La France condamnée pour négligence

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Après plusieurs mois de suspense, le verdict est enfin tombé dans l’affaire du décès d’Ali Ziri.

En effet, la France a été officiellement condamnée avant-hier, jeudi, par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour négligence dans le décès d’Ali Ziri, le retraité algérien âgé de 69 ans, suite à son interpellation par la police le 9 de juin 2009. Par ailleurs, la CEDH a jugé dans son verdict que le retraité originaire de la commune d’Ath Rached, dans la wilaya de Bouira, n’a pas été victime de violences disproportionnées comme avancé par la défense de la famille, et que l’usage de la technique de pliage par les policiers (technique d’interpellation policière consistant à maintenir une personne la tête appuyée sur les genoux interdite dans certains pays du monde), est justifiée et réglementée : «L’immobilisation forcée de M. Ziri par la technique dite du ‘pliage’, alors qu’il se trouvait dans un véhicule de police à destination du commissariat, était justifiée et strictement proportionnée au but poursuivi», lit-on dans le verdict de la cour européenne. La CEDH a confirmé, en revanche, que l’incarcération d’Ali Ziri pendant plusieurs heures à l’intérieur du commissariat d’Argenteuil a été caractérisée par de graves négligences vu son état de santé, et que les policiers auraient dû le transférer à l’hôpital plus tôt : «La situation de M. Ziri au commissariat a été traitée avec négligence par les autorités compétentes», précise la CEDH. Elle estime aussi que les policiers «ne pouvaient ignorer l’état dans lequel se trouvait M. Ziri lors de son arrivée au commissariat, eu égard à son âge, son état d’ébriété et cette technique d’immobilisation dont ils connaissaient nécessairement la dangerosité… Il apparaît, ainsi, comme cela ressort aussi de l’avis rendu en l’espèce par la commission nationale de déontologie de la sécurité, que la situation de M. Ziri au commissariat d’Argenteuil a été traitée avec négligence par les autorités», affirme la Cour de Strasbourg. Les juges de la cour européenne notent seulement deux lacunes dans le dossier juridique de cette affaire, à commencer par la longueur de la procédure qui aura duré six ans et huit mois, et aussi l’absence de toute reconstitution des faits. À noter, enfin, que la France va devoir verser une somme de 30 000 euros pour dommage moral pour la famille d’Ali Ziri et 7 500 euros pour frais et dépenses. Pour rappel, Ali Ziri est décédé à l’hôpital d’Argenteuil en France le 11 juin 2009, deux jours après son interpellation avec son ami par la police dans cette même région, pour conduite en état d’ivresse. Les deux hommes avaient été transportés au commissariat d’Argenteuil et placés en garde à vue. Tombé dans le coma, Ali Ziri était mort deux jours plus tard à l’hôpital d’Argenteuil. Alors qu’une première autopsie avait imputé son décès à des problèmes cardiaques et à l’alcoolémie, une contre-expertise avait révélé la présence de plus de vingt hématomes, dont certains larges de 17 cm. La justice française avait, dès 2016, classée l’affaire et prononcée plusieurs «non-lieux» suite aux plaintes déposées par la famille du défunt et aux requêtes publiées par plusieurs ONG de défense des droits de l’Homme, dont Amnesty Internationale et l’ACAT.

Oussama Khitouche

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