Un site féerique à protéger

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Constitué d’une chaîne de montagnes de 50 kilomètres de long et de dix de large s’allongeant d’Est en Ouest, on discerne trois grands massifs : A l’ouest, le massif de Haizer qui surplombe du haut de ses 2164 mètres, au centre, le massif Akouker haut de 2305 mètres d’altitude et le troisième à l’Est le massif de Lalla Khadidja qui culmine à 2 308 mètres. L’ossature générale du Djurdjura est calcaire, les crêtes dolomitiques et les sédiments sont aussi calcaires, gréseux ou marneux. Sur ce relief jeune, élevé et accidenté, le Djurdjura échelonne des crêtes rocheuses dépassant les 2 000 mètres d’altitude. Les principaux modèles géomorphologiques les karst, les dolines, et les lapiazs. Certaines formes telles Tasseraft, (fosse de neige) et Agounis (couloir karstique sont des particularités de cette majestueuse montagne. En matière de flore, 990 espèces sont recensées dans le parc, dont 32 à l’état endémique et 33 espèces sont protégées par la loi car en voie d’extinction. Concernant la faune riche et variée, elle comprend la plupart des espèces de l’Algérie du Nord. Pour les mammifères 23 espèces enregistrées dont 10 protégées. Parmi les animaux qui ont disparu, on peut citer entre autres, le lion, la panthère, le mouflon et l’ours brun. Le serval serait probablement encore présent dans ce massif mais aucune certitude quant à l’existence assurée de ce grand chat sauvage haut sur pattes qui jadis peuplait la région. Parmi les espèces rares et très rares on retrouve le lynx caracal et la hyène rayée. L’avifaune est représentée quant à elle par 114 espèces dont 35 sont protégées dans lesquelles figurent 21 sortes de rapaces. 67 autres espèces sont sédentaires, 47 espèces sont migratrices. L’entomofaune est représentée par 218 espèces d’insectes mais aucun inventaire n’a encore été réalisé à ce jour.

Les légendes de Lalla Khadidja

Lalla Khedidja puise son origine du prénom d’une jeune fille dotée de pouvoirs magiques qui était issus du village Ibelbaren dans l’actuelle commune de Saharidj, 60 kilomètres à l’est du chef-lieu de wilaya. D’après une légende qui se transmet de génération en génération et qui remonte à un passé très lointain, Khadidja était dotée de pouvoirs surnaturels. Elle pouvait par exemple déplacer les objets, tisser la laine, préparer le repas, moudre le blé, et réaliser d’autres tâches ménagères rien qu’en fermant les yeux et en pensant très fort à ce qu’elle voulait accomplir, le tout sans exécuter de geste. Ces faits lui ont valu une notoriété locale très importante. Les gens de son village racontent qu’à cette époque Khadija qui était bergère, pouvait se transformer en chacal pour surveiller son troupeau lorsqu’elle se trouvait dans les pâturages. Un jour de marché hebdomadaire, et alors que les chefs de famille du village partaient faire leurs commissions, un villageois curieux suivra discrètement la jeune bergère dans les champs. Tout en gardant respectueusement ses distances de la jeune fille, le curieux aperçu un spectacle inimaginable. C’était l’heure de la prière du Dhor, lorsque Khadidja s’est littéralement envolée vers le sommet de Tamgout (2 308 mètres ) alors qu’elle avait au préalable confiée son troupeau à un chacal. Le soir de retour au village, le curieux se dirigea directement vers Tajmaât où il raconta dans les détails ce qu’il avait vu dans la journée. Le lendemain, une poignée de villageois voulant vérifier la véracité de propos tenus par le curieux décide de suivre la jeune bergère. Ils eurent à constater les mêmes faits. Suite à cela, le sommet de cette montagne fut rebaptisée au nom de la bergère et devint de fait un lieu de culte et un lieu de pèlerinage après la mort de Khadidja. Un mausolée a donc été édifié au lieu même de son domicile, dans son village. Depuis cette époque, le sommet de Tamgout est visité sept mercredi de suite chaque année durant les mois de juillet et d’août. Une autre légende raconte qu’une famille nombreuse portant le nom d’Ath Lahçène, ne laissait guère Khadidja tranquille. Des membres de cette famille étaient très indisciplinés et faisaient preuve de mesquinerie envers la bergère en lui volant les fruits de son jardin, en salissant les vêtements qu’elle laissait sécher au soleil, etc. Pour mettre terme à ces exactions interminables et répétitives, Khadidja pria Dieu pour que cette famille quitte les lieux. Un jour, un brouillard épais et dense vient recouvrir le village en le plongeant dans l’obscurité complète, à tel point qu’on ne voyait absolument rien. Devant ce phénomène inexpliquée, la turbulente famille quitta les lieux pour s’exiler sur l’autre coté du versant du Djurdjura, du côté de Beni Yenni, où l’on retrouve effectivement un village qui porte le nom des Ath Lahçène.

Une autre légende rapporte que Khadidja, avant de se marier, exigeât que son prétendant dispose également de pouvoirs surnaturels. Au bout de quelques mois, un jeune homme vient trouver la jeune bergère pour lui demander sa main. Khadidja lui fit part de son exigence et l’homme, en guise de réponse s’en allât dans la forêt limitrophe du village pour y revenir avec une bête de somme chargée de bois mort fagotés à l’aide de serpents au lieu d’une corde. Depuis le mari de Khadidja fût surnommé Vou Lahmel Izerman, (l’homme aux fagots de serpents). Après leur mariage, ils décidèrent d’un commun accord que le premier qui quittera ce monde devra aménager la maison du couple en mausolée.

Le sort voulut que ce soit Khadidja qui décédera la première. Les pèlerins qui s’y rendent chaque mercredi des mois de juillet et d’août passent la nuit sur place en compagnie d’Idheballen, et le lendemain matin les marabouts égorgent en guise de sacrifice les moutons et les béliers reçus en offrande pour les distribuer équitablement entre les pèlerins et les villageois. Selon les dires de descendants de Khadidja, cette dernière aurait même combattu l’occupant colonial au même titre que Lalla Fathma N’Soumer, alors que d’autres révèlent qu’elle était une religieuse exemplaire qui prêchait la bonne parole et qui réconciliait les tribus et villages antagonistes.

La légende de Tinzert, la source salée

Une autre légende nous a été racontée par d’honorables vieillards de la région concernant la source Tinzert (le nez), qui tire son nom de la forme des deux cavités naturelles qui ressemblent étrangement à deux narines. Il s’agit d’une fontaine située à 500 mètres au sud du village N’Ath Ali, commune de Boghni, au débit appréciable (100 litres par minute). Elle alimente deux centrales hydro électriques d’Ighzer N’Chvel et de Thala Oulili. L’eau de cette source est d’un goût saumâtre et la salinité augmente sensiblement en été.

La légende raconte qu’à la fin du 18e siècle, une caravane venue de Béjaïa s’est rendue dans le village d’Ath Ali pour rançonner les habitants. Une rançon en nature qui se composait essentiellement de figues sèches et d’huile d’olive.`

Pourquoi cette rançon ?

Les caravaniers de Béjaïa disaient que l’eau de la source de Tinzert était salée et que donc elle ne pouvait provenir que de la mer. Pour cela, les Bédjaouis jugeaient normal le fait de s’acquitter d’une dîme en nature. Si par malheur les habitants refusaient de se soumettre à cet impôt, les caravaniers menacèrent de cesser d’alimenter la source à partir de la mer. Plusieurs fois rançonnée, une villageoise osera pourtant un jour leur faire un cinglant affront. Cette vieille femme refusa de se faire extorquer, une fois de plus, de la nourriture car elle était très pauvre et tiendra des propos offusquants aux caravaniers. ‘’Si vous voulez couper l’eau, faites-le !’’ La vieille femme fut alors prise à partie par l’ensemble du village qui décida de la mettre en quarantaine et personne ne lui adressa la parole de peur de représailles. Défier les caravaniers surtout par une vieille femme était un acte inimaginable à l’époque pour les sages du village. Pourtant, les jours, les semaines, les mois et les années se sont écoulés sans que cette source ne soit tarie. L’eau n’étant pas coupée, les habitants refusèrent par la suite de se soumettre au diktat des caravaniers.

Hafidh Bessaoudi

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