Accueil Évènement Lorsque la beauté des paysages s’oppose à l’opulence

TIZI-OUZOU - Voyage au cœur des villages sous-développés : Lorsque la beauté des paysages s’oppose à l’opulence

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Totalisant 1 500 villages, la wilaya de Tizi-Ouzou peine à répartir équitablement ses ressources nécessaires au développement local. Le bien-être des populations villageoises est loin d’atteindre le minimum requis.

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De la main du juif de la somptueuse montagne du Djurdjura, l’enchaînement des villages et des hameaux constitue un baume au cœur et un régal délicieux pour les yeux. La beauté de l’enchevêtrement des maisons et leur enchaînement, telles des perles rares sur les collines, fait ressortir un paysage des plus exquis à contempler sans modération et à apprécier enfin d’en tirer ce calme et cette paix recherchée, notamment les citadins. À partir du toit de la Kabylie, à proximité du pic de Lala Khadidja, on peut voir généreusement tous les villages et hameaux de la wilaya de Tizi-Ouzou. Le visiteur quand il se retrouve en ces lieux ne peut songer à les quitter. Ni le froid qui caractérise ces lieux, ni le risque d’enneigement en hiver, encore moins la chaleur du mois de juillet ne poussent à abandonner ces endroits paradisiaques. Hélas, cette beauté, ces sites, ces collines et ces montagnes, même si elles ne le montre pas du premier coup, en souffrent silencieusement. Quand on se hasarde dans les villages, les hameaux et les petites agglomérations des chefs-lieux, on comprend que toute cette beauté, que tout ce potentiel naturel cache beaucoup de laisser-aller. Beaucoup de retard et de manques à combler. À l’intérieur des villages, il est exacte que des efforts sont accomplis, notamment le réseau électrique, l’AEP et le gaz naturel, mais beaucoup reste à faire car les villages ne sont presque que des dortoirs. Les infrastructures et les équipements de base nécessaires à rendre plus viables ces hameaux brillent généralement par leur indisponibilité. D’Aït Yahia Moussa à Ath Yenni en passant par Draâ El-Mizan, Boghni, Ouadhias, Ath Douala, Ouacif au sud ou alors de Ouaguenoun à Tigzirt, en passant par Boudjima, Imaloussen et Fréha au nord, avec les grappes de villages d’Azeffoun ou de Larbaâ Nath Irathen, Azazga et Iferhounène, Mekla et Souamaa, des centaines de villages sont dans la dépravation. En examinant de près la situation, le constat ne prête pas à l’optimisme. Les habitants vivent pour la plupart dans le dénuement et la précarité. Dans ces contrées de la Kabylie profonde, la vie villageoise est réduite au minimum et à sa plus simple expression. Par ici, il est rare de trouver une maison des jeunes, une salle de cinéma, une aire de jeux ou un quelconque espace qui permettra aux dizaines de milliers de jeunes de passer leur temps creux à bon escient. Dans la plupart des villages, l’État n’est représenté que par la présence d’une école primaire. À travers des centaines de villages, même le réseau d’assainissement n’est pas encore généralisé. Les habitants ont toujours recours au fausses septiques et aux rejets à ciel ouvert. C’est dire toute la gravité de la situation. Le secteur de l’environnement est en souffrance car la collecte des ordures ménagères n’est pas quotidienne et parfois elle ne se fait même pas. Le foisonnement des décharges sauvages et l’inexistence des décharges contrôlées ou de centre d’enfouissement technique accentuent la dégradation de l’écosystème. Les stations d’épuration (Step) inscrites à l’indicatif de la wilaya pour surtout préserver le barrage de Taksebt, bien que dégelées mais le lancement des travaux est encore reporté. Les 1 500 villages déversent leurs eaux usées dans les ravins et les oueds, le danger est imminent. Il peut être à l’origine d’une pollution généralisée et de la disparition de plusieurs espèces d’oiseaux et d’animaux, comme c’est le cas pour le chardonneret. Cela sans parler des risques sur la flore et la santé publique. Il est urgent de lancer le projet des stations d’épuration et d’en inscrire d’autres pour préserver l’environnement au niveau de toute la wilaya. Les décharges sauvages foisonnent. Les CET, les décharges contrôlées et les entreprises de récupération et de transformation se comptent malheureusement sur le bout des doigts. Une situation qui doit alerter les pouvoirs publics qui sont dans l’obligation de faire le nécessaire pour venir au secours de la nature qui crie à présent à gorge déployée mais y a-t-il quelqu’un pour l’écouter et prendre les mesures efficientes ?

Les voies de communication communiquent mal !

Le réseau routier de la wilaya de Tizi-Ouzou est assez important. Il dépasse les 4 000 kilomètres entre routes nationales, chemins de wilaya et chemins communaux, cela sans parler des chemins vicinaux et des pistes. Lorsque l’on voit l’état de la route nationale N°30, reliant le chef de wilaya aux daïra des Ouadhias, Boghni, Draâ El-Mizan, on comprend vite que les chemins de wilaya et ceux communaux sont sûrement plus dégradés. En effet, cette RN30, notamment sur le tronçon Oued Aïssi vers Takhoukht, est détérioré. Son étroitesse, les crevasses, les trous et les nids-de-poule en plus des risques de glissement des talus sur la chaussée sont autant d’éléments qui contraignent les automobilistes à prendre d’autres chemins même au prix de faire un long détour. Le CW147, reliant le chef-lieu de wilaya à Maâtkas et Mechtras, est lui aussi dans un état, il faut le dire, chaotique. Alors concernant les chemins communaux, tous les qualifiants ne sont pas assez explicites pour les décrire. Dans quasiment tous les villages de la wilaya, l’eau potable est rationnée hiver comme été. Au nord de la wilaya, au sud et à l’est, des milliers de villages souffrent le martyre en termes de distribution de la denrée rare et précieuse. À Maâtkas à titre d’exemple, la rareté de l’eau dans les villages est toujours d’actualité. À Azeffoun, Tigzirt et dans les villages appartenant à ces daïras, l’eau potable est toujours aussi rare. À Illilten, le conflit sur l’eau entre les villages n’est toujours pas solutionné. Le citoyen n’a d’autre solution pour boire que d’acheter des citernes à des prix dépassant parfois tout entendement. L’eau en H24 et au quotidien est un luxe qui n’existe que dans certains chefs-lieux et certains villages. Le réseau de l’électricité bien qu’ayant atteint des couvertures très appréciables mais il n’en demeure pas moins que les coupures du courant sont légion, notamment pendant l’été et l’hiver lorsque la consommation atteint des pics. Cela sans parler de nombreux quartiers et hameaux non encore raccordés et les nouvelles habitations qui attendent d’en bénéficier. Le gel de nombreuses opérations de branchement complique la vie à des milliers d’habitants. Concernant la fibre optique, elle commence juste à arriver dans les chefs-lieux de communes, quand aux villages, il faut encore attendre des années, voire plus. L’Internet et le haut débit n’est pas encore généralisé. D’ailleurs, le taux de couverture est toujours insuffisant et loin derrière le taux national.

Chômage, fléaux sociaux…

Le chômage et les fléaux étrangers à la région il y a quelques années, comme le terrorisme, les kidnappings, les vols, la consommation d’alcool et de stupéfiants, s’ajoutent pour rendre plus dure la vie villageoise. Les actes de terrorisme se sont multipliés lors de la décennie incendiaire. Que de pertes d’hommes et de biens ont été déplorées. Les kidnappings se sont aussi invités pour corser l’addition. Les vols, les actes de banditismes ne sont pas restés en marge. Les drogues et la consommation d’alcool ont trouvé un terrain favorable pour mettre un terme à la quiétude des citoyens. Pour corser davantage la facture, le chômage s’est invité en star. Des milliers d’hommes et de femmes en âge de travailler se contentent de trainer dans les rues étroites et sales de leurs villages, quartiers et villes. Les petites entreprises et fabriques qui employaient des centaines de pères de familles ont été fermées, les exemples ne manquent pas. Pourtant, ces villages ont été le théâtre où s’est déroulée la guerre de libération nationale. Des milliers d’hommes et de femmes ont sacrifié ce qu’ils avaient de plus cher, leur vie, pour que vivent l’Algérie libre et indépendante. Aujourd’hui, 56 ans après l’indépendance du pays, l’état des lieux ne s’est pas amélioré du moins au rythme souhaité. Les habitants de la wilaya de Tizi-Ouzou attendent encore des jours meilleurs. Du boulot, un logement et des infrastructures de base pour vivre heureux dans leur pays, au lieu d’opter pour d’autres cieux où ils deviennent, quand ils y arrivent car nombreux perdent leur vie en mer ou en forêt, des esclaves sous payés et loin de leur patrie.

Hocine T.

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