«Le football féminin est en plein essor»

Partager

L’entraîneur de la sélection nationale parle de la situation du football féminin en Algérie, de la formation et des objectifs.

La Dépêche de Kabylie : Comment se déroule la préparation en altitude ?

Azzeddine Chih : Dans de très bonnes conditions. Le CNLS de Tikjda n’est plus à présenter, le personnel en place qui est extraordinaire, très disponible, des conditions de travail idéales. Cette première étape de préparation se passe en pleine nature, en altitude, dans le calme et loin de la pollution. Les joueuses bénéficient d’une bonne oxygénation et travaillent dans une totale concentration et sérénité. Cette première phase de préparation se fera en deux étapes, la première du 14 au 22 août. Après une pose de deux jours, la deuxième phase s’étalera du 25 au 31 août. Nous essayerons d’élargir le travail à l’endurance, à l’accompagnement mental et à plusieurs autres aspects. C’est aussi l’occasion de discuter avec les joueuses des lois et règles du jeu. Nous ferons tout pour atteindre notre premier objectif qui est la performance.

Vous êtes à la tête de la sélection depuis plusieurs années. Comment évaluez-vous le niveau de jeu des joueuses algériennes ?

Je dirais qu’il est en plein essor. Un plan de développement pour l’horizon 2020 a été tracé. Nous avons aussi ouvert plusieurs dossiers pour une meilleure organisation du football féminin. Dans quelques années, des avancées réelles seront atteintes, notamment dans le développement du jeu, tout ce qui est accompagnement et surtout la formation des coachs (entraîneurs et éducatrices) au niveau des écoles féminines. En principe, à partir de cette année, nous allons accompagner et assister matériellement les clubs qui vont créer des écoles féminines. On a les financements qu’il faut pour cette opération qui débutera en septembre ou octobre. D’autres actions suivront pour bonifier notre stratégie de développement du football féminin.

Pensez-vous que l’Algérie compte des joueuses qui peuvent rivaliser

avec le niveau européen ?

Le problème n’est pas là. Il faut savoir que tout est axé sur le volet formation de base. La joueuse européenne ou américaine, si elle a atteint le niveau qu’on sait, ce n’est pas par hasard, elles commencent à pratiquer le football dès leur plus jeune âge, dans des écoles de football. Leur niveau est le fruit d’un travail de longue haleine. Chez nous, les filles ne commencent à jouer qu’à15 ou 16 ans. Aujourd’hui, notre priorité ce sont les écoles de formation. Nous encourageons toutes les associations qui s’inscrivent dans cette optique.

Le football féminin est-il toujours tabou en Algérie ?

Non, ce n’est plus le cas. Au début, il n’y avait pas de structures pour accueillir les filles désireuses de jouer au football, ni d’éducatrices ni d’entraîneurs femmes formées. Aujourd’hui, il y a toute une organisation qui a été mise en place. Le dossier est bien ficelé. Et dans un avenir proche, nous commencerons à récolter le fruit du travail.

Que faut-il pour faire sortir le football féminin de sa torpeur ?

La priorité aujourd’hui est donnée à la formation des joueuses, des entraîneurs, des éducateurs et éducatrices. Elle est aussi donnée aux programmes et contenus des entraînements dans les écoles de formation. Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui, on compte trois catégories (U17, U20 et seniors), qui participent aux éliminatoires des compétitions internationales. Je vous parle non seulement en tant que sélectionneur national, mais aussi au nom de la FAF, la DTN, ainsi que la Commission du football féminin. Je parle en termes de département. Nous avons des joueuses très talentueuses dans les trois catégories. N’oubliez pas que nous avons pu rivaliser avec les meilleures équipes d’Afrique, des équipes mondialistes. Nous avons quand même battu, tout récemment, le Ghana, une des meilleures équipes d’Afrique lors de la phase finale de la coupe d’Afrique (1 – 0). En 2006, nous avons battu le Nigeria, qui était imbattable à cette époque-là. Sauf qu’il n’y a pas eu d’enchaînement. C’est justement ce qu’on veut faire aujourd’hui à travers les écoles de football féminin. La pérennité dans le travail s’impose. Dans un futur proche, on pourra rivaliser avec les meilleures équipes du monde,

Qu’est-ce qui bloque justement cet enchaînement ?

Rien, si ce n’est qu’on est arrivés trop tard. Aujourd’hui, on s’organise et on fait mieux que beaucoup d’autres pays du monde, je parle en connaissance de cause, car je connais le dossier football féminin à travers le monde. Nous sommes sur la bonne voie, c’est une question de temps. Nous avançons doucement mais sûrement.

Quel est l’objectif tracé pour la CAN-2018 ?

Il faut d’abord attendre le tirage au sort qui aura lieu au mois de septembre prochain. Là nous connaîtrons notre premier adversaire et nous nous préparerons en conséquence. Il s’agit en effet d’éliminatoires directes. Nous programmerons notre préparation comme nous avons l’habitude de le faire. Lors de la dernière édition, nous n’avons pas eu de chance, même si nous sommes sortis de la compétition sans perdre le moindre match. Nous avions disputé les deux matchs retour à plus de 2500 m d’Altitude ce qui n’était pas facile pour les joueuses. Malgré cela, elles ont fait montre d’une résistance admirable. Pas mal d’enseignements ont été tirés de cette élimination douloureuse : (1 – 0) et (1 – 1) face à l’Ethiopie lors du 1er tour, et (2 – 2) et (1 – 1) face au Kenya lors du deuxième tour. Les deux matchs disputés à Adis Abeda et à Nairobi les a néanmoins rendues très fortes. Malgré la très grande fatigue, elles ne se sont pas plaintes. Ce n’était que partie remise, nous essayerons de faire mieux cette fois-ci.

Entretien réalisé par M’hena Adjaout

Partager