Draâ El-Mizan au rendez-vous

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Une cérémonie de recueillement a été organisée, avant-hier au niveau de la stèle implantée sur la RN25, non loin du village Maâmar, pour rendre hommage aux martyrs Ali Bennour et Oukil Ramdane, exécutés froidement par l’armée coloniale le 21 octobre 1959.

à rappeler que le crime a été commis plus exactement au lieu-dit «Alghar Barouyène» (terrier des porcs-épics). Pour ce cinquante-sixième anniversaire de l’exécution de ces deux figures de la révolution nationale, de nombreuses personnes, venues d’un peu partout, ont fait le déplacement à Draâ El-Mizan. En effet, outre les proches des deux martyrs, des anciens maquisards, des représentants des enfants de chouhada, et les derniers survivants ayant été aux côtés des deux martyrs pendant leurs dernières heures, comme M. M. Rabah Touil (Tizi-Ouzou), Lewahab Mohamed (Bouira) et Merbah Akli (Tadmaït), étaient présents à cette cérémonie. Après le dépôt d’une gerbe de fleurs, une minute de silence a été observée à la mémoire de tous les martyrs de la révolution, avant qu’un iman ne récite la «Fatiha». M. Hocine Bennour, fils unique du commandant Ali Bennour, a, dans une brève intervention, tenu à remercier toute l’assistance qui a tenu à honorer, en cette journée, la mémoire de tous les martyrs tombés au champ d’honneur pour libérer l’Algérie du joug colonial. Prenant parole, le moudjahid M. Ouali Aït Ahmed et président de l’association Thagraoula a tenu à rappeler tout le long parcours du martyr commandant Ali Bennour, dit «Si Ali Moh N’Ali», qui avait gravi tous les échelons de la hiérarchie de l’ALN, avant d’être nommé membre du conseil de la wilaya III par le colonel Amirouche. C’était un 4 mars 1959, lors de sa dernière réunion tenue avant son départ vers la Tunisie, en compagnie du colonel Si El Houès et tous les officiers de la willaya III. «Le commandant Ali Bennour est né au mois de mai 1927 au village Ighil Yahia Ouali, douar des Béni Chenacha, commune de Tadmaït. Comme tous les Algériens, il devait faire face à la dure vie que menait sa famille, dont la misère était le lot quotidien, alors que leur survie ne tenait qu’aux maigres ressources de leurs petites parcelles de terre. Aussi, dès son jeune âge, le chahid Si Ali Moh N’Ali, ayant pris conscience que pour se libérer du joug colonial, la lutte armée demeure l’unique voie, il a commencé à militer bien avant le déclenchement de la révolution au sein de partis, comme l’Etoile africaine, puis le PPA/MTLD. Au demeurant, au déclenchement de la révolution, le jour «J», dans la nuit du 1er novembre 1954, il participera aux opérations de sabotage ayant visé la localité de Tadmaït, en incendiant les unités Tabacop et de bois et de liège, et en coupant des poteaux électriques et des lignes téléphoniques», témoigna M. Ouali Aït Ahmed. Ce dernier poursuivra son récit, en rappelant qu’après le congrès de la Soummam, tenu le 20 août 1956 à Ifri, Ali Bennour était adjoint militaire du capitaine Ousmail Kaci, dit «Kaci Iheddadène», chef de la zone IV, alors qu’en 1958, lorsque le nouveau chef de ladite zone, en l’occurrence Ahcène Mahiouz, est chargé d’une mission dans la wilaya IV, c’est au capitaine Si Ali Moh N’Ali qu’est revenu la charge d’en prendre le commandement jusqu’au 4 mars 1959, où il fut désigné membre du conseil de wilaya, aux côtés de Si Ahcène Mahiouz et Si H’Mimi. À partir de cette date, il n’aura de cesse de sillonner toute la wilaya III jusqu’à sa mort. Après la longue intervention de M. Ouali Aït Ahmed, d’autres compagnons d’armes, qui avaient servi sous les ordres du martyr commandant Ali Bennour, ont tenu à apporter leurs témoignages respectifs, en rappelant aussi bien les grandes qualités humaines que les compétences militaires de celui qui était leur chef. Par ailleurs, les témoignages poignants sont ceux des derniers survivants de cette tragédie, à savoir ceux qui avaient assisté aux derniers moments d’Ali Bennour et Oukil Ramdane. «C’était lors de la visite d’inspection effectuée par le commandant Ali Bennour à notre abri-hopital, installé au lieu-dit ‘’Dahmoune’’, à l’intérieur du maquis, juste à quelques dizaines de mètres au-dessus de l’actuel chef-lieu de commune d’Aït Yahia Moussa, que nous fûmes surpris, au matin du 19 octobre 1959, par l’armée coloniale ,venue de Draâ El-Mizan», raconte Rabah Touil, qui était blessé à cette époque-là. Ce dernier ajouta que lorsque les soldats avaient commencé à tirer et à lancer des gaz, le commandant Ali Moh N’Ali et Oukil Ramdane, seuls à être alors valides, avaient riposté. Et n’est qu’après qu’ils furent blessés et que le commandant Ali Bennour eut perdu connaissance que l’abri-hôpital fut pris d’assaut. «Aussi, tous les blessés ont été emmenés à l’infirmerie de la caserne de Draâ El-Mizan, alors que le commandant Ali Bennour a été emmené, cagoulé, dans une jeep. Il sera isolé à la caserne et lorsqu’on le reverra le 23 ou le 24 octobre, il avait des pansements à la tête et aux bras», raconte Si Rabah Touil, alors que Si Lewahab Mohamed, tout en gardant du commandant Ali Bennour ce souvenir d’un officier et d’un chef très digne qui n’a rien d’une personne abattue, renchérit: «Lorsque le commandant Ali Bennour nous avait été emmené à l’infirmerie par l’un des officiers français, en compagnie d’une jeune femme, faite prisonnière plus de deux mois auparavant, car chargée de notre abri, l’officier en question lui avait dit, en désignant la jeune femme, qu’il s’était vraiment occupé de l’éducation et de la formation de ses hommes. La preuve est que malgré les tortures infligées à la jeune femme depuis deux mois, elle n’a rien révélé de l’organisation du maquis. Ce à quoi le commandant Ali Bennour lui répondit qu’il avait formé des hommes et des femmes et qu’il continuerait à le faire s’il aurait une longue vie». Lewahab Mohamed a répété la même chose lorsqu’on est venu lui annoncer l’exécution d’Ali Bennour et Oukil Ramdane. «Si Lewahab avait dit à ceux qui sont entrés dans l’infirmerie que le commandant Ali Bennour a laissé derrière lui des milliers d’Ali Bennour et même si ceux-ci mourraient, d’autres Ali Bennour prendraient la relève jusqu’à l’indépendance nationale», témoignera encore M. Rabah Touil. Par ailleurs, les anciens moudjahidines présents ont tenu également à rendre hommage à leurs camarades disparus dernièrement, à savoir Si Ahcène Hadj Saâdi, originaire d’Aïn El-Hammam, Abderahmane Aït Ouarab et Ali Iadadène.

Essaïd Mouas

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