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Ath Hamdoun Ils constituent quasiment la seule ressource du village : Quand il n’y a que les émigrés…

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Fort de ses quatre mille habitants, Ath Hemdoun est considéré comme étant l’un des plus grands bourgs de Kabylie. Affilié à la commune d’Aghbalou, dans la wilaya de Bouira, il est juché sur l’une des collines surplombant la ville de Tazmalt, distante de 2 km vers le nord.

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Le village porte son nom par rapport, selon ses habitants, au mot «Amdoun» qui signifie «lac». D’ailleurs, la principale placette du village porte, de nos jours, ce nom.

Historiquement, on l’associe souvent au fameux Aârch des Ath Abbas pour lequel, les ancêtres d’Ath Hemdoun déclarèrent leur solidarité vers les 14e et 15e siècles afin de contrer l’avancée des armées espagnoles qui ravageaient tout sur leurs passages. A cette époque, les villageois se réunissaient tous sur le mont « Agharef », en raison d’une situation sécuritaire sapée de conflits. Et cela fut de même pendant la guerre d’Algérie où les habitants du village furent parmi les premiers, dans toute la région, à prendre les armes contre l’occupant français.

L’exemple d’un village organisé

Le village Ath Hemdoun est régi par un groupe de sages « Lâaouqal », formant le comité de village. Ce dernier peut intervenir même pour le remplacement des différents corps de sécurité mais surtout dans les conflits opposant les habitants. C’est également ce même comité qui s’occupe de toutes les célébrations, commémorations et autres festivités, telles que Anzar, pour souhaiter une abondance de pluies, Tafsut, pour accueillir le printemps, et Timchrett, qui est pratiquée chaque année permettant la joie et surtout la mise en valeur de la solidarité du village. Avec leurs propres moyens, les citoyens d’Ath Hamdoun, ainsi que la diaspora du village, en France et ailleurs, vont jusqu’à lancer de grands projets d’intérêt général. Des groupes sont répartis au sein du comité pour faciliter l’accomplissement des taches. C’est ainsi que les cimetières, les mausolées et les fontaines du village sont entretenus, les ruelles également sont toutes bétonnées et même le transport des collégiens est à la charge du village. Etant habitués à ces activités, les habitants ont réussi à édifier de grandes infrastructures. Une salle de sport totalement équipée est construite au centre du village ainsi qu’un important siège pour le comité doté d’un foyer, dont les rentes sont au bénéfice de tout le village. En gros, c’est le simple villageois qui se bat quotidiennement contre les difficultés de la vie en montagne. Comptant principalement sur la production d’huile d’olive, comme principale ressource, les habitants d’Ath Hamdoun se préparent avant chaque saison hivernale par l’aménagement de pistes agricoles pour avoir accès à leurs oliveraies. « Le village s’occupe même des citoyens démunis, comme cette famille sinistrée après la dernière vague de froid. L’APC ne lui a attribué aucune prise en charge, alors c’est les habitants qui se sont réunis pour l’assister jusqu’à ce qu’elle puisse dépasser cette crise », nous explique M. Abdenour Lahcène, président du comité de village.

Presque autonome !

En dépit des efforts déployés par les habitants du village et les émigrés d’Ath Hamdoun, le village sombre de plus en plus dans l’isolement vu le manque de ressources de développement et de promotion de la part des autorités locales. Selon les membres du comité de village, l’APC d’Aghbalou, dont le siège est implanté à Takarbouzt, à 6km environs d’Ath Hamdoun, n’a jamais contribué au développement de la région.

Les pratiques des habitants des autres villages afin de résoudre leurs problèmes demeurent archaïques. Pour mettre fin à leur calvaire en manque d’eau, des bourgades perchées sur des collines plus hautes préfèrent simplement couper la conduite provenant du chef-lieu communal et alimentant des villages plus bas. L’APC, pour sa part, continue dans ses fausses promesses, au lieu de refaire complètement la conduite d’eau réalisée depuis 1952. Les actuels élus ne se souviennent de la population que lors des campagnes électorales,

En plus du problème d’eau potable, les habitants de ce village souffrent des récurrentes chutes de tension dues à tout un réseau électrique défaillant. Même l’éclairage public ne fonctionne pas, tous les quartiers sombrent ainsi dans le noir absolu dés le coucher du soleil. Dans ce sens, les membres du comité se composant de notables du village, énumèrent les nombreux risques que peut causer un tel réseau électrique, ils menacent même de ne plus payer les factures de la Sonelgaz jusqu’à ce que cette dernière procède aux travaux nécessaires.

A l’image de tout le village, les deux écoles primaires de cette contrée souffrent également d’énormes manques en équipement modernes. Les petits écoliers ne jouissent ni de bibliothèque, ni d’espaces de lecture. Et au moment où l’Internet relie le monde entier, Ath Hamdoun reste dépourvu même de simples micro-ordinateurs. Enfin, les responsables du comité de village évoquent un quartier totalement enclavé dit Aâmmouche, sis à environ 3 km d’Ath Hemdoun. Les habitants de cette zone ne disposent même pas des moyens les plus élémentaires à une vie simple.

La jeunesse, seul espoir

Souffrant aussi d’énormes manques et dans tous les domaines, les jeunes d’Ath Hamdoun s’organisent, en revanche, autour d’une association très active, notamment dans les activités sportives. Dans le cadre du CSA, ils ont participé à plusieurs tournois régionaux et, maintes fois, ils ont obtenus de très bons résultats en jeunes catégories. Comme ils organisent des tournois inter villages à chaque saison estivale, mais en dehors de leur localité vu que leur stade n’est pas encore équipé. En effet, les travaux entamés par les citoyens, portant sur le projet du stade reste, à nos jours, un grand terrain vague avec un drainage défectueux, sans vestiaires, sans eau ni électricité. « C’est injuste qu’une association aussi active que la notre n’ait bénéficié que de 5 millions de centimes lors des derniers PCD », se désole M. Lahcène Farés, président du CSA Ath Hamdoun.

Malgré toutes les entraves, la volonté et la détermination des jeunes du village dépassent toutes les limites imposées. Ils sont quatre fois champions de la wilaya de Bouira en athlétisme. Comme ils comptent participer à la compétition nationale de Full-contact et organiser un cross régional, en collaboration avec un club de la wilaya de Béjaïa.

Devant toutes ces réussites, les jeunes d’Ath Hamdoun demandent un minimum d’attention de la part des responsables locaux. « Une salle omnisports dans le village nous permettra surement d’autres importantes consécrations et aidera toute cette jeunesse à sortir de son marasme », conclut M. Lahcène.

C’est ainsi que nous quittons ce grand village d’Ath Hamdoun, gardant l’image d’une contrée presque autonome. Un village où ce sont les habitants, eux-mêmes, qui ne cessent de projeter, de se réunir et de s’organiser afin de sauvegarder, tout d’abord, les traditions de nos aïeuls et, surtout, de désenclaver cette zone tant dépourvue.

D’après les témoignages des villageois, Ath Hamdoun continue de souffrir, en silence, de toutes sortes d’injustices. Pour eux, faire partie de la commune d’Aghbalou n’a servi, durant toutes les années passées et jusqu’à aujourd’hui, que pour l’adresse de résidence. Ils font appel, suite à cela, aux plus hautes autorités afin de trouver une solution à ce grand problème et pour mettre un terme à un régionalisme flagrant.

M. S.

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