«Les entreprises publiques sont condamnées à aller vers des partenariats»

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Le directeur du secteur de l’industrie et de l’investissement de Tizi-Ouzou, M Hamitouche Moula, évoque, à travers cet entretien, la situation difficile des entreprises publiques et d’autres sujets relatifs au secteur dans la wilaya.

La dépêche de Kabylie : Peut-on avoir un aperçu du tissu industriel dans la wilaya ?

Hamitouche Moula : Ce qu’il faut retenir c’est qu’au niveau de la wilaya de Tizi-Ouzou, nous avons pratiquement 16 000 PME. En gros, des petites entreprises qui emploient de un à deux employés. en comptabilisant ces dernières, on atteint un peu plus de 28 000 entreprises qui activent au niveau de la wilaya.

Ce nombre important d’entreprises a généré quelque 100 000 postes d’emploi. Notre souci actuellement, par apport à ces entreprises, est qu’il faut les préserver. Il est plus facile de créer une entreprise que de la préserver. Notre département ministériel et la wilaya iront dans ce sens en accompagnant et en restant à l’écoute de ces entreprises pour voir les difficultés rencontrées sur le terrain. La finalité est la pérennité de ces entreprises. Il faut coûte que coûte arriver à la sauvegarde de ces entreprises et de ces emplois. Dans ce sens, il ya une démarche, une pédagogie envers les entreprises.

Ces dernières doivent être conscientes qu’elles doivent faire un plan de mise à niveau. L’entreprise doit être consciente concernant certains domaines essentiels qui sont notamment : la ressource humaine qui est le moteur générateur de richesse pour l’entreprise. Et puis améliorer les moyens de production et les adopter aux standards internationaux. Cela va conduire l’entreprise à avoir un produit de qualité, compétitif.

C’est à ces conditions qu’elle réussira à avoir une place sur le marché local et pourquoi pas, pour certaines entreprises de taille importante et performante, accéder à une part du marché extérieur, notamment Africain. Le secteur privé est très important dans la wilaya de Tizi-Ouzou, on a dit que les entreprises au niveau de la wilaya créent quelques 100 000 emplois, le public dans ce chiffre ne dépasse pas les 15%.

Pourriez-vous faire un état des lieux de l’industrie localement ?

On a parlé d’un nombre de 16 000PME, cela reste insuffisant pour booster le développement local, on aimerait créer plus d’entreprises parce que l’économie locale, pas seulement dans la wilaya mais en Algérie et dans tous les pays, repose sur les PME. On ne table sur la grande industrie, car c’est la petite industrie qui crée l’emploi, mais cela n’exclut pas non plus les projets d’envergure qui sont générateurs d’un nombre important d’emplois et d’une prévalue et des richesses pour les collectivités locales en matière de rente fiscale.

Les entreprises qui activent sur le terrain ne sont pas laissées à l’abandon, il y a un travail et un plan d’action. Le service de la PME, dont le rôle justement est d’aller vers ces entreprises et les écouter. Il ya un plan d’action en matière de production. Il faut qu’on sache ce que nous produisons, sa qualité et sa place sur le marché. Est ce qu’on couvre en totalité les besoins du marché local ? Est ce qu’on satisfait les besoins du marché local ? Répond-on aux besoins du marché limitrophe ? Pour qui aspire à l’exportation.

C’est donc un travail continu qui se fait sur le terrain. On les incite à aller vers une meilleure qualité de la ressource humaine, pour une qualité en matière de produit, et cela passe forcément par l’innovation. On essaye d’expliquer aux entreprises qu’elles sont dans l’obligation d’innover, sinon, on est condamné à disparaitre. Nous en tant qu’administration, on les incite à aller vers des partenariats avec la formation professionnelle ou l’université. Il y a des diplômés et des spécialistes porteurs de projets et d’idées innovantes qui peuvent convenir à ces entreprises.

Les entreprises publiques de la wilaya sont, majoritairement, en difficulté, endettées et déficitaires. Quelle est la solution, selon vous, pour qu’elles redressent la barre ?

Les entreprises publiques existantes actuellement dans la wilaya sont l’ENIEM, l’ENEL Azazga, EATITE ex COTITEX, Taboukert meuble. Ces entreprises ont déjà un plan de développement. Prenons l’exemple de l’ENEL, cette dernière n’est pas déficitaire. Ils ont un projet de développement ambitieux. Ils ont signé récemment un partenariat avec l’entreprise Indo.

Le produit qui va être réalisé dans cette entreprise va palier aux importations. Les transformateurs de grandes capacités qui seront produits dans cette entreprise, on les importe. L’ENIEM a des problèmes, cela va pousser impérativement les responsables de cette entreprise, d’ailleurs conscient de ça, à un partenariat (gagnant, gagnant) avec une entreprise de taille internationale. Ils sont en pourparler actuellement. On aura à gagner notamment sur le plan de transfert de technologie.

Le produit sera compétitif, avec un cout de revient moindre si on le compare à nos voisins ou aux pays européens. Il ne faut pas oublier que l’Algérie accorde aux entreprises des avantages qu’on ne peut pas trouver ailleurs. Notamment la main d‘œuvre qui n’est pas excessivement chère, l’énergie à des prix très abordables. Cela rentre dans le prix de revient d’un produit, et on ira vers le marché avec des prix compétitifs et une bonne qualité.

Taboukert meuble, oui l’entreprise est en difficulté, c’est pour ça qu’elle doit se réveiller. La solution est de s’organiser. Il faut maitriser les effectifs, parce qu’une entreprise qui a la capacité d’employer 200 personnes ne doit pas se retrouver avec 600 par exemple. On ne peut pas charger les entreprises de plus qu’elles en peuvent supporter. Evidemment ce n’est pas pour aller vers le chômage et le licenciement des employés que je dis ça.

Il va falloir former le personnel dans des métiers qui peuvent être rentables que ce soit une formation interne ou externe. C’est pour dire que la formation est importante. Même si on a un sureffectif, le surnombre, on doit le doter d’une formation qui va servir de prévalue pour l’entreprise. Sur cette question, il faut bien réfléchir, il ne faut pas aller au négatif, au licenciement, pour n’avoir que le nombre d’employés qu’il faut.

Le plus, peut être une force quel que soit le nombre, ce sont des gens qui ont de l’expérience et un savoir faire. Il faut savoir les mettre à bon escient, et c’est aux responsables de l’entreprise de les gérer. Il faut dire que les entreprises publiques n’ont pas d’autres choix que d’aller vers le partenariat. L’EATITE, à savoir l’ex COTITEX travaille avec l’armée donc le problème ne se pose pas.

Comment évaluez-vous la production industrielle dans la wilaya ?

En matière de production, on ne doit pas raisonner en termes de demande de notre wilaya, l’industrie doit rayonner à l’échelle nationale et pourquoi ne pas s’affirmer sur l’échelle continentale. Par apport à ça, il ya des projets réalisés en un temps record. Je prends l’exemple de la zone industrielle d’Oued Aissi, Mahindra est un partenariat avec les indiens. Leur projet est ambitieux et vise le marché extérieur. Cette entreprise sera aussi dotée d’une école de formation. Cela dit, dans la wilaya, on a une production diversifié, de l’électroménager, de la mécanique, de la plasturgie, de l’agroalimentaire, des services.

Il y a plusieurs projets privés dont les promoteurs attendent la finalisation des démarches…

Oui effectivement, il ya plusieurs projets importants. On a par exemple OXO de Cevital, un projet très important qui va engendrer 2500 postes d’emploi direct, au niveau de la localité de Souama. On a le projet d’Ardis, 1000 postes d’emploi direct. Techno vert, entre 300 et 500 postes d’emploi, la faillancerie Izerkhef au niveau d’Azazga, minimum 300 postes d’emploi. Ces projets sont importants, avec des prévalues pour les collectivités locales. Ces projets vont se réaliser dans les meilleurs délais, ils ont eu les terrains, certains ont eu les permis, d’autres ont pratiquement terminé les démarches. Ces projets sont une réalité qui vont ramener un plus à la wilaya en terme d’emploi et en terme de création de richesse.

Si on parlait des zones d’activités dans la wilaya ?

La zone d’Oued Aïssi est saturée, on va plutôt parler de nouvelles zones. La wilaya a bénéficié de trois zones. Une au niveau de la commune de Souama d’une consistance de 327 ha, elle va générer jusqu’à 50 000 postes d’emploi. On au niveau de Tizi Gheniff et Draâ El-Mizan, deux petites zones, une de 2 ha et l’autre de 24 ha. L’expropriation est en cours. Ces deux zones ont bénéficié d’une AP de 150 millions de centimes. Pour la zone de Souama, il y a un problème d’opposition, mais le dialogue n’est pas rompu, on œuvre à ne pas perdre ce grand projet. Il y a aussi des nouvelles zones , une à Fréha, une autre à Timizart (Abizar) et une autre aussi à Azazga. La viabilisation de ces zones va bientôt commencer.

Les anciennes zones d’activités de la wilaya sont en mauvais état….

Oui, elles sont dans un mauvais état mais ce n’est pas pour autant que la wilaya reste les bras croisés. Il y a tout un dossier, ficelé et transmis à qui de droit pour la mise à niveau en matière de viabilisation. Une fiche technique a été établie pour chaque zone (12 zones gérées par la SOGIE et 4 par l’agence foncière). Il ya un montant de 200 millions de centimes attribué pour rendre les zones praticables.

Qu’en est-t-il des lots de terrain attribués et qui restent inexploités ?

Avant, on attribuait les terrains par cession, les gens ont leur acte de propriété. Actuellement on travaille avec des concessions. Certains investisseurs disent que les raisons de la non exploitation, est la non viabilisation des zones. Il faut savoir que les plus déterminés ont pu réaliser leurs projets malgré cela. Dans les jours qui viennent, il y aura une rencontre avec les investisseurs à travers les zones pour les informer que s’ils sont prêts à réaliser leurs investissements on est prêt à les accompagner et leur faciliter les choses. Sinon, on leur demandera de restituer les terrains. Sinon, c’est la voie judicaire. On a déjà récupérer 57 lots à travers les différentes zones.

Entretien réalisé par Kamela Haddoum.

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