncle paternel des jeunes et le beau-frère de la femme, âgée de 57 ans, qu’il a froidement assassinés à l’aide de son fusil de chasse de marque russe : «Les premiers éléments de l’affaire étaient réunis dès le premier jour. Nous avons immédiatement enclenché une enquête et un ratissage dans les maquis proches au village, dans l’espoir de retrouver l’auteur présumé de ces trois crimes», affirme l’intervenant, qui précise que les opérations de recherche et de ratissage ne se sont jamais arrêtées tout au long de cette période : «Nous avons organisé des ratissages quotidiens à partir du 18 juin. Nos éléments effectuaient des patrouilles pour surveiller la maison des victimes. Entre-temps, l’enquête se poursuivait et plusieurs personnes, notamment des proches et des voisins de l’auteur présumé, ont été convoquées et auditionnées par nos services», a déclaré le chef de la Gendarmerie nationale de Bouira. Toujours selon ce dernier, l’un des fils du présumé auteur de ces crimes était régulièrement en contact téléphonique avec son père : «Il l’avait appelé à maintes reprises vers son téléphone portable, chose que nous ignorions au départ», a-t-il ajouté, avant d’affirmer que le fugitif ne s’est finalement pas caché à proximité de son village, mais très loin dans des maquis proches du village Merkala, au pied des montagnes Tikjda : «C’est un chasseur très expérimenté. Il était, aussi, un élément patriote (GLD). Il ne s’est jamais réfugié à proximité de son village. En connaisseur de la région et de sa géographie, il s’est caché, dès le premier jour, sur l’autre versant, aux environs du village de Merkala, au pied de Tikjda. Il changeait sans cesse de lieu, pour qu’il ne soit pas repéré.

L’accusé raconte comment il a tué son neveu et sa nièce par accident

Entre-temps, il a essayé de s’approcher, au moins deux fois, de son village, mais nos éléments l’avaient repoussé et il disparaissait dans la nature juste après». Le forcené a finalement réussi à revenir sur les lieux, le mardi 20 juin au petit matin, et a commis un autre crime. Il tuera son frère aîné, B. Abdelkader 76 ans, toujours à l’aide de son fusil de chasse : «En réalité, il s’est faufilé près du village durant la nuit qui a précédé le meurtre, et il est resté embusqué dans un petit ravin proche de la maison des victimes pendant plus de 7 heures, où il attendait la sortie de son frère de son domicile pour l’assassiner. Et c’est ce qui s’est passé vers 7h de la matinée en cette journée du mardi, puisqu’en voyant son frère sortir de sa maison, il l’a ciblé et tué sur le champ. Le fils de la victime a essayé de riposter, en vain. Un bref échange de tirs s’est déroulé entre les deux parties, peu avant l’arrivée de nos éléments, postés non-loin de la maison», a-t-il affirmé. Après ce quatrième crime, une très importante opération de ratissage a été enclenchée par la Gendarmerie nationale, et d’énormes moyens humains et matériels ont été mobilisés : «Juste après cela, nous avons décidé de tripler notre effort et d’utiliser tous nos moyens pour le trouver avant qu’il ne réalise un autre meurtre. C’est ainsi que pas moins de 200 de nos hommes, en plus des sections de militaires, ont été mobilisés, appuyés par trois brigades cynotechniques, la brigade d’intervention GIR, la brigade criminelle et un hélicoptère. L’opération ne s’est arrêtée que mercredi après-midi vers 15h30, soit après l’interpellation du présumé auteur du quadruple meurtre». Le lieutenant-colonel précise, dans le même sillage, que l’interpellation de deux fils et beaux-fils de B. Amar a accéléré la localisation de ce dernier : «Nous avons pensé, dans un premier temps, à lui couper tout soutien probable, c’est pour cela que nous avons interpellé ses fils et beaux-fils. Et au cours des interrogatoires, l’un de ses fils nous a remis son numéro de téléphone, et c’est ainsi que nous avons pu le localiser en un temps record. Il s’était réfugié, à quelque 3 kilomètres, dans un maquis du village voisin de Merkala», a-t-il ajouté. Et d’enchaîner: «Après sa localisation, nos troupes l’avaient encerclé et il s’est tout de suite rendu, sans la moindre opposition ni résistance». Interrogé sur les sources de son ravitaillement en nourriture durant sa période de cavale, le conférencier a affirmé que le forcené s’approvisionnait en eau et en nourriture dans les villageois voisins : «Il cachait son fusil et se rendait vers les villages voisins, Draâ Lakhmiss, Maâdhi et Merkala, où personne ne le connaissait. Il achetait de la nourriture et de l’eau auprès de commerçants locaux. Il s’est même rendu une fois dans la maison d’un villageois», affirme le même responsable, qui ajoute qu’une seconde enquête a été ouverte, pour déterminer les sources de son approvisionnement en cartouches.

Il voulait tuer ses deux autres neveux avant de se suicider

«Nous avons trouvé sur lui plus de 35 cartouches», a-t-il noté. Après son interpellation, l’auteur présumé a été conduit directement vers le siège du groupement de la Gendarmerie à Bouira pour les besoins d’interrogatoire. Au cours de ce dernier, il a tout de suite avoué les faits et a aussi déclaré qu’il comptait se suicider : «Lors de son interpellation, il était très malade et affaibli. Il nous a raconté plusieurs détails de cette affaire et du conflit familial, qui dure depuis les années 1980, pour une affaire de passage d’une petite route agricole sur le terrain de B. Abdelkader. Il a tout de suite avoué ses crimes, en affirmant qu’il voulait encore tuer deux autres fils de son frère et se suicider après. Il n’avait aucun regret pour son frère et son épouse. Il a, néanmoins, dit avoir regretté l’assassinat de sa nièce et son neveu. Selon-lui, il les a touchés accidentellement», déclare le même intervenant. Le lieutenant-colonel a confirmé, par ailleurs, que l’auteur présumé a récemment récupéré l’arme avec laquelle il a commis les quatre crimes, et ce dans le cadre de l’opération de restitution des fusils de chasse à l’échelle de la wilaya : «Nous lui avons remis son fusil, car l’enquête de la personne n’a démonté aucune anomalie et son casier judiciaire était vide. Mais après cette affaire, nous avons confisqué toutes les armes du village, afin d’éviter que des actes similaires ou des représailles se produisent», a-t-il martelé.

La gendarmerie dément toute histoire de mœurs liée à l’affaire

Notre interlocuteur a aussi expliqué que des faits presque similaires se sont déjà produits entre les deux frangins en 1984 et 1996. L’un deux, B. Abdelkader, a été déjà condamné par la justice à purger des peines d’une année et deux ans de prison ferme : «En 1984, B. Abdelkader a été condamné à une année de prison ferme, après une bagarre violente avec son frère pour le même motif. Cette année-là B. Amar avait retiré sa plainte après la demande de leur mère et son frère fut, ensuite, libéré. Par contre, en 1996, B. Abdelkader a écopé de deux ans de prison ferme après avoir blessé, à la jambe, son frère à l’aide de son fusil de chasse». Interrogé sur une prétendue affaire de mœurs opposant les deux parties, le lieutenant-colonel Mahdjoub a démenti cette information que plusieurs médias avaient rapportée : «C’est une fausse allégation. Il n’y a aucune affaire de mœurs entre les deux parties. D’ailleurs, l’auteur présumé a, lui aussi, démenti cela lors de notre interrogatoire. Le seul conflit existant entre eux, c’est l’affaire du passage de la route. B. Amar se voyait maltraité et malmené par son frère qui s’opposait à ce passage depuis les années 80», a-t-il affirmé. À noter, enfin, que l’auteur présumé a été présenté devant le procureur de la République, hier samedi, et ses deux fils sont cités à comparaître dans le cadre de l’enquête judiciaire. Cette tragédie, qui a été largement rapportée et commentée par les médias nationaux et même internationaux, a marqué les esprits des citoyens de la wilaya, particulièrement ceux de la région de Taghzout, toujours en deuil.

Oussama Khitouche

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