Comme à l’accoutumée, chaque 8 avril, Seddouk rend hommage à son enfant prodige, l’érudit cheikh Aheddad, président de la Tarika Rahmania de 1857 à 1873, qui a lancé un certain 8 avril 1871 au marché de Seddouk, un appel aux masses paysannes pour rejoindre l’insurrection contre l’armée coloniale lancée par Mohamed El-Mokrani un mois auparavant. Seddouk est devenu donc, vendredi passé un lieu de pèlerinage pour environ un millier de fidèles (Khouanes), venus de plusieurs villages de Tizi-Ouzou et d’Alger.
Ils sont arrivés la veille en voitures et en bus avec des denrées alimentaires et bagages. Logés dans la maison du Cheikh, ils ont fait la fête toute la nuit en récitant des chants religieux et ils ont préparé le repas du lendemain, servi à volonté aux nombreux visiteurs qui affluèrent toute la journée pour visiter les possessions de Cheik Aheddad et demander, par la même, sa Baraka. Le village de Seddouk Oufella avait du mal à contenir tout ce beau monde. L’édifice le plus visité reste le mausolée, récemment construit par les pouvoirs publics avec des matériaux sophistiqués et l’édifice assorti d’une architecture moderne dans un cadre purement religieux. L’intérieur comprend une grande salle servant pour l’exposition des objets d’art ancien et d’ouvrages traitant du parcours du Cheikh. Une grande salle où les ossements de Cheikh Aheddad et ses deux fils reposent dans des tombes alignées l’une à l’autre. En surélévation, une grande terrasse donne une vue imprenable sur le flanc est du Djurdjura et de la haute vallée de la Soummam. A côté du mausolée, c’est l’école primaire du village, transformée ce jour-là en un lieu de réception des convives pour le déjeuner. Ensuite les visiteurs se rendirent à Takhelouit. C’est le lieu où Cheikh Aheddad recevait de son vivant les visiteurs. Elle est composée de deux minuscules pièces plongées dans la pénombre. Takhelouit est le premier édifice restauré dans son style original par les pouvoirs publics en utilisant des matériaux anciens tels que les ardoises récupérées des friables. Comme la cour qui accueillait les pèlerins est exiguë,; il faut vraiment s’armer d’une patience et attendre son tour pour accéder à Takhelouit. Le dernier édifice à recevoir les visiteurs reste l’ancienne mosquée où Cheikh Aheddad a reçu les premiers jalons de son instruction. Et c’est là aussi qu’il a entamé ses premiers pas dans l’enseignement en fondant une Zaouia qui n’a pas tardé à se hisser en un grand institut islamique où sont formés des étudiants venant des quatre coins du pays. Profitant de cette occasion, en parallèle à la célébration du 141e anniversaire de l’insurrection d’avril 1871, il a été procédé dans la même journée à l’inauguration d’un cimetière de Chouhada, récemment construit. Pour en savoir plus, nous avons consulté Battache Ali, principal organisateur de cette manifestation qui nous a donné ses impressions. «Je salue vivement les Khouanes qui perpétuent la tradition en ne ratant jamais l’occasion pour venir honorer de leur présence chaque manifestation organisée en hommage à Cheikh Aheddad. Un tel événement mérite le soutien de tout le monde, notamment des institutions étatiques. Car même si on ne l’a pas médiatisé par faute de moyens, nous avons reçu beaucoup de monde, les gens viennent sans qu’ils ne soient invités», a-t-il expliqué. Continuant dans le même ordre d’idées, il revendique un musée pour la sauvegarde des ouvrages écrits par le Cheikh et ceux qui ont été écrits sur lui. «Il y a tellement d’ouvrages laissés par Cheikh Aheddad ou écrits sur lui qu’un musée s’impose pour rassembler en un seul lieu ces ouvrages et les mettre à la disposition du public. Le projet existe depuis belle lurette, mais il tarde à être réalisé», a-t-il ajouté.
L. Beddar

