Les maires et les élus locaux divisés à Bouira

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La récente décision du ministre de l’Intérieur et des collectivités locales, M. Noureddine Bedoui, concernant la concession de la gestion des cantines scolaires à des entreprises privées, divise les maires et les élus locaux à l’échelle nationale.

Au niveau de la wilaya de Bouira, les avis des élus locaux divergent également, entre ceux qui soutiennent cette décision, et ceux qui émettent des avis réservés, et ceux qui s’opposent dans certains cas. Cette situation suscite également un débat plutôt politique et idéologique, à la différence des appartenances politiques de chaque élu.

Ainsi et du côté des partis politiques, favorables à une ouverture économique, l’avis est plutôt propice, d’autant plus que cette décision contribuera, selon certains élus du FLN et du RND, à alléger les charges des communes, notamment celles qui manquent de ressources financières et humaines, comme d’ailleurs la majorité des communes de la wilaya. Des élus à l’APW de Bouira, des partis du FLN, RND et aussi de TAJ, que nous avions contactés hier matin, ont tous salué une «décision sage et qui intervient à point nommé».

Un avis partagé également, par le maire de la commune de Dirah, M. Naili Belkacem d’obédience RND, nous a déclaré hier, que cette décision, une fois mise en application, contribuera à améliorer la qualité de la prise en charge des élèves au niveau de ces cantines, et à réduire la pression et les charges sur les communes, qui souffrent, selon-lui, du manque d’effectifs et des moyens : «Il s’agit pour nous d’une décision sage et qui apporte une solution à un problème récurrent. Au niveau de notre commune, nous avons 18 cantines scolaires, et avec le peu de ressources financières et de moyens que nous avons, nous n’allons jamais pouvoir assurer un service équitable et équilibré pour nos élèves. Nous ne pouvons même pas recruter de nouveaux employés pour faire fonctionner ces cantines, et améliorer la qualité des repas. Si la gestion des cantines scolaires sera cédée à des entreprises spécialisées, la qualité de la prise en charge sera améliorée et les repas équilibrés. Comme le dossier de transport scolaire, cette démarche apportera une nouvelle dynamique à nos communes, et apportera des emplois directs pour nos jeunes, et probablement des impôts supplémentaires qui vont atterrir dans les caisses des communes. Ainsi les services municipaux, s’occuperont exclusivement des dossiers de développement ou de l’entretien des équipements publics», nous a assuré, M. Belkacem Naili.

Pas le même son de cloche du côté des partis de l’opposition, notamment ceux issus de la gauche, à l’image du FFS, dont des élus dans la wilaya de Bouira, ont tous dénoncés «une remise en cause du principe de la gratuité de l’Éducation et de l’État social». Ainsi, les maires de Bouderbalah et de M’chedallah, deux communes gérées par les élus du plus ancien parti de l’opposition, ont manifesté, hier, une certaine crainte et appréhension à cette décision du ministère de l’Intérieur. Les deux élus se sont également interrogés sur les chapitres du cahier des charges qui sera élaboré par le département de Bedoui, tout en assurant que les communes «peuvent prendre en charge les cantines scolaires, à condition d’avoir plus de ressources financières, de prérogatives et de moyens».

Pour sa part, le vice-président de l’APW, Dr Hamid Chachoua, également élu du parti FFS, a qualifié cette décision de «grave et de fuite en avant». Le même élu nous a déclaré hier, que le principe de l’Éducation gratuite «ne peut pas admettre une telle décision». Selon-lui : «Les services du ministère de l’Intérieur, ne doivent jamais adopter cette décision, qui constitue une véritable menace pour le principe de l’Éducation gratuite en Algérie», avant de s’interroger : «Les élèves devront donc payer leurs repas dans une école gratuite ? Même les livres scolaires étaient gratuits dans le temps. Aujourd’hui, ils sont payants et même introuvables dans nos écoles ! Ce n’est pas la bonne solution pour régler le problème des cantines scolaires. Il s’agit pour nous d’un nouveau recul, dans les principes sociaux de l’Algérie !».

Dr Chachoua a également préconisé une révision du prix de base du repas, ainsi que le renforcement des moyens financiers et humains accordés aux autorités locales : «Nos mairies n’ont aucun moyen ni ressource. La récente opération de recrutement lancée par le ministère de l’Intérieur dans les postes de cuisiniers et aide-cuisiniers, en est un exemple. Les jeunes diplômés fuient ces propositions, car le salaire de 8000 DA, proposé est tout simplement dérisoire. Comme nous l’avions toujours réclamé, les maires doivent avoir plus de prérogatives, et les moyens et les budgets cédés aux collectivités locales doivent être revalorisés, car comme il s’agit d’un simple service public, les élus locaux peuvent s’occuper de ce dossier, sans l’aide du secteur privé. La somme de 46 DA, réservée au repas scolaire, doit être aussi revalorisée, afin de garantir des repas dignes et équilibrés à nos élèves», a-t-il enfin proposé.

Oussama Khitouche

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