L’oued El Djemaâ, la plage des démunis

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Résidant loin de la côte et démunis d’infrastructures de détente, les jeunes villageois des régions montagneuses se débrouillent avec les moyens du bord. Si les déplacements jusqu’à Tigzirt ou Azzeffoun, leurs plages préférées, sont chers, l’oued El Djemaa est tout indiqué pour quelques plongeons dans l’eau fraiche. Le chemin menant vers le bas de la vallée est continuellement fréquenté par des jeunes ou moins jeunes, qui s’y rendent par groupes de trois ou quatre. Le bras levé ils implorent les automobilistes pour les prendre en autostop, l’oued étant distant de dix kilomètres. Les trois amis que nous avons abordés, nous apprennent qu’ils viennent d’Ait Ailem, un village de la commune d’Aïn El Hammam, à deux kilomètres seulement de cette plage de fortune. «Parfois ça marche, parfois non. Alors, on continue notre chemin, à pied jusqu’à la rivière», nous dit un jeune collégien de quinze ans. D’autres viennent de plus loin, mais semblent prendre du plaisir à parcourir les dix kilomètres séparant Michelet de l’Oued El Djemaa. Leurs sacs à provisions en bandoulière, ils se dirigent vers le bas de la vallée au lieu-dit «Ellouzine» (usine), d’où ils ne reviendront qu’au coucher du soleil. L’usine est le nom donné par les habitants à la station hydro-électrique qui laisse s’échapper l’eau qui, après avoir fait tourner les turbines, est récupérée en aval, dans un bassin bordé de grosses pierres, servant de piscine naturelle d’une quinzaine de mètres sur dix environ. Tous les jeunes de la région connaissent «thamdha ellouzine». Dès que les températures montent, c’est la ruée des baigneurs qui descendent des communes de Michelet, d’Akbil ou d’Iboudraren. Malgré la foule qui s’agglutine sur les berges de l’oued, la convivialité est de mise. Tous peuvent exécuter quelques brasses et un plongeon dans l’eau, parfois glacée. À tour de rôle, on se jette dans le bassin pour se mouiller, nager quelques mètres, avant de revenir sur l’herbe. Thamdha continuera de voir défiler, chaque jour, des centaines de jeunes de la région jusqu’à l’arrivée du froid. Et si en attendant l’inscription d’une piscine pour la région, les responsables des communes limitrophes de l’Oued El Djemaa unissaient leurs engins pour créer un grand bassin ? L’espace existe, l’eau aussi.

A.O.T.

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