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“On ne peut pas être juge et partie”

Le collectif des paramédicaux de l’EHS Fernane Hanafi de Oued Aïssi dénonce ce qu’il qualifie d’ «injustice» et de «purge» au sein de l’établissement mais aussi le climat «délétère» qui y règne après la découverte du corps d’un patient pendu à un arbre. Le même collectif qui s’élève contre la suspension de deux agents de sécurité interpelle le ministre de la santé pour diligenter une commission d’enquête d’experts «pour définir les responsabilités» dans cette mort tragique.

L’EHS en psychiatrie Fernane Hanafi de Oued Aïssi n’en finit pas de vivre les soubresauts d’une crise qui ne dit pas son nom, née de la tragique découverte du cadavre d’un patient complètement momifié pendu à l’intérieur même de l’établissement.

Deux faits saillants ont marqué l’actualité de ces derniers jours au niveau de ladite structure de santé publique. Deux suspensions jugées «abusives» de deux ouvriers et une déclaration incendiaire signée du collectif des paramédicaux de l’établissement dans laquelle est dénoncé le climat de «peur, fuite de responsabilité représailles et abus d’autorité». Dans une déclaration dont La Dépêche de Kabylie détient une copie, le collectif des paramédicaux de la psychiatrie de Oued Aïssi a dénoncé ce qu’il qualifie d’«incompétence de l’administration» et de la «commission d’enquête» mise en place au lendemain de la macabre découverte du patient Hocine, retrouvé pendu plusieurs dizaines de jours après sa mort, à l’intérieur de l’enceinte de l’établissement. Pour les rédacteurs de la déclaration, plusieurs «irrégularités» ont caractérisé l’enquête interne menée pour établir toute la lumière sur ce drame «la commission a passé sous silence l’erreur médicale» et signaler le fait que deux responsables de ce tragique événement soient désignés en qualité de membres de ladite commission. «On ne peut pas être juge et partie à la fois !», font-ils remarquer. Le collectif des paramédicaux dudit établissement s’étonne, dans ce sillage, que ces deux responsables cités nommément dans le document «jouissent d’une immunité en tant que membres de la commission d’enquête interne engagée par le chef de l’établissement». Les rédacteurs de la déclaration estiment que dans le «vacarme» qui a suivi la macabre découverte, les responsables ont tout fait pour chercher des boucs émissaires «alors que les services d’hospitalisation étaient en sureffectif (80 malades) pour trois infirmiers durant toute la période d’été les sanctions (suspensions, mises à pied et avertissements) sont tombés à flot sur les infirmiers débordés par le travail, le dîner, le traitement, la surveillance des suicidaires et toxicomanes, les va-et-vient sur l’ensemble des chambres dont l’infirmier qui n’était pas présent au moment du drame, qui a évacué un malade au CHU pendant des heures, se retrouve suspendu», lit-on sur le document transmis aux hautes autorités de la santé de la wilaya mais aussi au ministère. Un document qui met le doigt sur un autre fait qui pourrait servir d’élément incontournable pour comprendre ce qui s’est passé réellement et les causes réelles qui ont induit au drame. Il s’agit d’une probable rétention de l’information, évoquée par le collectif des paramédicaux. Selon ce dernier, le rapport de fugue établi en matinée du 14 août n’a pas été transmis au directeur. «Nous dénonçons l’abus d’autorité du chef d’établissement à notre égard», un responsable accusé de «soumission» à un médecin qui ne cherchait qu’à “sauver sa peau face à une erreur médicale grave”et qui fait de la fugue “une sortie contre avis médical”. Cette situation et ce contexte « délétère » cumulent «paradoxalement» avec des conditions de travail que les paramédicaux de la psychiatrie jugent tout simplement «invivables» et «inacceptables». «Le personnel infirmier très réduit subit le parcours du combattant dans les services en se faisant massacrer et blesser par armes blanches tous les jours sans dire un mot par acquis de conscience», ajoutent les rédacteurs de la déclaration. Face au mutisme de l’administration que nous avons tenté vainement de joindre, le collectif des paramédicaux s’interroge sur les raisons qui se cachent derrière la non-affectation d’infirmier à l’EHS. «Nous nous demandons pourquoi aucun infirmier n’a été affecté à l’EHS depuis quelques années alors que le DSP (directeur de la santé publique) a été informé du manque considérable d’effectif», regrettent les rédacteurs de la déclaration, qui demande l’intervention du ministre de la Santé pour réparer cette «injustice» à travers une «commission d’enquête d’experts» qui déterminera les responsabilité s dans la mort de T. Hocine, natif de Tadmait. Par ailleurs, dans une requête adressée au wali de Tizi Ouzou et dont La Dépêche de Kabylie détient une copie, deux ouvriers exerçant en qualité d’agents de sécurité au sein de la psychiatrie Fernane Hanafi, dénonce le caractère « abusif» de la décision de suspension de 45 jours prononcée à leur encontre, prise pour avoir quitté l’hôpital et acheté de la nourriture pour un collègue diabétique et hypertendu pendant un quart d’heure». Les deux ouvriers expliquent, dans leur requête, que « nous avons reçu des demandes d’explication ou nous lui avons expliqué le motif tout en présentant des excuses par respect en sa qualité de premier responsable, sa décision était ferme en nous suspendant pour abandon de poste sans pour autant qu’un rapport ne soit établi par notre chef d’équipe et l’administrateur de garde tout en nous laissant en poste pour 24 heures». Les rédacteurs du même document ont estimé que cette sanction est «arbitraire, d’abus d’autorité et sans fondement réglementaire». Ainsi, tout porte à croire que le conflit né d’une macabre découverte s’envenimera de plus en plus et il n’est pas du tout écarté d’assister à d’autres rebondissements notamment avec les conclusions de l’enquête menée par la brigade de gendarmerie d’Irdjen.

Omar Zeghni

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