Les BHC otages d’une réglementation désuète

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Ayant pour mission de veiller à la bonne santé du citoyen, en anticipant l’apparition de toute intoxication ou épidémie liées au manque d’hygiène, le bureau d’hygiène communal (BHC) reste hélas otage d’un statut dépassé par le temps.

Le plus récent décret relatif à l’activité des BHC est en effet celui de 146/87 datant de 1987. En dépit donc de leur rôle capital pour un cadre de vie et un environnement sains, les BHS demeurent les segments les plus faibles au sein des APC. Selon certains membres de ces bureaux de la wilaya de Béjaïa, leurs PV de constats et leurs recommandations restent souvent vains. La preuve, dira notre source, est qu’en ces temps d’inquiétude après l’apparition de l’épidémie de choléra dans certaines régions du pays, ces BHC ne sont destinataires d’aucune correspondance de la part de leur 1ère tutelle, les collectivités locales, pour une activité exceptionnelle au niveau des communes correspondantes. «Dans le passé, nous avions une activité intense durant l’été, car c’est une période de grande consommation, donc de risque d’apparition des intoxications alimentaires, voire des épidémies. Mais, voilà qu’en ces moments de crainte générale du choléra, les BHC sont restés dans l’ombre, sans même un rappel à une reprise de notre activité habituelle», dira avec amertume un technicien auprès d’un BHC. Et sachant que leur mission est d’assurer le contrôle des sources, des réseaux d’eau potable et d’assainissement, du contrôle des aliments de toute nature destinés aux cantines, aux restaurants ou aux consommateurs, la collecte et la gestion des déchets, la santé animale et le respect des règles d’hygiène urbaines et rurales, les BHC ne sont pas considérés à leur juste valeur par leur tutelle, à savoir l’APC de leur territoire. «Nous trouvons des difficultés, pour ne pas dire que nous sommes complètements mis à l’écart dans certaines situations. En matière de mises en demeure et de fermetures par exemple, nos propositions restent des lettres mortes au sein de l’exécutif communal», dira un autre responsable d’un BHC. Le constat est presque le même dans plusieurs communes de la wilaya où le laxisme des APC et la réglementation désuète régissant ces BHC ont fait de ces organes, 1er front de lutte et de protection du consommateur, un parent pauvre et un simple figurant sur la pyramide des services communaux. Un autre membre d’un bureau d’hygiène communal, lui, a préféré raconter un cas illustrant très bien les excès de zèle de certains P/APC et les conséquences du non respect des mesures et décisions des BHC : «Il y a plusieurs années, nous avions émis un avis défavorable à un projet d’évacuation des eaux usées d’un bloc d’habitations, mais l’APC l’a complètement ignoré. Quelques mois après, il y a eu une épidémie de fièvre typhoïde avec plusieurs cas de malades évacués à l’hôpital». Dans une autre grande commune de la wilaya, un hygiéniste révèle que les forces de l’ordre ont refusé d’exécuter un rapport du BHC concernant la mise en demeure d’un vendeur ambulant d’eau potable, qualifiée, après analyses, de non propre à la consommation. Des procès verbaux de non-conformité, des avis défavorables à l’implantation de poulaillers à proximité des habitations et des rejets de demandes de réalisation des réseaux d’eau usées tout près des AEP… tous restés sans suites, font parties des preuves de non-respect des APC envers les tâches de leur BHC, souvent pour des considérations populistes ou électoralistes. Résultat : plusieurs communes sont noyées dans les affaires de justice avec des citoyens, des entrepreneurs ou des établissements publics ou privés. L’autre conséquence, c’est une insalubrité généralisée, une véritable bombe à retardement qui risque de tout emporter. Dans une autre commune, qui fait elle aussi face à un gros problème de décharge publique et qui offre un panorama environnemental désolant, les responsables locaux n’ont pas non plus jugé nécessaire d’associer l’équipe de leur BHC, ne serait-ce que pour une bonne communication et une sensibilisation afin de trouver une issue au problème en question. «Nous ne sommes sollicités et écoutés que lorsque nos responsables locaux se retrouvent devant une impasse, comme par exemple lors d’une crise de zoonose qui pourrait infecter l’homme», regrette un membre de BHC. Ces bureaux sont composés d’éléments représentants plusieurs secteurs, notamment les collectivités locales, la santé publique, la santé des cheptels, l’hydraulique, l’agriculture et quelques fois aussi les forêts. Une mosaïque avec une grande force de frappe, si elle n’était confrontée au laxisme ou, dans le meilleur des cas, à l’ignorance de certains élus en matière d’hygiène et de santé publique. Cela va de pair aussi avec la politique de la santé, o&ugrave,; en dépit des dépenses conséquentes, le côté préventif reste en deçà des espérances.

Nadir Touati

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