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BOUIRA - Prolifération des parkings sauvages : Lorsque l’anarchie et le racket sont «tolérés»…

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Pour un automobiliste se rendant à Bouira, plus précisément au chef-lieu de wilaya, trouver une place de stationnement relève tout simplement du parcours du combattant.

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Les institutions publiques ne sont pas toutes dotées de parking pour les visiteurs et à chaque fois, il faudra tourner plusieurs fois dans les quartiers en espérant qu’un bout de trottoir se libère pour pouvoir se garer. Une fois la manœuvre effectuée, il n’est pas rare de voir débarquer un jeune faisant sonner des pièces de monnaie dans sa main en regardant le chauffeur d’un œil fixe pour lui faire comprendre qu’il est chargé de surveiller les véhicules stationnés. Ceci même si vous êtes sur un emplacement où il est indiqué «stationnement interdit» et que vous tentez le diable au risque de voir un sabot fixé sur la roue avant de votre véhicule. Cette situation cocasse est monnaie courante à Bouira, notamment à proximité de la gare ferroviaire, juste en face du marché couvert. Plusieurs automobilistes se font avoir régulièrement en la présence de jeunes qui affirment que la police tolère ce stationnement. Toutefois, lorsque les éléments de la police installent leurs sabots aux contrevenants, les jeunes gardiens se volatilisent et ne reviennent que le lendemain. Toutefois, si les places de stationnements sont rares, les gardiens de trottoirs, eux, sont nombreux et n’hésitent pas à se manifester à la moindre occasion.

Des jeunes prèpubères s’improvisent gardiens de parkings

À proximité de l’ex-gare routière de Bouira, en cette période estivale, le trottoir menant vers le rond-point Cevital fait l’objet d’un «deal» entre deux jeunes à peine pubères issus de différents quartiers et tout véhicule stationnant en ces lieux doit s’acquitter de la somme de 50 dinars. Des jeunes qui, en dehors des vacances scolaires, ne se manifestent pas. Un tarif généralisé, pratiqué dans toute la ville et sans mauvais jeu de mot gare à celui qui n’aurait pas cette pièce jaune réservé à cet effet. Le phénomène des parkings sauvages est légion dans la wilaya de Bouira, mais les autorités de wilaya n’ont pas jugé nécessaire d’émettre un quelconque arrêté pour mettre un terme à cette situation pénalisante à plus d’un titre et de ce fait, ils exercent sur les automobilistes un racket qui ne dit pas son nom. Devant le pavillon des urgences de l’hôpital Mohamed Boudiaf, et malgré la présence d’un parking trop exigu, des jeunes se sont octroyé un pan de trottoir pour rançonner les automobilistes. Idem au niveau de la polyclinique d’Oued D’hous où le conducteur n’a pas le temps de déposer le malade à terre qu’un gaillard de forte corpulence surgit pour demander son dû. Oui car la plupart du temps, ces jeunes n’acceptent pas de se faire payer en quittant les lieux et ils exigent d’être payés sur place. Au quartier Hay Ethawra, derrière la 2ème sûreté urbaine s’il vous plait, des jeunes rackettent également les automobilistes tout en jouant au chat et à la souris avec les policiers qui font régulièrement des rondes à la périphérie de ce commissariat. Là aussi, le même topo est de rigueur : «Parking Aâmi, tkheless d’avance !» On comprend aisément pourquoi payer d’avance lorsqu’on sait qu’à son retour on trouvera un autre jeune qui se proclame également gardien de parking et pour le coup, l’automobiliste se verra doublement taxé par ces «droits de stationnement». Ces aires de stationnement sont, le plus souvent, des espaces entre deux immeubles, ou de simples terrains vagues adjacents à des bâtiments. Il faut dire qu’en réalité, aucun de ces espaces n’a été aménagé pour le stationnement et des panneaux de signalisation l’interdisent même. D’ailleurs, si l’on se réfère aux bordures des trottoirs avec les bordures peintes en rouge et blanc, couleurs rappelant la même interdiction, aucun endroit n’est propice pour se garer. Toutefois, cela n’empêche pas les automobilistes de stationner et ces derniers n’ont pas vraiment le choix. Sur d’autres sites, aucune plaque n’indique qu’il s’agit là d’un parking et ne sont aucunement délimités, clôturés. Ce sont pour la plupart des parkings illicites, gérés par des jeunes désœuvrés qui se sont autoproclamés gardiens. Au niveau des cités de Bouira, certains espaces ont été créés pour les uniques automobilistes résidants dans ces cités, mais dont un quelconque automobiliste de passage peut s’en servir. Ces mêmes espaces se transforment, à la nuit tombée, en parking gardé. Des gardiens, dont l’activité n’est nullement réglementée, proposent leur service aux riverains moyennant 2 000 DA le mois, comme c’est le cas au niveau de la cité Zerrouki. Ainsi, en l’absence de ce genre d’espaces qui font désormais partie intégrante des villes modernes, l’automobiliste se débrouille comme il peut pour trouver une place de stationnement qu’il paie au prix fort, sous la menace de voyous.

Des menaces à peine voilées en guise d’avertissement

Il faut dire que devant des individus qui ne reculent devant rien, l’automobiliste accosté pour s’acquitter de son stationnement n’a guère le choix. «Récemment, un automobiliste s’est fait molester par un de ces jeunes du côté des bâtiments de l’ex-gare routière de Bouira, en fin de soirée», raconte un transporteur d’Ath Laâziz, témoin de la scène : «Tu sais ce que je fais avec l’argent que je récolte dans la journée ?», invectivait le gardien de parking à l’automobiliste qui ne voulait pas payer. «Je remplis ma tête chaque soir en buvant et en fumant». Le racketteur menacera même de frapper l’automobiliste et devant ces intimidations, le jeune a lâché une pièce, de peur de voir son véhicule saccagé le lendemain, car étant un habitué des lieux. Il est évident que ces parkings illicites s’apparentent beaucoup plus à du racket qu’à une prestation de gardiennage et le tout est couvert, malheureusement, par le mutisme des autorités, malgré les différentes instructions ministérielles visant à éradiquer ce phénomène de nos villes. Une situation qui semble tolérée par les pouvoirs publics.Ces derniers, qui ont consenti beaucoup d’efforts ces dernières années dans l’amélioration et l’aménagement urbains, auraient pu prévoir l’implantation d’aires de stationnement, un peu partout, en ville. Des assiettes de terrains existent, pour peu que des projets de parkings à étages ou en sous-terrain y soient inscrits.

Hafidh Bessaoudi

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