Virée à l’hôpital Mustapha-Pacha / Après le f’tour, “Sahra” aux urgences

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C’est la pagaille totale qui régne au niveau de nos services d’urgences durant ce mois sacré. C’est devenu une habitude pour ne pas dire un rituel, comme à chaque Ramadan, nos urgences débordent, le même cas aussi pour les autres services.

En effet, lors de notre virée au service des urgences de l’hôpital Mustapha-Pacha (Alger), nous avons constaté cette amère réalité. La salle s’est avérée très exiguë pour contenir toute cette affluence. Des patients qui se plaignent des infirmiers, qui étaient à leur tour dépassés par les patients, ainsi que par le Ramadan. Une pression qui, de l’avis de beaucoup, a tendance à provoquer du stress chez le personnel médical, qui doit non seulement orienter, mais prendre en charge et traiter plusieurs patients à la fois, dans des conditions

parfois intenables. Beaucoup de citoyens rencontrés à l’intérieur de ces structures, notamment des mères de famille et des personnes âgées ont exprimé certaines appréhensions quant à la qualité de l’accueil ou la prise en charge médicale des patients. Elles ont déploré la confusion et la désorganisation qui caractérisent ces services, principalement durant la nuit où l’afflux des malades est le plus important.

Un service qui est censé être celui des urgences, est devenu hélas une vraie salle d’attente pour les patients ainsi que pour leurs compagnons, qui passent des heures et des heures, avant de voir le médecin. “J’attends mon tour depuis plus de deux heures, mais pour le moment personne n’a cherché après moi, c’est vraiment déplorable, en dépit de l’urgence de mon cas qui nécessite une prise en charge immédiate», déplore Ahmed, un patient issu de la wilaya de Sétif, qui a été accompagné par son fils. De son côté Omar, un jeune de la wilaya de Médéa, qui a accompagné sa mère qui a eu des troubles digestifs, nous a révélé que “c’est l’anarchie totale qui règne dans cette structure sanitaire, les médecins sont devenus irréprochables, alors pour avoir droit à des petites consultations, tu dois faire une chaîne de plus deux heures, c’est inadmissible’’, fulmine notre interlocuteur. Une jeune fille, visage pâle et tremblante, en compagnie de ses parents, a été mise sous perfusion. “Nous sommes là depuis 8h du matin et j’attends toujours mon tour’’, dira le père, inquiet de l’état de santé de sa fille. Après plus d’une demi-heure d’attente, le médecin a tranquillisé le chef de famille : “Ne vous inquiétez pas Monsieur, c’est juste une simple gastrite’’, le rassure-t-il.

Certes, nos salles d’urgences sont généralement exiguës pour contenir tout ce monde, mais il est à savoir que le flux de patients enregistré durant ce mois de Ramadan, est jugé “exceptionnel’’. “Le nombre de consultations réalisées durant cette période est en hausse significative’’, nous a indiqué un infirmier. Cependant, les salles d’urgences ont admis un plus grand nombre de personnes durant cette première semaine. Dans certains hôpitaux, le nombre a même doublé. La plupart des patients admis sont des personnes âgées ou des gens souffrant de diabète, de problèmes cardiaques ou de maladies d’estomac. Généralement, ce sont les patients souffrant de problèmes gastriques ou d’hypertension et d’hypoglycémie, détectés principalement chez les personnes âgées et celles ayant un excès de poids, outre les problèmes gastriques multiformes, spécifiques également au jeûne et étroitement liés au changement des habitudes nutritionnelles et la surconsommation de certains produits à forte teneur en agents excitants ou en matière grasse, qui ont été recensés au niveau des services des urgences hospitaliers, nous a confié un infirmier. En somme, tous ces facteurs ont contribué à la dégénération de la situation au niveau de nos services d’urgences.

Après la rupture du jeûne… Les urgences

Tellement nous sommes devenus boulimiques durant ce mois sacré nos urgences s’avèrent exigus, En effet, un simple tour au niveau des hôpitaux de la capitale renseigne sur l’amère situation des Algériens après la rupture du jeûne. Une dizaine de jours seulement se sont écoulés sur ce mois sacré alors que les services des urgences dans leur majorité ont connu une affluence inhabituelle des patients qui viennent pour une consultation suite aux différents malaises après la rupture du jeûne. Des malaises sont dus généralement à la mauvaise habitude alimentaire, laquelle reste l’apanage de ce mois sacré. Interrogés, la plupart d’entre eux insistent sur le respect d’un régime alimentaire sain, et recommandent d’éviter l’abus en boissons gazeuses, en sucreries et en plats trop épicés. Finalement, cette tradition, qui veut que la table du “f’tour’’ soit bien garnie, n’entame pas seulement la bourse des Algériens, elle apporte également son lot de désagréments et de malaises pendant ce mois. Il reste que la couche la plus vulnérable sont indubitablement les diabétiques. A titre d’exemple, ces derniers peuvent rencontrer de sérieux problèmes lors du jeûne, vu leur régime spécifique. Pour le diabétique s’abstenir de manger pendant la journée entraîne une baisse dangereuse du taux de sucre dans le sang. Et manger beaucoup pendant l’iftar a, au contraire, tendance à faire remonter ce taux, parfois de manière dangereuse. Une moyenne quotidienne de 80 à 100 consultations est effectuée entre 20h et 23h, au niveau de ce service, nous a confié notre interlocuteur. Par ailleurs, les gens que nous avons abordé lors de cette petite virée, ne se souffrent pas seulement des malaises engendrés par la malbouffe, mais également de ceux relatifs à la canicule. Sachant que cette année, le mois sacré intervient en plein été avec des températures moyennes de 30 degrés. Le soleil brûlant et la chaleur n’ont fait qu’empirer les choses pour les jeûneurs, en particulier pour les plus âgés, dont beaucoup souffrent de la déshydratation. Enfin, la question qui mérite d’être posée, sommes-nous des boulimiques durant ce mois de Ramadan ? Ou bien, c’est nos services d’urgences qui sont atteints par la léthargie ?

Yahia Maouchi

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