La santé publique, ce «grand corps malade» !

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Le secteur de la Santé publique à travers la wilaya de Tizi-Ouzou est en souffrance. Certains n’hésitent pas à le qualifier de… «grand corps malade» !.

Les patients, qu’ils soient grands malades, malades chroniques ou simples malades, galèrent pour une simple consultation, une radiologie ou des analyses médicales des plus conventionnelles. Sachant qu’à travers toute la wilaya, il n’existe qu’un seul CHU, qui a fini par acquérir une réputation d’hôpital régional, puisque des malades des wilayas voisines comme Boumerdès, Béjaïa, Bouira et même Alger y viennent en quête de soins efficients. Le CHU Nedir Mohamed de Tizi Ouzou, malgré tous les efforts et les moyens disponibles n’arrive pas à répondre à la demande du flux de patients qui le prennent d’assaut quotidiennement. La première solution préconisée, à savoir la réalisation d’un nouveau CHU, ne se concrétise pas. La situation économique du pays n’aide en rien le passage à l’acte de construire enfin cet hôpital tant attendu pour diminuer la pression sur le CHU Nedir Mohamed. Le projet a été gelé en raison de la crise économique. Les EPH préconisés sont tous en stand bye. Les polycliniques, les dispensaires et les unités de soins de la périphérie sont pour la plupart sous-équipés et tournent sans assurer parfois le minimum. Les EPH et les structures de la périphérie ne disposent ni de personnel spécialisé en nombre suffisant, ni de moyens adéquats, du coup, pour consulter un médecin spécialiste, se faire un bilan nécessitant des analyses ou parfois pour une simple radiologie au rayon x, les malades n’ont d’autre choix que celui de se rendre au CHU de Tizi Ouzou. D’autres patients plus aisés vont chez le privé.

Plusieurs unités de soins fermées à travers la wilaya

à travers tout le territoire de la wilaya de Tizi Ouzou, qui compte, pour rappel, 21 daïra et 67 communes, on n’enregistre que sept EPH et huit EPSP. C’est comprendre que la Santé n’est pas partout présente. Sur les 21 daïra de la wilaya, il n’y a que sept qui disposent d’un hôpital de quelques dizaines de lits. Le nombre de lits global disponibles au niveau des sept hôpitaux n’est que de 1 240. Les huit EPSP de la wilaya totalisent 59 polycliniques et 290 salles de soins souvent dans un état de délabrement avancé et ne disposent pas de moyens suffisants. Pire, plusieurs unités de soins sont aujourd’hui fermées pour différentes contraintes et difficultés. A signaler que plusieurs d’entre-elles, soit disant polycliniques, ne fonctionnent que de jour et ne sont dotées ni de service des urgences, ni de radiologie, ni de laboratoire d’analyses médicales, ni de maternité et ne possèdent même pas une ambulance, c’est dire qu’elles n’ont de polycliniques que le nom. Il faut aussi rappeler qu’en matière des ressources humaines, le nombre est très insuffisant, car on comptabilise un médecin spécialiste pour 3 246 habitants, un médecin généraliste pour 1 450 habitants, un chirurgien dentiste pour 3 418 habitants et un seul ouvrier paramédical pour 204 habitants. Des chiffres qui en disent long sur le manque de personnel aussi bien spécialisé que médical et paramédical. A signaler aussi que les moyens font souvent défaut. Rares sont les EPH qui disposent d’un scanner ou d’une IRM. Quant aux soins lourds comme la radiothérapie, il faut aller sur Alger, Blida, Constantine ou Oran. C’est comprendre que les cancéreux vivent un calvaire inhumain.

Des polycliniques sans laboratoires, ni maternité ni encore moins un service des urgences !

Au niveau de la daïra de Mâatkas, le secteur de la Santé publique n’est pas dans le meilleur des états. La daïra compte à l’origine deux polycliniques (Souk El Tenine et Souk El Khemis) et six unités de soins, toutes fermées. Pour la polyclinique de Mâatkas, hormis l’espace, qui est disponible, le reste n’est point. Le maire, Lyes Laguel, questionné au sujet de la Santé dans sa commune, forte de 45 villages et de 35 000 habitants, déplorera : «A Mâatkas, le secteur de la Santé est le parent pauvre. Nous avons une polyclinique, mais que de nom. Elle n’a ni laboratoire, ni maternité et encore moins un service des urgences. Pire encore, elle ne dispose même pas d’une ambulance. Nous avons pourtant assez d’espace et plusieurs bureaux fermés qu’on peut utiliser pour en faire une véritable polyclinique. Nous avons aussi trois unités de soins à Berkouka, Icheqiyen et Ighil Aouane, mais elles sont toutes fermées», regrettera le maire. A souk el Tenine, la situation n’est pas meilleure, le premier responsable de la commune dénonce : «L’état de notre polyclinique est déplorable, elle a besoin d’un véritable projet de réhabilitation. Le service de radiologie est inopérant car c’est un modèle des plus anciens, souvent en panne. Les responsables de l’EPSP de Draâ Ben Khedda affirment qu’une radiologie sera achetée dans le cadre du budget de fonctionnement, mais nous ne voyons rien venir. Le laboratoire d’analyses médicales est délocalisé vers une autre polyclinique, une injustice. Le manque d’effectif et d’hygiène est à déplorer au niveau de la maternité. La polyclinique dispose d’une ambulance. Les trois unités de soins sont toutes fermées, elles ont besoin de travaux de réhabilitation, d’équipement et de personnel. Nous allons, grâce à la subvention de l’APW, essayer de soulager ces structures», ajoutant : «Concernant le projet d’hôpital, rien n’est fait jusqu’à présent. L’enveloppe de 60 milliards de centimes initiale existe, mais elle a besoin d’être réévaluée au moins au double», souligne-t- il.

Seulement un médecin et un dentiste pour tout Mechtras

à Mechtras, une commune relevant de la daïra de Boghni, l’état des lieux n’est pas meilleur, puisque la commune ne dispose pas de polyclinique. Au chef lieu, il n’y a qu’un dispensaire avec un fauteuil dentaire et un médecin, sans plus. Le P/APC, Omar Cheballah, n’est pas satisfait de l’état des lieux du secteur. «Notre commune n’a pas de polyclinique, nous n’avons qu’un dispensaire au chef lieu avec un dentiste et un médecin. Nous n’avons ni service de radiologie, ni laboratoire d’analyses médicales, ni maternité ni ambulance. Nous avons aussi deux unités de soins à Ihesnaouen et Ait Imghour, mais elles ne prodiguent que des soins élémentaires. Nous avons besoin d’une polyclinique, mais il nous faut une assiette foncière pour demander son inscription. Un terrain de sept hectares, appartient au secteur de la formation professionnelle, existe au niveau de Vouavane, ce serait une bonne chose de le mettre à la disposition de la commune pour lancer la construction de plusieurs structures d’utilité publique», dira M.Cheballah.

La polyclinique de Ouadhias, une carcasse dégradée sans âme

à Ouadhias, une source responsable et au fait du dossier qualifiera la situation de catastrophique. «La polyclinique des Ouadhias est dans une situation catastrophique. L’étanchéité est à refaire car les infiltrations sont monnaie courante. à l’entrée de la structure, le réseau de l’assainissement est endommagé, du coup, les odeurs nauséabondes et pestilentielles accueillent les malades et le personnel. Il ya aussi le manque de sécurité et d’effectif. Les DSP qui se sont succédés à la tête du secteur se sont tous engagés à faire le nécessaire, mais aucun n’a tenu son engagement.», nous dira le concerné. A signaler qu’au niveau des communes d’Agouni Gueghrane, d’Ait Bouadou et de Tizi n’Tléta, des polycliniques sont indispensables. Les dispensaires et unités de soins répartis sur quelques villages n’assurent que des soins élémentaires. Au sujet de l’hôpital de 60 lits des Ouadhias, lancé en mai 2014, les travaux ne sont qu’à 45% d’avancement alors qu’il devait être réalisé en 28 mois. Il est donc urgent de passer à la concrétisation des projets inscrits à l’indicatif de la wilaya, d’autant plus que leur dégel a été annoncé par les autorités compétentes. Il est aussi tout indiqué de réhabiliter les structures existantes et de les doter de moyens humains et matériels pour redorer le blason terni du secteur de la Santé publique à Tizi-Ouzou. Le dégel du nouveau CHU, de la clinique mères-enfants, des EPH et la finalisation du centre anti cancer de Draâ Ben Khedda sont des urgences à prendre en charge au plus vite pour améliorer l’état des lieux et alléger un tant soit peu la souffrance des malades.

Hocine T.

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