«Toute une gymnastique pour parer au déficit des places»

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À la veille de la rentrée universitaire, les 2 700 places pédagogiques du campus Tamda, promises pour le mois d’août, ne sont pas encore livrées. Pr Tessa, recteur de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, explique dans cet entretien, la stratégie de l’université pour combler ce déficit. Il évoque en outre plusieurs autres questions, notamment la situation financière de l’établissement dont il préside les destinées.

La Dépêche de Kabylie : Avant de parler de rentrée universitaire 2018/2019, peut-on faire le point sur l’année universitaire écoulée ?

Pr Tessa : Je suis à ma deuxième année à l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou. Sincèrement, beaucoup de choses ont été faites par mes prédécesseurs, mais comme c’est une grande université (60 000 étudiants, 2200 enseignants, 2000 fonctionnaires), ce n’est pas facile de gérer et maitriser les choses. Le problème c’est l’éclatement de l’université sur plusieurs sites. Le campus de Tamda à lui seul, nous a causé beaucoup de problèmes. Des commodités manquaient quand nous l’avons occupé, problème de chauffage, coupures d’électricité … Sur le plan de la gestion que ce soit humaine ou logistique, l’éclatement de l’université sur plusieurs sites n’est pas pour faciliter la gestion, surtout par ce temps d’austérité où nous ne pouvons pas récupérer les postes budgétaires des retraités. Sur le plan matériel, l’enveloppe doit être répartie sur plusieurs sites au lieu de profiter à un seul de manière palpable et perceptible. Mais grâce à la volonté de tous les partenaires, CNES, SNAPAP, on travaille tant bien que mal dans la concertation totale et on se voit pratiquement chaque semaine. Les comités autonomes m’ont aussi beaucoup aidé dans le travail, on fait ensemble le constat : problèmes, prévisions, actions… Il faut souligner qu’on a hérité d’une situation administrative et financière difficiles aussi.

Sur le plan pédagogique ?

Sur deux ans, la situation s’est améliorée dans beaucoup de facultés. Certaines posent encore un certain nombre de problèmes. C’est un héritage. Il y avait beaucoup de grèves, comme pour la faculté des sciences économiques. Mais nous avons terminé les EMD et commencerons le rattrapage demain (Ndlr le 3 septembrre). Les cours vont démarrer le 3 octobre prochain. La faculté de Génie de construction, le département Génie de l’informatique fonctionnent plus au moins bien. Nous avons les Génie mécanique et Génie civil qui patinent plus. Ils ont connu quelques arrêts de cours parfois justifiés, d’autres fois non. La rentrée, si tout va bien, pour ces départements, sera pour le 10 octobre. D’autres facultés ont fait des progrès. Les étudiants en Droit ont tous terminé, ils démarreront à l’instar de tous les nouveaux bacheliers, le 16 septembre. Pour le département Mat info, les étudiants ont fait une excellente année, mais ils ont raté les examens de fin d’année. En tous cas toutes les facultés démarreront début octobre.

Peut-on savoir où vous en êtes avec les préparatifs sur les plans pédagogique et infrastructurel ?

Sur le plan pédagogique, nous avons fait le point sur les places que nous allons libérer pour accueillir les nouveaux inscrits. Nous avons exprimé le besoin de 6 500 à 7 000 places pour une rentrée apaisée. Mais vu le taux de réussite élevé au bac, et le nombre que nous recevons, à savoir 9 400 étudiants avant les recours, ce nombre reste insuffisant. En diplômés, on attend 6 500 étudiants, ce qui fera donc des places libérées. Par ailleurs, pour ces inscriptions définitives, nous avons mobilisé plus de 250 employés.

Avez-vous suffisamment de structures pour accueillir ce nombre ?

C’est à chaque fois le même problème. Nous attendons la fin de l’année pour commencer à discuter des équipements dans la wilaya. L’autre problème est que les délais ne sont jamais respectés. Nous attendons 2700 places pédagogiques à Tamda pour bien réussir la rentrée, mais le mois d’aout est terminé et on ne les a pas réceptionnés. Nous n’accepterons pas de les réceptionner sans électricité, chauffage, et autres commodités, l’expérience de l’année dernière suffit. D’habitude, je suis optimiste, mais là j’ai de sérieux doutes de les réceptionner à temps.

Qu’envisagez-vous pour parer à ce déficit en matière de places pédagogiques ?

Ça sera toute une gymnastique. Nous avons tenu une première réunion avec les doyens. Nous sommes obligés d’exploiter le plein horaire de 8h à 17 h y compris de midi à 13h. L’infrastructure sera occupée à longueur de journée. A Hasnaoua, les sciences économiques et les facultés des lettres sont obligés de coordonner leurs emplois du temps pour qu’il y ait une utilisation rationnelle du campus.

Qu’en est-il des structures à restituer à l’Éducations nationale ?

La structure destinée à la pédagogie, Hamlat en l’occurrence, nous l’avons restituée en effet à l’Éducation, c’est un site vétuste. Mais on ne peut pas encore le faire pour les structures de l’Éducation utilisées par les œuvres universitaires, et ce, vu le retard des chantiers, d’autant plus que ce sont des résidences de filles. Il s’agit l’ITE Didouche Mourad et d’une partie du lycée Draa Ben Khedda. Nous avons sollicité le directeur de l’Éducation pour mettre encore à notre disposition ces infrastructures, cette année.

Peut-on connaitre la situation financière de l’université ?

À mon arrivée, j’ai trouvé une situation financière un peu contraignante, pour ne pas dire déficitaire. Le budget de fonctionnement, pour les années précédentes, n’a pratiquement pas évolué depuis 2012, alors que c’était une période financièrement aisée. Nous avions beaucoup de rappels non payés, beaucoup d’échelons non payés, beaucoup d’avancements n’ont pas été faits. Nous avons essayé d’assainir la situation financière et nous avons payé toutes nos dettes. On a pu avoir une légère augmentation sur le budget et on est une des rares universités à l’avoir. Le taux de consommation a dépassé les 90% l’année écoulée. Cette année aussi on consommera pour répondre aux besoins de l’université. Cela dit, on reste toujours en besoin d’un supplément budgétaire. En économie, on dit que les besoins sont illimités mais pas les ressources. Pour l’instant, le minimum existe, mais on a besoin de plus pour faire mieux que les années précédentes. Le ministère nous a accordé une autorisation de financement pour l’auditorium, qui est vétuste, c’est déjà une bonne nouvelle. Son enveloppe est à hauteur de 4 milliards de centimes. La restauration de la tour à 5 milliards de centimes, Pour l’étanchéité, nous avons eu plus de 2 milliards de centimes. Nous avons formulé d’autres demandes pour prendre en charge d’autres besoins, nous attendons.

Vos perspectives pour la nouvelle année universitaire ?

La concertation avec les partenaires sociaux est toujours le principal principe dans ma gestion. De temps en temps on écoute toutes les parties intervenant dans le fonctionnement de l’université, c’est très important. Cette année, nous avons terminé l’opération de l’assainissement grâce aux efforts de tous. J’espère qu’on aura de belles choses à concrétiser sur le plan recherche scientifique pour le rayonnement scientifique de l’université à l’extérieur, avec les chefs d’entreprises. Pour la création d’un incubateur, nous avons installé une commission d’experts interne et externe. Nous avons renforcé et concrétisé la coopération internationale et nous avons beaucoup de conventions signées avec pratiquement toutes les directions. La stabilité est importante et l’université doit apporter un plus à la société. Nos étudiants, à travers les clubs scientifiques et les associations estudiantines, participent activement dans ce sens. On n’a pas encore maximisé et rentabilisé tout le potentiel et toutes les potentialités de l’université, nous allons travailler pour y parvenir.

Entretien réalisé par Kamela Haddoum.

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