D'éminents hommes de loi se prononcent

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«Notre pays respecte scrupuleusement le moratoire qu'il a décrété en 1993 sur la peine de mort». C'est ce qu'a déclaré le représentant du ministère de la Justice et garde des sceaux, à l’ouverture du séminaire international de deux jours consacré à cette question, avant hier, au niveau de la cour de Boumerdès.

«Des inculpés d’atteinte à la sûreté de l’Etat, de terrorisme, de kidnappings de personnes, notamment d’enfants, suivis d’assassinats, ont été, depuis cette date, condamnés à la peine capitale, mais celle-ci n’a jamais été appliquée», ajoutera-t-il, face à d’éminents hommes de loi nationaux et internationaux. Intervenant au premier jour de cette rencontre, le président sortant de l’UIA, Jacques Uettwiller, tiendra à rappeler que la question de l’abolition de la peine de mort a été tranchée, en Europe, il y a plus de 150 ans, suite aux travaux des sociologues ayant prouvé l’inefficacité de ce châtiment. «Une peine qui ne servira qu’à assouvir le prix du sang», a-t-il noté, en faisant référence à la fameuse loi du talion. Et le problème c’est que cette loi, liée au sacré, notamment en terre d’Islam, est restée gravée dans les têtes. D’ailleurs, «une bonne partie des Tunisiens pensent à rétablir la peine capitale, alors que leur pays était pratiquement le seul au monde arabe à l’avoir abolie dans les faits», a-t-il relevé. Au président de l’union des barreaux d’Alger, Ahmed Sai, ayant observé la tendance de la majorité du peuple pour la peine capitale, le même intervenant répondra en précisant : «Il appartient aux avocats de défendre le principe de l’abolition de la peine de mort». Prenant la parole, le représentant des droits de l’homme à l’OIF, Salvator Saques, donnera, lui, des chiffres précis : Pas moins de 141 pays ont aboli la peine de mort, depuis la seconde moitié du 19ème siècle, alors que jusqu’à la date d’aujourd’hui, 57 pays continuent à l’appliquer. En 2016, le nombre d’exécutions fut de l’ordre de 1 032, soit 30% de moins par rapport à 2015. Pour de nombreux hommes de loi algériens, entre autres maitres Bouchachi et Miloud Brahimi, le problème se pose avec une gravité particulière chez nous. Ils ont notamment relevé, au cours de la campagne pour les législatives prochaines, l’appel des partis islamistes, notamment, à la reprise effective de la peine de mort, rappelant que «en Algérie les recommandations des experts concernés, depuis l’indépendance, pour l’abolition de la peine capitale sont restées lettre morte». Abordant, lors du débat, le drame national des kidnappings d’enfants suivis d’assassinats, de nombreux participants ont émis la crainte que la population réclame ce châtiment sous l’effet de la colère et de l’indignation. «C’est toujours la responsabilité des avocats qui est engagée pour empêcher que l’Etat ne cède à la pression populaire dans une telle circonstance», expliquera encore le président sortant de l’UIA. Il suffit seulement d’être convaincu que la peine capitale est non dissuasive, inhumaine et injuste, d’autant plus que l’accusé est condamné à souffrir de l’attente du châtiment qui est fortement angoissante, enfonçant l’être humain dans la démence, a-t-on encore plaidé.

Salim Haddou.

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