Le parcours du chahid Said Krim revisité

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L’adhésion de Krim Belkacem au mouvement national dès la fin des années 40 incitera les autres membres de sa famille à militer au sein des organisations tels le PPA et le MTLD, avant de prendre les armes en 1954 pour participer à la guerre de libération nationale.

Le parcours du Chahid Krim Said relate avec force détails cet engagement pour libérer le pays du joug colonial. En dépit de son jeune âge, ce futur aspirant de l’ALN (à 16 ans) accueillait le premier noyau d’Aït Yahia Moussa à l’image de Belkacem Krim, Amar Ouamrane, Aomar Oudni, Mohamed Talah, Mohamed Moussaoui et Charchar, dans le café maure qu’il tenait sur la RN25, en leur servant gentiment du thé. Il s’imprégna de leur projet, à savoir le déclenchement de la guerre de libération nationale. Said Krim est né le 25 juillet 1931 à Tizra Aissa relevant de l’ex-commune mixte de Draâ El-Mizan. Encore adolescent, son père Ramdane l’employa comme serveur dans leur café maure. C’est en septembre 1955, moins d’une année après le déclenchement de la révolution, que son cousin Rabah Krim lui proposa de rejoindre le maquis dans sa région natale. «Sans aucune hésitation, vu sa conviction de la révolution, en jeune homme courageux et sans aucune réflexion, il prit son fusil de chasse et monta au maquis», raconte-t-on. D’emblée, il organisa avec son groupe des embuscades et des attaques au niveau du Pont noir, à Tighilt Oufala et au café El Hadj El Hocine (père de Belkacem Krim) où il sortit toujours vainqueur donnant du fil à retordre à l’armée coloniale. Voyant en lui un fin stratège militaire dont les qualités guerrières étaient avérées, le futur colonel Amar Ouamrane le chargea de constituer un groupe de dix éléments afin de participer à la sécurisation du congrès de la Soummam tenu à Ifri Ouzalaguène (Béjaïa). D’ailleurs, au retour du congrès très réussi, il fut désigné chef de secteur (adjudant) à Maâtkas avec comme adjoint Rabah Toutah. Au début de l’année 1957, Omar Ousseddik, Mohamed Bougara, Moh Ouali, Ali Bennour, de passage à Aït Yahia Moussa, étaient accueillis par Said Krim et Rabah Krim. «Continuez sur cette voie. La révolution sortira grandiose avec des hommes de votre trempe», leur dirent-ils. D’ailleurs, au mois d’avril de la même année, alors qu’il prenait comme d’habitude son chemin de Tizra Aissa vers son QG à Maâtkas, une embuscade lui fut tendue à Kantidja du côté de Boumahni, une autre zone dangereuse. Suite à l’accrochage, il fut blessé à l’épaule. Transporté jusqu’à Aïn Zaouïa, Said Slimani (Said le pharmacien) le soigna. Lors d’une réunion tenue en septembre 1958 entre les chefs de régions à Tirmitine (Boghni), dont le commandant Iddir, le capitaine Rabah Krim et le commandant Ali Bennour, Said Krim prit la parole et rassura ces chefs qu’avec ses trente éléments, il était prêt à se déplacer là où ils voulaient. Il participa, alors, à l’offensive de Helaouane sur les hauteurs de Bounouh… D’année en année, alors que la révolution se heurtait à quelques difficultés, Said Krim s’affirma sur le terrain. En février 1959, lors d’une réunion initiée à Maâtkas par le commandant Ali Bennour, Moh Ouali, le commandant Iddir et le capitaine Rabah Krim, et après concertation entre ces chefs, Said Krim fut élevé au grade d’Aspirant pour prendre la région Sud de Tizi-Ouzou (Draâ El-Mizan, Aïn Zaouia, Frikat jusqu’à Bounouh…). Avril 1959, il présida une réunion dans laquelle fut préparée l’embuscade de Tighilt Laâbid (Aïn Zaouia) durant laquelle fut tué le capitaine Maurot par Moh Ouslimane (Mohamed Slimani) en endommageant aussi les camions et les blindés ennemis. Ayant une information que son frère Ahmed Krim était tombé au champ d’honneur au cours de l’opération Jumelle (juillet 1959) à Ravets (Ait Yahia Moussa), alors que sa mère, sa belle-sœur, son fils Slimane (tué sur le dos de sa femme) étaient morts dans le bombardement et que sa femme souffrait de blessures, il se rendit en compagnie du capitaine Rabah Krim sur les lieux et ils jurèrent de venger ce massacre et de combattre jusqu’à leur dernier souffle. Le 18 août 1959 (anniversaire de son décès), l’Aspirant Said Krim et ses adjoints tenaient une réunion à Imazgharène (Frikat) dans une maison appartenant à la famille Akli à huit heures du matin. Les Harkis eurent vent de cette rencontre et le rapportèrent aux soldats français stationnés au centre de Frikat. Ces derniers les encerclèrent. Il lança sur eux des grenades et réussit à sauver la vie à six adjoints. Il tomba au champ d’honneur à neuf heures du matin. Des renforts arrivèrent des deux côtés des protagonistes et le combat continua jusqu’au soir. Huit chahids tombèrent ce jour-là au champ d’honneur. La nuit tombée, des femmes accoururent avec des couvertures et couvrirent les corps. Du côté de la force armée coloniale, l’on compta beaucoup de pertes humaines et matérielles. Le gendarme Guirrou et le capitaine des soldats annoncèrent, lors de leur réunion, que le plus dangereux de la région, Said Krim, était tombé. C’étaient les réjouissances dans tout le secteur militaire de Draâ El-Mizan et de Tizi-Ouzou. Ce fut la fin du parcours héroïque de l’aspirant Said Krim que les officiers Iddir, Moh Ouali, Ali Bennour, Rabah Krim avaient promis d’élever au rang de sous-lieutenant en septembre 1959. Malheureusement, il décéda arme à la main dans cette attaque, quelques jours avant. En octobre dernier, une stèle à sa mémoire a été érigée au CFPA de Draâ El-Mizan qui porte son nom. Par ailleurs, son fils unique Rachid est sur l’écriture d’un ouvrage sur son père mais aussi sur Rabah Krim.

Amar Ouramdane

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