L’environnement infesté de décharges et dépotoirs sauvages

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La multiplication des décharges sauvages offre un spectacle hideux des villes et villages de la wilaya de Béjaïa, livrés à l’anarchie ces dernières années.

«Les autorités de la wilaya de Béjaïa viennent, une nouvelle fois, de lancer une campagne de nettoyage de la ville dans le but d’éradiquer les dépotoirs sauvages. Cette initiative, aussi louable soit-elle, ne peut constituer à elle seule la panacée, pour redorer le blason légendaire de propreté de Béjaïa. La problématique de la gestion des déchets et de l’hygiène ne peut se traiter à coups de campagnes hebdomadaires de volontariat», a notamment souligné, dans une contribution, Allaoua Mouhoubi, enseignant à l’université de Béjaïa. Cette «sentence» reste d’actualité, tant que la gestion des déchets ménagers se pose avec acuité dans la wilaya. En effet, avec le tas d’ordures qui s’entassent ici et là plusieurs villes donnent, encore aujourd’hui, une image de désolation. Même le centre d’enfouissement technique de Béjaïa n’en finit pas de faire des vagues, suscitant la colère des citoyens d’Oued Ghir qui ont procédé plusieurs fois à la fermeture de la RN12, en raison d’impacts écologiques qui auraient particulièrement touché le village périphérique de Hellil. La décision de sa mise en service en septembre 2015, retardée pour inexistence de voirie d’accès, pose des questions sur les conditions d’application du protocole règlementaire, prévu par les dispositions de la loi 03-10 du 19 juillet 2003 et du décret exécutif 06-198 de 31 mai 2006, pour la délivrance de l’autorisation d’exploitation d’une installation classée comme le CET, qui prévoient des mesures et des investigations préalables pour la protection et la sauvegarde de l’environnement. À noter que ce CET (en gestation) s’étend sur une superficie de 29 hectares et il aura une capacité de 220 000 m3. Son coût global est estimé à quelque 25 milliards de centimes. Après son achèvement, le CET sera géré par une Epic qui a déjà été créée. Et lorsqu’il sera officiellement en exploitation, la décharge publique de Boulimat sera enfin supprimée. Du côté de la commune de Tinebdar, élue cette année ville la plus propre de la wilaya, son P/APC, fraîchement élu à l’APN, soulignera à propos du projet de l’implantation du CET dans sa localité : «Ce projet me tiens à cœur, mais il y a un manque de volonté de la part de l’administration. Les conditions sont pourtant réunies depuis 2008». Les rejets des zones industrielles déversés dans l’oued Soummam a contraint ce dernier à devenir également un véritable dépotoir à ciel ouvert. C’est dire que la problématique de la gestion de l’environnement est toujours d’actualité à Béjaïa. Côté investissement privé, seul un centre de déchetterie et de recyclage (aux normes européennes) est en train de voir le jour à Tazmalt. Son initiateur est en train de lever toutes les contraintes sur son site, apprend-on. Par ailleurs, pour ne citer que Béjaïa-ville, Boulimat, Tala Hamza, Sidi Aïch, El-Kseur, Timezrit ou encore du côté de Souk El-Tennine, Aokas, Akbou, Amalou, Boudjellil et Tazmalt, c’est le même constat. Les décharges sauvages et autres dépotoirs pullulent le long des routes de ces régions de la vallée de la Soummam et du Sahel, donnant encore une image de désolation. À signaler, aussi, que Béjaïa est parmi les rares wilayas du pays ne disposant pas encore d’un centre d’enfouissement technique (CET). Par ailleurs, la commission ARDH pour l’éducation environnementale intensifie ses cycles de formation et organise des ateliers au profit d’associations et de maisons de jeunes à travers le territoire national. Elle a même eu un face à face avec le ministre de l’Environnement, dénoncé «des crimes contre le littoral» et relevé «l’urgence d’intervenir en vue de stopper les massacres écologiques», et ce en collaboration avec des associations et la société civile. «Béjaïa n’est pas le cobaye économique des opportunistes sans scrupules», dénonce-t-on. Pour l’association culturelle et écotouristique Les Aiguades «la société civile, les investisseurs, les universitaires et les autorités locales insistent, à l’unanimité, sur l’urgence de remédier à la situation catastrophique de l’écologie et de l’environnement que traverse la wilaya de Béjaïa, et de passer à l’action dans l’immédiat». Cela dit, aussi bien au chef-lieu de wilaya que dans la presque majorité des communes que compte Béjaïa, l’on se débrouille comme on peut, pour gérer temporairement ses ordures ménagères et autres. “C’est terrible comme nos villes sont sales. Il faut impérativement promouvoir, sans cesse, des actions d’information et de sensibilisation à d’environnement. Les responsables, à tous les niveaux, doivent réagir. La prolifération des décharges publiques anarchiques, à défaut d’une sérieuse prise en charge de ce problème épineux, risque d’engendrer des conséquences néfastes sur la santé publique”, avertit M. Rezak, médecin de son état. À noter que la wilaya de Béjaïa subit aujourd’hui des pollutions multisectorielles, suite à une croissance industrielle accélérée et une urbanisation rapide incontrôlée, estiment des spécialistes. Ce processus de développement n’a, semble-t-il, jamais pris en considération de manière sérieuse les problèmes de traitement et d’élimination des divers déchets, générés par les activités urbaines et industrielles, ainsi que le traitement des eaux usées.

T Mustapha.

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