Nouvel ordre mondial du foot

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Par Hassan Moali

Pascale Boniface, grand passionné du foot, a écrit un intéressant livre sur la géopolitique du football. Sur le terrain, il paraît bien difficile d’oser le parallèle. Mais dans la vraie vie d’un monde dominé par les puissants, le ballon roule aussi bien pour l’exploit sportif que pour le prestige de certaines nations qui en font un terrain de lutte d’influence et de guerre de positions. En restant sur ce registre, on est presque fondés à croire que Vladimir Poutine est en train de réussir à chambouler l’ordre mondial du…foot. Accueillir cette Coupe du Monde, malgré les coups tordus et la mauvaise publicité de l’Occident, est en soi un succès retentissant. Le Mondial russe a détruit tous les scepticismes. Il a réduit au silence la propagande nauséeuse qui mettait en doute la capacité de ce pays, clé de «l’axe du mal», à organiser une compétition de cette ampleur. Et au-delà de cette preuve matérielle, les dieux des stades russes semblent avoir jeté un mauvais sort aux grandes sélections qui tombent comme des mouches. L’Argentine, l’Espagne, l’Allemagne et le Portugal, qui régnaient jusque-là sur la planète football, ont quitté la Russie de Poutine la queue entre les jambes. Vaincus et humiliés dans la froideur d’un pays qui n’a pas froid aux yeux d’afficher un tableau de chasse aussi terrible à la face du monde. On est tenté de croire qu’il y a une sorte de malédiction qui s’est abattue sur les maîtres du monde du ballon, à Moscou. C’est tout le sens des Montagnes russes qui supposent un souffle fort et une résistance face à l’adversité. Il va sans dire que l’absence inédite de l’Italie et à un degré moindre des Pays-Bas, avait déjà donné un avant-goût d’une Vodka pas très savoureuse. Alors, sommes-nous en train d’assister à la naissance d’un nouvel ordre mondial du football ? Ça a tout l’air d’être le cas, quand on voit la chute des grandes puissances et la révolte des «prolétaires» déterminés à tirer leur épingle du jeu dans un environnement si propice à la révolution. La patrie de Lénine, qui donna naissance au communisme en poussant la Russie des Tsars dans les abîmes de l’Histoire, voudrait apparemment refaire le coup dans le foot. Ni Messi ni Ronaldo ni encore moins Muller et Iniesta n’ont impressionné, dans ce pays très peu sensible au beau jeu et où seul compte le résultat final. La Sbornaya de Russie a réussi à déjouer la Roja. Sans états d’âme et avec un détachement ‘’sibérique’’, les tâcherons de Stanislav Tchertchessov ont battu la sélection ibérique, au prix d’une résistance digne du stachanovisme. C’est dire qu’à ce stade de la compétition, le Mondial russe a donné des vertiges aux puristes et a été fatal aux sélections assises sur leurs douillettes certitudes. Tout n’est pas fini pour le spectacle, écrasé par le jeu rugueux de certaines équipes très physiques, fort heureusement. Le Brésil de Neymar, la Croatie de Modric, l’Angleterre de Kane et la Belgique de Hazard restent en course à notre grand bonheur. Rien ne garantit néanmoins qu’ils puissent résister à cette faune d’Ours polaires déterminés à sortir leurs griffes. L’appétit vient en mangeant, dit-on en français. En russe aussi sans doute.

H. M.

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