La tradition et l’innovation farfelue

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Par S. Ait Hamouda

Le patrimoine matériel et immatériel de Kabylie a encore beaucoup de marches à grimper pour s’imposer. Il doit nécessairement trouver les astuces qui le mèneraient au firmament de son espérance. Devoir s’adapter aux règles de l’art pour le pérenniser dans le temps et l’espace, tel que conçu par les anciens, adopter la tradition, doit se faire tel qu’inscrit dans la mémoire collective et pratiqué selon les méthodes des ancêtres avec des donnes nouvelles, mais qui respectent les vieilles pratiques. Les salons et foires consacrés à l’artisanat doivent, en dépit de tout, être au diapason de ce qui se fait dans le terroir. Hors de ce dernier, il n’est pas possible de parler de ces métiers sans risquer de se voir houspiller par tout le monde. À l’exemple du couscous coloré d’un pseudo artisan qui avait exposé sa trouvaille à la maison de la culture fièrement, disant qu’il pourra égailler les cérémonies familiales. Le colorant n’est d’abord pas naturel et de surcroit, peut-on manger un couscous multicolore sans élément acquis et reconnu ? Impossible. Il y va de notre tradition, d’un legs, d’un héritage des ancêtres. Le couscous est maghrébin, chaque pays a son couscous, mais de là à y mettre de la couleur, c’est un peu corrompre le produit qui ne ressemblera plus à rien. Comme pour la robe kabyle qui a tendance à se perdre dans la sphère de la modernité au point où elle ne ressemble plus à «taqendourt» ancestrale. C’est ce qu’on appelle enjoliver pour rendre moins présentable et plus décousue en termes de tradition locale. Il se peut qu’on bricole, n’importe quoi pour en faire à tout hasard un produit qui n’est pas traditionnel, qui n’a rien à voir avec la coutume, ni la tradition, ni l’habit de nos grand-mères. Ceci nous ramène aux considérations snob et le m’as-tu-vu dépareillé. La mémoire ne peut s’encombrer de considérations impavides, surtout lorsqu’on s’amuse avec l’artisanat. Cela revient à rechigner sur ce qu’est la sacralité de la chose et se moquer de sa pureté.

S. A. H.

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