Par Abdennour Abdesselam :
A quelques semaines d’écart, deux grandes figures de la chanson kabyle, Mahmoud Wazza et Farida Tazzayrit, nous ont quitté discrètement sur la pointe des pieds. Appartenant presque à la même génération des années 50 /60 et ayant évolué au sein de la radio Chaîne Deux, ils ont chacun servi la chanson kabyle, et au-delà chacun dans son orientation artistique. Par le souffle, Mahmoud Ouazza est passé maître reconnu dans le jeu et l’entre jeu des sifflements de la flute. A travers sa voix, Farida Tazzayrit se lança directement dans la chanson. Elle a tantôt accompagné longuement des artistes à l’image de Chikh Arab Ouzellag, tantôt elle s’est exprimée dans un catalogue de ses propres compositions telles que : A yemma yemma ; A yemma yelli-m tehbel ou encore la plus célèbre, sous le tire, A ttir a mmis n lheã. Cette dernière traite d’une complainte face à un départ, hélas, inattendu et imprévu du compagnon de vie. Farida tazzayrit a également chanté en populaire aux côtés d’artistes de grand talent à l’exemple du chikh Ahesnaw. Mahmoud Ouazza pour revenir à lui, est cet auguste flutiste kabyle collé à elle sa vie d’artiste durant. Il sera de tous les orchestres avec lesquels se sont produits la plupart des anciens chanteurs plurilingues. Malgré son âge avancé il n’hésita pas également à rassurer et assister de nouvelles lumières qu’il servira plus dans la fonction d’arrangeur et d’équilibreur pour l’égalisation et l’harmonie des symphonies. Mahmoud Ouazza est né en 1924 au village Tighilt Imerghane Ighboulen dans le Arch de Guerradj n at Brahem à At wartilan. Il construisait et taillait lui-même ses flûtes faites de roseau de rivières et a appris à jouer de ses techniques auprès de son cousin pendant qu’ils menaient paître leurs chèvres sur les escarpements rocheux de la région. Mahmoud Ouazza était au programme des hommages prévus par la maison de la culture Mouloud Mammeri. Même avec sa disparition, l’événement aura certainement lieu avec cette différence de taille qu’il ne sera pas avec nous. Quel dommage que la mort est venue nous le happer brusquement, brutalement. Quant on pense que Dda Lmulud attirait notre attention qu’il nous fallait happer les dernières voix avant que la mort ne les happe…
Abdennour Abdesselam (kocilnour@yahoo.fr)
