“Rester à l’écoute de la base”

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La tête de liste MPA de la wilaya de Béjaïa aux prochaines législatives, Mme Dalila Aoudj, est militante de longue date dans le

mouvement féminin, et a suivi une formation sur la réception et l’orientation des femmes en détresse, elle préside l’association Rachda à Béjaïa et en est vice-présidente au niveau national.

La Dépêche de Kabylie : Vous êtes tête de liste MPA aux législatives pour la wilaya de Béjaïa. Un premier commentaire ?

Dalila Aoudj : En fait, si je suis tête de liste, c’est par rapport à mon parcours de militante et pas seulement pour mon statut de femme. Aussi, je ne suis pas tête de liste parce que je fais partie du quota des 30 %. Pas du tout. Mais c’est par rapport au parcours que j’ai effectué pendant plus de 20 ans de militantisme, du moins je le pense.

Quelle appréciation portez-vous justement sur le quota de 30 % réservé aux femmes ?

Je pense que depuis 50 ans d’indépendance où jusqu’à la dernière APN, la représentativité des femmes n’est que de 7.7% seulement, donc quelque part, il y a défaillance des partis existants. Une grande défaillance ! Ils n’ont pas du tout investi dans l’élément féminin et à chaque échéance électorale on se souvient qu’il y a les femmes qui représentent 50% de la population et qu’elles peuvent apporter un plus, et on se rappelle alors le sacrifice qu’elles ont consenti pendant la guerre de libération nationale et la décennie noire. Alors, on se souvient de cela aux échéances électorales mais en aucun cas ils n’ont fait un travail de fond pour former les militantes des partis politiques. En ce qui concerne notre formation MPA, en 2004 déjà dans notre congrès constitutif, au moins la moitié de notre effectif était des femmes. Dans notre formation politique, c’est une conviction : la femme est un élément essentiel. Dans la politique générale de notre pays, il n’y a pas de femmes qui participent aux grandes décisions, il n’y a pas de femmes PDG. Maintenant on parle de quotas de 30, 40, 50%, c’est bien. Mais réellement, la volonté politique manque. C’est un départ. Jusqu’à ce que certains disent que c’est une discrimination. Moi je dirais plutôt que c’est une discrimination positive parce qu’il faudrait que la femme passe par ce combat là pour quelle puisse se former. Mais c’est une période qui doit être transitoire jusqu‘à ce qu’il y ait un équilibre, mais tant que le code de la famille existe, l’équilibre n’existera pas. Pourquoi ? Parce que les réunions se font tard et la femme a des obligations familiales, des enfants. Elle a plus d’obligations familiales que l’homme et concernant ce point précis, le code de la famille est une violation de la constitution. Même si dans le monde du travail elle essaie de s’accrocher, elle n’accède que très rarement aux postes de responsabilité.

Peut-on connaître quelques-unes des motivations qui vous ont poussée à briguer un mandant de députée ?

L’objectif essentiel, c’est de faire porter là où il faut la voix des femmes et la voix des citoyens, parce que je ne serais pas députée seulement pour les femmes, mais c’est pour tous les citoyens de Béjaïa d’abord et tous les citoyens à l’échelle nationale. L’essentiel est donc de garder le cordon ombilical avec la base. Parce que 50 ans après l’indépendance du pays, les députés de notre région ont toujours été défaillants. Et là si je suis élue, je mettrais un point d’honneur de garder le lien avec la base et de porter la parole du citoyen à l’APN, et ce qui me motive le plus, c’est de la défendre partout où cela est possible. Et là ce serait un couronnement du parcours effectué. Et si jusqu’à présent, je n’étais qu’une militante, là en tant qu’élue, je disposerai de moyens pour défendre efficacement l’avis des citoyens.

Pouvez-vous citer quelques points du programme de votre parti ?

Nous sommes des démocrates républicains, ça c’est clair. Nous aurons à installer un projet de société moderne, ouvert sur le monde tout en gardant nos valeurs de l’algérianité et c’est là notre slogan. Notre politique est de garder ce thème d’algérianité.

Qu’est-ce que vous ou votre parti comptez apporter de plus à ce qui existe déjà vu que dans ce pays, les députés sont réduits au rôle de seulement approuver les décisions du gouvernement ?

Je crois que la législature qui se prépare marquera un virage important dans l’histoire de notre pays. Pourquoi ? D’abord parce que cinquante ans après l’indépendance, c’est le moment de dresser le bilan de ce qui a été fait, ensuite, les députés qui seront élus auront la lourde tâche de réviser la constitution qui est la loi fondamentale du pays. Et surtout ne pas oublier qu’en ce moment, la tendance est aux islamistes, pour s’en convaincre, il n’y qu’à voir ce qui se passe chez nos voisins les Tunisiens. Et il y a risque de voir le travail de combien d’années tomber dans l’obscurantisme à cause des islamistes. Donc la première chose à faire, c’est de faire barrage aux islamistes. C’est pour ça que les citoyens, les partis politiques et l’Etat algériens disent que c’est très important que les gens aillent voter pour les républicains, les nationalistes, qu’importe, l’essentiel est qu’il y ait un fort taux de participation. Le challenge pour les nouveaux partis politiques est de rétablir la confiance des citoyens dans le politique, de moraliser la politique, de faire de la politique honnête. Il faut de l’honnêteté et de la moralité politiques pour rétablir la confiance des citoyens dans les institutions. Les gens ont tellement été déçus par la politique menée par le parti unique de l’indépendance à 89 et de 89 à ce jour par les divers partis, que maintenant ils ne croient plus à rien. Il ne faudrait pas oublier que nous avons vécu la décennie noire et qu’il ne faudrait en aucun cas que cette période revienne. Il ne faut pas que les islamistes, que nous avons vaincus militairement, reviennent politiquement dans les institutions.

Quelle analyse faites-vous du fait que les républicains et les démocrates partent en rangs dispersés alors que les islamistes s’organisent en coalition ?

Les islamistes utilisent l’islam à des fins politiques, c’est-à-dire pour arriver au pouvoir. Et c’est ça qu’il faut remettre en cause. Pour nous l’islam c’est quelque chose de personnel, c’est l’esprit, c’est le cœur. Il y a des lieux pour ça, c’est la mosquée. La politique c’est autre chose, c’est un domaine réservé aux politiciens. Cela n’a rien à voir avec l’islam. Pour l’alliance des démocrates, depuis 2004, notre secrétaire général Amara Benyounes n’a eu de cesse de faire appel à un pôle démocratique et républicain, il n’arrête pas de le répéter à chacune de ses sorties pour que les démocrates et les républicains s’unissent pour battre les islamistes. Donc, l’idée existe mais la volonté d’autres partenaires politiques reste encore à concrétiser.

Entretien réalisé par B. Mouhoub

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