Il y a 49 ans tombait au champ d’honneur le chahid colonel Ali Mellah dit “Si Chérif”

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Il y a quarante neuf années, le 31 mars 1957, dans la région de Ksar El Boukhari, tombait au champ d’honneur, le colonel Ali Mellah dit “Si Chérif”, alors chef de la wilaya VI. Désigné comme membre suppléant du conseil de la révolution algérienne lors du congrès de la Soumam le 20 août 1956, il avait été aussi nommé comme responsable de la wilaya VI qui venait d’être créée. Né le 14 février 1924 au douar M’kira, relevant de la commune mixte de Draâ El Mizan à cette époque et plus précisément au hameau familial dit Tamclaht. Ce hameau de nulle part est resté enclavé jusqu’en 1987, il n’y a que des chemins muletiers pour y accéder. Au demeurant, à contrario des autres villages kablyes où il faut prendre des chemins qui montent pour atteindre Tamelaht, il faut prendre des chemins qui descendent jusqu’à l’oued qui est à proximité. Ainsi, du haut des villages de Taka, Talazizt, Tafoughalt ou d’Imlikeche, le plus près, Tamclaht apparaît avec ses maisons éparses. Il est facile d’imaginer la dure existence en ce milieu, en ces années, mais qu’importe pourvu qu’on soit loin de l’oppresseur qui avait confisqué toutes les bonnes terres de la vallée sud d’où serait partie la population de M’kira, fuyant les exactions des généraux français. Malgré toute la misère qui l’entourait, l’enfant Ali Mellah était épargné d’autant plus que son père était imam et enseignait le coran. D’ailleurs, il sera lui-même imam et enseignant bien plus tard dans certaines régions où il a fuit pour échapper aux recherches de la gendarmerie et de la police française. Ainsi, son père l’envoya dans différentes écoles coraniques et dans certaines zaouïas de la Kabylie pour approfondir ses connaissances commencées en compagnie de son père qui n’avait pas inscrit son fils à l’école coloniale implantée à Tighilt-Oukerrouch, qui n’était pas très éloignée. Néanmoins, c’est à l’âge de vingt et un an, après les massacres du 8 mai qu’il adhéra au parti du peuple algérien (PPA), comme la presque quasi-totalité de la Kabylie acquise à Messali El Hadj et devient vite l’un des principaux responsables politiques de cette formation. Son militantisme pour l’indépendance nationale s’aiguise de plus en plus, ce qui attira l’attention de l’administration coloniale sur lui, d’autant plus que ses nouveaux compagnons ne sont autres que Krim Belkacem et Amar Ouamrane surtout à partir du moment où il prit part activement à la campagne électorale en faveur du mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques dont le scrutin s’était déroulé à l’école de Tighilt-Oukerrouch. “Krim Belkacem, Ouamrane, Gallouze et Ali Mellah, tous armés, étaient restés en face du bureau de vote, à la lisière du maquis” se souvient ce citoyen. Recherché par la gendarmerie et la police françaises, il circule sous un faux nom, en l’occurrence Lebdiri Mohamed, famille maternelle, mais il fut découvert peu de temps après. Au demeurant, personne ne connaît l’importance qu’avait pris Ali Mellah au sein du mouvement nationaliste, mais selon des témoignages concordants, peu après le congrès de l’OS tenu les 17, 18 et 19 février 1947 qui eut lieu à Belcourt (Alger), son impatience pour le déclenchement de la révolution armée sous sa vraie forme est à son comble et il n’hésite pas au cours d’une réunion à M’kira d’apostropher Krim Belkacem et pour marquer peut être sa désapprobation contre la stratégie de l’OS. “Jusqu’à quand allons nous attendre encore pour déclencher la révolution et si nous venions à mourir avant, serons-nous considéré comme des martyrs (Statut de chahid) ?” Interrogea celui qui mourra plus tard sous le nom de Si Chérif. C’est peut être aussi ce ras-le-bol exprimé par Ali Mellah que bien plus tard Krim Belkacem exprimera à ses autres compagnons, responsables des autres régions du pays tels Didouche, Boudiaf, Ben M’hidi et ce qui explique aussi l’absence des responsables de la Kabylie à la réunion dite des “22”.Avant le premier novembre 1954, Ali Mellah assumera successivement ses responsabilités au sein du parti, dans les Ouadhias. “Si Chérif fut le chef de notre kasma à une époque; La kasma recouvrait un vaste territoire qui regroupait des dizaines de villages alentour. Il avait participé à l’attentat manqué du caïd Dahmaouche des Ait Yahia Moussa par Krim Belkacem. Ils étaient entrés ensemble dans la clandestinité. Il était lettré en arabe et savait parler aux gens de sa voix basse mais convaincante avec force citations du coran ou de poètes célèbres.” Témoigne feu Ali Zamoum dans son livre “Tamurth Imazighen”. Il assumera tour à tour les même responsabilités à Sidi Naâmane, Tigzirt et Azazga où il signera, le 1er novembre 1954 à minuit, par de multiples actions le déclenchement de la révolution, armée tant attendue. Il participera à plusieurs embuscades et attaques contre l’armée coloniale dans toute la zone allant de Tigzirt à Ain El Hammam et sera même blessé. Réfugié à Timizart et soigné, il portait alors le nom de Si Saïd. Plusieurs anciens moudjahidine avaient témoigné de sa bravoure devant les dangers et de son courage dans les combats.En juin 1956, Ali Mellah rejoint à la wilaya IV, dans la région de Blida où il prit une part active à la préparation du congrès de la Soummam avec Salah Zamoum, Slimane Dhilès, Amar Ouamrane, Abane Ramdane et Amara Rachid. N’ayant pu assister aux assises du congrès de la Soummam comme représentant du Sud, il fera parvenir néanmoins un rapport sur sa situation et qui sera lu devant les congressistes par Amar Ouamrane. Nous savons par ailleurs que le congrès de la Soummam l’avait désigné non seulement membre suppléant du conseil national de la révolution (CNRA) mais l’avait élevé au grade de colonel et chef de la wilaya IV qui venait d’être érigée. “On a raconté que lorsqu’il fut désigné pour prendre le commandement de la wilaya VI, il avait dit “Je sais que je vais aller mourir dans cette région saharienne, mais j’y vais quand même”, témoignait encore Ali Zamoum, mais comme il n’avait répété ce qu’on racontait, rien ne laisse à supposer que cela cache beaucoup de choses et que c’est à dessein car Ali Mellah, avec cette haute nomination ne peut avoir peur de la mort d’autant plus que son seul souci était de mourir en martyr de Dieu pour la libération de son pays et qu’il ne fait aucun doute que sa place ne sera qu’au Paradis, telle est la promesse du Seigneur pour ceux qui combattent dans sa voie. Il ne fait aucun doute également que les services du deuxième bureau français ne sont pas restés les mains croisés pour éliminer cet autre chef de la rébellion et qu’il doivent creuser leurs méninges pour l’éliminer au plus vite d’autant qu’il possède plus d’un atout entre les mains pour rassembler autour de lui toutes les tribus du sud.En outre, toute la littérature sur sa mort déployé par l’historien français Yves Courrières en traitant de La Guerre d’Algérie, ne tient pas la route et n’avait pour but que de semer le trouble dans les esprits des Algériens qui auront à se pencher sur notre histoire. C’est donc, le 31 mars 1957 que le deuxième bureau a eu raison de ce Héros “au cheval blanc”, près de Ksar El Boukhari, mais après lui, d’autres Si Chérif et d’autres héros se sont levés, à l’exemple de ces étudiants qui avaient quitté les bancs des universités pour aller le remplacer.

Essaid N’ait Kaci

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