Changement dans les mœurs de consommation ?

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Un mois après son inauguration en grandes pompes, l’hypermarché ‘’ Uno Shopping Center’’ propriété du groupe agroalimentaire CEVITAL ne cesse de faire parler de lui.

En effet cette grande surface de 70 000 m2 dont 16 000 m2 couvertes est la première du genre à l’échelle régionale, faut-il le rappeler.

Dès son ouverture au grand public, l’hypermarché a connu un engouement sans précèdent.. Il est vrai que ce centre commercial a de quoi attirer, et pour cause, tout y est fait afin d’inciter à la consommation à outrance. Ce ‘’ temple’’ dédié à la consommation de masse propose : produits alimentaires, produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, textile, électroménager, produits High-Tech, puériculture, maroquinerie…

Une véritable caverne d’Ali Baba. En plus de faire leurs courses dans cet espace, les citoyens de Bouira et des régions avoisinantes pourront dans un avenir proche, s’attabler dans l’un des restaurants du  » food court’  » pour lesquels 743 m2 ont été réservés, selon les déclarations d’un responsable de cet hypermarché. Par ailleurs, bon nombre de clients interrogés sur le sujet ont affiché clairement leur ‘’ satisfaction’’ devant cet édifice.

A l’image de Nadia qui s‘est dite :  » Ravie de voir une telle infrastructure s’implanter à Bouira. C’est une belle preuve de progrès et de modernité ». Avant d’ajouter :  » Désormais, on peut dire que Bouira n’a rien à envier aux supermarchés d’outre-mer dans ce domaine ». Dira- t- elle d’un air extasié. Cependant avec tous ces arguments qui plaident en sa faveur, ce ‘’ shopping center’’ n’arrive pas à séduire pleinement les citoyens…

Ces derniers, sont assez réticent à l’idée d’y faire leurs courses. Selon les avis recueillis auprès de la population, il s’est dégagé deux principales raisons qui pourraient expliquer cette réticence vis à vis de cet hypermarché : l’habitude et surtout les prix affichés

Une habitude tenace !

Comme il a été précédemment mentionné ce centre commercial est une nouveauté sur le plan régional. Une grande surface où tout y est à portée du cadi… C’est un fait inédit dans les mœurs des consommateurs au niveau de la wilaya de Bouira. Les citoyens ont leurs petites habitudes en ce qui concerne le fait d’effectuer leurs achats Tout ce qui est fruits et légumes, c’est le marché les viandes c’est le boucher du coin, et pour l’habillement c’est les magasins ou bien les friperies. Ce sont des réflexes systématiques.  » Ecoutez, personnellement je ne suis pas très enthousiaste à l’idée d’effectuer mes courses dans cet hypermarché. Certes, c’est quelque chose de formidable pour notre wilaya, c’est indéniable ! Toutefois, j’ai mes habitudes en matière d’achats… Je m’explique : J’habite au quartier de l’Ecotec, le marché des fruits et légumes et à deux pas, un magasin d’alimentation générale également, bref, tout y est plus prés. En plus, honnêtement je préfère m’approvisionner chez des connaissances, au moins, je suis certain de ne pas avoir de mauvaises surprises « . Le témoignage de ce citoyen reflète assez bien l’avis général de la population à l’égard de ce centre commercial. Pour rappel, bien avant son lancement, beaucoup ont prédit à tort ou à raison la ‘’mort’’ des petits commerçants et épiciers de quartier, ‘’ laminés’’ par ce géant de la grande distribution.

La qualité et le choix se paient au prix fort !

Autre point et non des moindres, qui freine les ardeurs des clients les plus téméraires, est celui des prix. En effet, ce point essentiel de toutes les transactions commerciales n’est clairement pas à l’avantage de cet hyper marché… Les prix y sont identiques et des fois plus chers par rapport aux commerçants dits ‘’ conventionnels’’. Pour rappel, dans les colonnes de ce même journal, on avait indiqué au moment de son inauguration le 13 septembre dernier, que les prix affichés y sont assez ‘’ cléments’’ de 5 à 10% moins chers que ceux des différents commerces. Cependant, force est de constater que les prix ont été revus à la hausse entre temps… cette flambée est assez déconcertante au rayon fruits et légumes, comme nous avons pu le constater. Appréciez donc : le kilo de tomate est affiché à 60 DA, celui des haricots verts à 119 DA, les aubergines à 79, la pomme de terre à 89 DA !! La différence est de taille quand on sait qu’au marché de l’Ecotec par exemple, ces produits sont cédés à un prix nettement plus inferieur, cela va de 10 à 40 de différence. Et comme chacun le sait, par les temps qui courent, le moindre centime gagné est précieux à la fin du mois. Les autres produits ne sont pas en reste, les prix de la lessive, des pâtes et tout ce que contient le cadi de la ménagère y sont quasiment identique comparativement à ceux affichés partout à ailleurs. De ce constat, une question élémentaire vient à l’esprit de tout un chacun : Où réside la différence entre le marché du coin et les rayons de cette grande surface ?! La réponse est tout aussi simple… La qualité et surtout le choix des produits. En effet, contrairement aux magasins d’alimentations et autres marchés de fruits et légumes traditionnels où la qualité des produits laisse souvent à désirer, et les vendeurs essaient parfois de ‘’ fourguer’’ des marchandises plus que douteuses…. A l’intérieur de cette enseigne de grande distribution, la notion du ‘’ client est roi’’ est respectée à la lettre ! Cette devise est d’autant marquée au rayon des fruits et légumes. Aucun vendeur qui ‘’guette’’ de loin vos faits et gestes et interdire à la clientèle de choisir ce qu’elle achète. Tout y est en self-service ! Les chefs de rayons sont là dans un seul et unique but : peser et emballer. La qualité des produits frôle la perfection… Des tomates bien rondes et juteuses, des laitues qui donnent l’impression qu’elles viennent d’être cueillies, des concombres calibrés…etc. A ce propos, un citoyen avouera que :  » C’est cher, et c’est le moins que l’on puisse dire… Un Kg de pomme de terre à 89 DA, c’est un abus ! D’autre part, il serait injuste de dire qu’on n’en a pas pour notre argent, la qualité des produits est infiniment meilleure que celle qu’on peut trouver sur les étals des autres marchés, mais aussi, chacun est libre de choisir à sa guise. C’est cela la grande distribution, la qualité et le choix se paient au prix fort ! « .

L’épicier du coin a encore de beaux jours devant lui !

Avec l’avènement de cet hypermarché et tout ce qu’il suggère comme changements dans les habitudes de consommation, les petits commerces de quartier sont-ils menacés comme ce fut le cas sous d’autres cieux, ou la culture de la consommation de masse s’est implantée à partir des années 70 ? Les Bouiris sont-ils prêts à délaisser le petit épicier du coin au profit de ce mastodonte ? Pas si sûr… Dans l’état actuel des choses, cette hypothèse est à écarter, et ce, pour diverses raisons. Premièrement, les habitudes de consommation ne changent pas du jour au lendemain, il faut un temps d’adaptation. Comme il a été signalé au début, la plupart des citoyens sont encore ‘’ attachés’’ aux bons vieux marchés hebdomadaires et tout ce qu’ils comportent comme charme. Et aussi, le fait de se retrouver chez le marchand du coin, qui, il faut l’avouer fait presque partie de la famille, pour bon nombre d’entre nous. Autre raison qui ferait que le commerce de proximité a encore de beaux jours devant lui, le pouvoir d’achat ‘’ dérisoire’’ de la majeur partie de la population. Car pour faire ses courses convenablement dans cet hypermarché il faudrait dévaliser une banque…. Pour preuve, cette scène cocasse qui s’est produite à la caisse de centre commercial, un citoyen qui avait rempli son cadi à ras-bol, s’est vu contraint de le vider car il n’avait pas la somme nécessaire pour payer.  » Je n’ai que 6000 DA en poche ! », dira-t-il d’un air confus. Enfin, dernier point et non des moindres, cette grande surface n’en ait encore à ses balbutiements. Avant de conquérir un marché il faut l’étudier, l’analyser, scruter à la loupe les moindres reflexes du consommateur dans le but de lui proposer des offres qui répondent à ses exigences. Sur ce point, à Bouira où partout ailleurs à travers le territoire national, les enseignes de grandes distributions ont encore du chemin à parcourir avant ‘’d’écraser’’ la concurrence,

Ramdane B.

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