Le village Ivehlal, dans la commune d’Aghbalou vit depuis plus d’une semaine au rythme de «Tvitha N’Djeddi BahloulOuassem», le saint homme du village. Un rituel perpétré durant pratiquement tout le mois de Moharrem qui coïncide avec l’Achoura.
Ce village de marabouts sort de sa léthargie et marasme durant toute cette période, par le retour des voitures, bus et fourgons pleins de familles étrangères au village. Les portes de la mosquée qui porte d’ailleurs le nom du saint homme sont grandes ouvertes pendant tout ce temps la. Le jour de l’Achoura, le village est saturé par la formidable procession humaine émanant des villages voisins et même lointaines à l’instar d’Akbou, Ighil Ali, Ain El Hammam, Ath M’likeche, Takerboust etc.….. Comme a l’accoutumée c’est tout le village qui est mobilisé y compris les jeunes. Tout le monde s’implique à sa manière pour prêter assistance. Un comité de vigilance est mis sur pied et se charge de l’accueil et orientation des (imzouyars) visiteurs, dont des habitués, pour solliciter la bénédiction du saint homme, qui pour un parent malade, une fille célibataire pour qu’elle puisse trouver une âme sœur, pour le retour d’un être cher qui a quitté la maison pour… immigrer !, la chance……. Chacun son souci, son vœu. Parmi ces gens, plusieurs sont déjà venus. Certains parlent de miracles, des vœux exaucés et reviennent juste pour vénérer et prêter louange au saint homme, après que leur vœu soit exhaussé. La cérémonie se déroule dans la grande salle construite par les villageois eux-mêmes, une grande bâtisse qui jouxte la mosquée, tout au fond, un agraw composé de sages et d’un imam assis sur un grand tapis, d’une voix aussi forte à vous donner la chaire de poule, prient. Des familles et autres se succèdent chacun son tour, dans une très bonne organisation pour recevoir la prière et la bénédiction. Comme le veut la tradition, un couscous est servi pour tout le monde, hôtes et les villageois sont conviés à un plat convivial autour d’une très bonne ambiance spirituelle et religieuse. Il y en a même qui passent quelques nuitées, des nuits bien rythmées par le son du bendir et les chouiks d’hommes et de femmes, c’est pour chasser les esprits maléfiques, nous dit- on. Cela dure jusqu’à une heure tardive de la nuit. Ce rituel ancestral légué par les aïeuls du village depuis la nuit des temps, depuis que les sages du village Ivehlal ainsi que tant d’autres marabouts interviennent pour régler les conflits les plus compliqués dans toute la région de Kabylie. Aujourd’hui, les jeunes qui ne s’impliquent pas dans les affaires du village, se mettent de parti au diapason de cet événement, qui ne cesse de prendre une proportion grandissante à la hauteur de la réputation du village. Toutefois, Timechret, le grand jour du sacrifice n’est jamais organisée le jour de l’Achoura, mais ultérieurement. Tout le monde est mobilisé et se focalise pour la réussite de Tvitha N’Djeddi Bahloul Ouassem. Une fois l’événement terminé une journée est arrêtée par le comité du village avec la concertation des chefs de familles pour statuer sur une date, un Aberrah (Crieur) appel aux villageois à travers le haut-parleur de la mosquée pour donner la date de Timechret afin de permettre aux familles d’inviter les leurs résidant ailleurs pour se rendre au village le jour J. Ce jour là des dizaines de veaux et de moutons sont égorgés, des parts de viandes sont partagées à l’ensemble des familles du village, même ceux qui n’en sont pas originaires. Tout le monde aura sa part sans distinction, tout cela se déroule dans une ambiance bon enfant, c’est une occasion de retrouvailles entre familles et amis.
Rayane B.

