Grande mobilisation pour l’arbre à Tala Rana

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C’est au cœur du massif du Djurdjura que s’est déroulée la célébration de la Journée nationale de l’arbre, avec la plantation d’une trentaine de pins noirs, une espèce endémique du Djurdjura.

Une initiative émanant de M. Yahiaoui Boussaad, promoteur de circuit touristique ainsi que M. Khaber Djamel, le premier et unique propriétaire d’un gite au niveau de la wilaya de Bouira. Un gite d’étape situé à Ath Hamad, commune de Saharidj, pouvant accueillir jusqu’à 15 personnes et qui permet aux randonneurs de passage de s’abriter et de se restaurer de manière traditionnelle chez l’habitant. C’est dans cet établissement qu’étaient invités, les services du Parc National du Djurdjura, les Forêts, les éléments de la Protection Civile, un responsable de la Direction du Tourisme de la wilaya de Bouira ainsi que plusieurs membres actifs d’associations de tourisme. C’est le P/APC de Saharidj M. Zemour Dao qui a d’emblée souhaité la bienvenue à l’assistance avant de procéder au coup d’envoi d’un atelier sur l’écotourisme et le tourisme à domicile dans le Djurdjura. M. Akli Moussouni, expert consultant en agriculture, M. Haddad Moussa, ingénieur au Parc National du Djurdjura et M. Chemlal Moncef, chef de service à la direction du tourisme se sont succédé pour développer leurs discours. M. Akli Moussouni interviendra en premier pour expliquer l’écotourisme et le développement local en zones de montagne. L’orateur insistera sur la nécessité d’accorder un regard neuf pour donner une image d’un produit destiné exclusivement aux touristes. Pour l’expert, il s’agit avant tout de professionnaliser la filière touristique en apportant des services spécifiques à chaque région ciblée : «Il faut relever les défis techniques, culturels et humains pour parvenir à atteindre l’objectif économique, et cela ne peut se faire en l’absence d’une organisation entre les différents acteurs», expliquera-t-il. Tout au long de son intervention, l’expert s’attèlera à démontrer la nécessité de mettre en place des mécanismes inhérents à drainer des touristes tout en développant les arts culinaires et populaires. Il citera comme exemple, l’utilisation de l’âne, la bête de somme auparavant synonyme de vie rude et difficile en zone rural notamment, pour les randonnées familiales qui génèreront des revenus. Les produits du terroir sont pour M. Moussouni également à inclure dans la stratégie du développement du tourisme au profit des visiteurs, souhaitant ressentir pour certains le vécu et pour d’autres la nostalgie d’une époque aujourd’hui révolue.

Le PND au service de l’écotourisme

Pour M. Moussa Haddad, cadre au niveau du Parc National du Djurdjura, l’institution qu’il représente est trop souvent décriée pour son attitude jugée «trop rigoureuse et sévère» : «Le Parc National du Djurdjura est un atout et son rôle est de protéger la biodiversité, et cette protection de la faune et de la flore n’interdit aucunement ou n’interfère aucunement de manière négative sur la promotion du tourisme. Les touristes viennent pour voir des espèces de plantes ou d’animaux qu’ils n’ont jamais vues et nous sommes dans notre rôle de leur faire découvrir ce patrimoine. Un patrimoine qu’il faut absolument préserver pour que les générations futures puissent à leurs tours profiter de cette richesse», indiquera-t-il. Il prendra d’ailleurs en exemple les 21 espèces de rapaces existantes dans le Parc National du Djurdjura qui représentent la chaine complète, des 34 mammifères et de plus de 1100 espèces de plantes dont certaines à l’état endémique : «On nous interroge parfois pourquoi on ne plante pas des arbres sur les pelouses alpines ou sur des escarpements rocheux. Il faut savoir que planter dans certains endroits peut nuire à certaines espèces florales ou de faune. Nous devons veiller également à ce que les coupes de bois soient bannies, de même veiller aux incendies, comme nous sensibilisons les visiteurs à ne pas laisser derrière eux des immondices et autres déchets qui défigureront la nature en mettant en péril faune et flore», soulignera M. Haddad lors de son intervention sur le rôle du Parc National du Djurdjura dans l’écotourisme et la protection de l’environnement.

Le gîte chez l’habitant : une formule en vogue

La direction du tourisme de la wilaya de Bouira, via M. Chemlal Moncef réaffirme pour sa part ne négliger aucun effort pour promouvoir l’écotourisme, en soulignant qu’il n’existe pas deux produits touristiques similaires ou identiques à travers le monde. «Vous pouvez vous rendre dans deux régions mitoyennes et vous découvrirez que l’artisanat et les sites sont totalement différents. C’est ce qui fait que chaque région dispose de sa spécificité en la matière. Nous avons établi un diagnostic sur les potentialités touristiques de la wilaya de Bouira et nous avons fixé des objectifs pour développer notre stratégie. Il faut savoir que la formule du gite chez l’habitant a fait l’objet d’une circulaire interministérielle en 2012, mais, cette formule convient le plus au tourisme sur le littoral. Pour les zones de montagne la formule du gite chez l’habitant n’est pas encore très développée, à travers la wilaya de Bouira, nous n’avons délivré pour le moment qu’une seule autorisation pour M Khaber, ici à Saharidj. Pourtant nous n’avons ménagé aucun effort pour sensibiliser les APC et vulgariser ce genre d’hébergement, mais force est de constater qu’à l’heure actuelle, les personnes voulant investir dans ce créneau ne disposent pas toutes des documents nécessaires», indique M. Chemlal. Il est vrai que plusieurs investisseurs veulent aménager de tels gites, mais en zone rurale, particulièrement sur les hauteurs du Djurdjura, les citoyens éprouvent des difficultés pour justifier de la propriété de leurs biens. «Pour réaliser un gite d’étape, il suffit d’une autorisation d’exploitation, d’un simple montage financier et aucune architecture spécifique n’est demandée», soulignera le responsable des services du tourisme de Bouira. M. Chermat, propriétaire d’une agence de voyage à Bouira interrogera les intervenants pour savoir si justement la population locale est prête à accueillir des étrangers à la région : «Des visiteurs peuvent se rendre ici sans s’apercevoir que leurs effets vestimentaires peuvent quelque part déranger les ruraux, il faut tenir compte de l’aspect sociologique de la chose. Je pense que pour ce faire, il serait souhaitable que ce soit les agences de voyages spécialisées dans l’accueil et l’orientation qui se chargent de vendre l’image de la région», préconise M. Chermat. Pour M. Zabour, un estivant de passage résidant à Aokas, wilaya de Béjaïa, il serait souhaitable de prendre en considération certains critères avant de s’apprêter à recevoir les foules : «Je vis à Aokas, une région qui reçoit plus de deux millions d’estivants par an, et je peux vous dire que nous souffrons de ce flux de touristes et que nous sommes pénalisés sur d’autres plans. Je vous donne en exemple la polyclinique d’Aokas, aucune mesure n’est prise par les services de la santé pour revoir à la hausse leurs quotas de consommables à l’exemple des seringues. Eté comme hiver, c’est le même quota pour cette petite ville, et lorsque les citoyens se rendent au dispensaire pour une injection on leur dit qu’il n’y a plus de seringue. Pareil pour le personnel qui est limité au même nombre alors que face au flux de touristes, il serait souhaitable que les effectifs soient renforcés. Ceci n’est qu’un simple exemple car la situation est beaucoup plus complexe», affirme M Zabour.

Le P/APC de Saharidj, M. Zemour quand à lui, fera part de problème rencontré avec les responsables du Parc National du Djurdjura dans sa commune : «Nous avons le site de Tala Rana qui dispose d’une ossature d’un hôtel réalisé au début des années 1990. Aujourd’hui le PND nous interdit de terminer les travaux pour le rendre opérationnel, ce qui nous prive de rentes au niveau communal». Le responsable du PND prendra la parole pour lui signifier qu’il est possible d’investir pour recevoir des touristes en respectant la réglementation, c’est-à-dire en aménageant des endroits (gites) mais aucune construction en béton n’est tolérée. Les débats ont été ensuite lancés et plusieurs membres d’associations poseront à leurs tours des questions sur les mécanismes et fonctionnement pour réaliser des gites d’étapes. En fin de cet atelier, des recommandations ont été rédigées pour poser les socles d’une politique d’écotourisme sur le versant sud du Djurdjura avec la collaboration des services du PND, des forêts, des APC concernés et des membres des associations de tourisme. Il sera fait état de la nécessité d’impliquer les secteurs de la culture, de la jeunesse et des sports afin de créer une coordination en matière de tourisme en jumelant les efforts avec le mouvement associatif activant pour l’heure dans le versant nord du Djurdjura. Tout au long de la journée, des dépliants ont été distribués aux automobilistes de passage en les sensibilisant sur la préservation de l’environnement, notamment dans cette zone limitrophe au PND. A l’issue de cette journée, trente pieds de pins noirs, une variété endémique au Djurdjura, ont été ensuite plantés au cœur de la forêt de Tala Rana. C’est à pied, en raison de l’affaissement partiel de la piste forestière menant vers ce site, que plusieurs dizaines de personnes ont pu bénéficier d’une randonnée en pleine nature en admirant les châtaigniers, les pins et autres espèces protégées jalousement cachées dans la station biologique de Tala Rana.

Hafidh Bessaoudi

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