Le 14 mars dernier, la wilaya de Bouira, à l’instar des autres wilayas du pays, commémorait la journée nationale des handicapés.
A cette occasion, nous avons rencontré M. Bessaoudi Hocine, président de l’association El Irada, (la volonté), dédiée aux handicapés atteints de cécité. Ainsi, c’est dans un bureau miteux, et c’est le moins que l’on puisse dire, car situé au premier étage de l’ancienne gare routière de Bouira, au milieu des détritus en tout genre, que notre interlocuteur nous a donné rendez-vous. : ‘’Vous voyez la considération que les autorités ont pour nous ! Ils nous ont parqués dans un bureau minable, cela dénote du mépris qu’ils ont pour notre frange’’, notera M. Bessaoudi. Questionné au sujet d’éventuelles doléances faites aux autorités concernées, notamment le P/APC de Bouira, le président de cette association, dira avec amertume : ‘’Ce local aussi déplorable soit-il, nous l’avons arraché à force de demandes à répétitions et autres requêtes adressées au maire de Bouira’’, a-t-il précisé avant d’ajouter : ‘’Tenez-vous bien, ce maire a fait montre d’un certain dédain envers nous, en nous signifiant textuellement qu’avec ce local, nous devrions nous estimer heureux. C’est un comble !’’, s’est-il exclamé. Concernant les moyens mis à la disposition de cette association, afin qu’elle assure ses tâches, à savoir l’aide aux personnes atteintes de cécité en leur fournissant du matériel adéquat (cannes, livres traduits en braille, ordinateurs prenant en charge la fonction braille …etc.), notre vis-à-vis, a tenu à dénoncer ‘’l’abandon’’ dont ils sont victimes de la part des pouvoirs publics. ‘’Depuis 2010, on n’a reçu aune aide ! Nous sommes livrés à nous-mêmes. D’ailleurs, on nous a promis une enveloppe de 100.000 Da, mais à ce jour, nous sommes toujours dans l’attente’’,-a-t-il expliqué. Avant d’enchaîner : ‘’Nous subsistons grâce aux dons de quelques mécènes, que Dieu les bénisse !’’. S’agissant des offres d’emploi, proposés à cette catégorie de la population, M. Bessaoudi, affirmera que : ‘’ Rien n’a été en faveur de l’insertion en milieu professionnel des non-voyants’’. Pour rappel, la législation en vigueur impose aux entreprises privées et publiques, de réserver 1% de postes à pourvoir au profit des handicapés. A ce sujet, le président de l’association dira : ‘’Si au niveau des 45 communes de la wilaya, on engage un standardiste, cela fera 45 chômeurs de moins ! Je le dis et j’assume mes propos, les autorités concernées se moquent de nous !’’. D’ailleurs, sur ce point, il demande à ce que ce pourcentage soit revu à la hausse avec 5% des postes, dont le 1/3 pour les non-voyants. Au cours de cet entretien, une jeune dame atteinte de cécité a fait son entrée au bureau de cette association. C’est une diplômée de l’ENS, en quête d’emploi, elle était venue, dans le but de s’acquérir des ‘’nouvelles’’ concernant d’hypothétiques offres d’emploi. Mais hélas et à son grand regret, ‘’Rien de neuf à l’horizon’’, lui rétorquera M. Bessaoudi. Cette handicapée, titulaire d’un diplôme d’enseignante n’a pas mâché ses mots à l’égard des autorités et ce qu’elle a qualifié de ‘’ ségrégation’’, vis-vis des non-voyants de Bouira et d’ailleurs. ‘’Cela fait 10 ans que je chôme ! Pourtant mon diplôme devrait m’ouvrir les potes de l’enseignement, car, il est équivalant à celui d’une personne valide ! Cependant, c’est loin d’être le cas’’, a-t-elle attesté. Et de poursuivre d’un ton grave : ‘’ Le pire est qu’à l’académie de Bouira, on m’a proposé d’aller à Constantine, dans le but de faire une formation de simple éducatrice ! C’est une injure à ma personne et à mes études !’’. Avant de conclure d’une phrase qui en dit long sur sa détresse : ‘’C’est l’Etat qui est atteint de cécité !’’. M. Bessaoudi rebondira sur le sujet en disant : ‘’La wilaya de Bouira, compte plus de 2 080 non-voyants dont plus de 60% sont diplômés…Mais chômeurs !’’. Enfin, notre interlocuteur a souhaité lancer un appel au premier magistrat de la wilaya, afin qu’il se penche sur le cas des handicapés en général et des non-voyants en particulier : ‘’Nous souhaitons interpeller M. le wali sur notre situation précaire et l’inciter à prendre des mesures concrètes en notre faveur, car il y va de notre dignité et cette dernière n’a pas de prix !’’
Ramdane B.