Boudjemaâ Haichour, l’un des initiateurs du mouvement de protestation, ex ministre des Télécoms et membre du comité central du FLN, estime que Belkhadem est en train de flouer son monde. Son but premier est, en fait, la présidentielle de 2014, laquelle alimenterait particulièrement son ambition politique. “Belkhadem n’a rien à faire des élections législatives”.
La Dépêche de Kabylie : Actualité oblige, et au moment ou l’Algérie pleure celui qui fut son premier président, peut connaître vos impressions sur le parcours de l’homme qui vient de s’éteindre ?
Boudjemaa Haichour : Un grand homme vient de nous quitter. Un homme qui a consacré sa vie militante au service de l’Algérie. Son aura dépassait les frontières du pays, au point d’être écouté et respecté partout dans le monde. Si Ahmed, Que Dieu l’accueille en son vaste paradis, fut celui qui a pris les rênes du pays dans des moments extrêmement difficiles. Et voilà qu’il nous quitte à un moment ou nous vivons dans un contexte géopolitique véritablement sensible. Ben Bella que j’ai rencontré à deux reprises (une première fois chez lui et la seconde chez moi), m’a laissé cette nette impression de quelqu’un qui maitrisait les mutations du monde. De plus, il était, malgré son âge, relativement avancé d’une lucidité fondamentalement très pointue. Nous avions échangé nos points de vue en rapport avec la situation que traversait le pays et l’ensemble des questions régionales et internationales. Et j’avoue, par là que j’ai passé en sa compagnie des moments très enrichissants. Il fut un géant de son siècle (au-delà de toutes les contingences de l’Histoire). Les générations s’en rappelleront car il a marqué l’histoire de l’Algérie d’une encre indélébile. J’avais 13 ans lorsqu’il accédait à la magistrature du pays. Je m’incline très respectueusement en sa mémoire et j’implore Dieu de lui accorder sa sainte miséricorde.
Revenons, si vous le permettez, aux questions de l’heure, à savoir la situation qui prévaut au sein du FLN. Vous nous avez déclaré récemment qu’une direction collégiale allait être installée samedi pour gérer les affaires du parti et par là même préparer la compagne électorale dont le coup d’envoi sera donné dimanche.
A cet effet, nous est-il possible de connaître ceux qui y siègeront ?
Tous ceux qui me connaissent vous diront que je suis un homme qui croit beaucoup aux vertus de la démocratie. Et ce faisant, je suis de ceux qui ont pris leurs responsabilités. J’ai pris à témoin nos militants et l’opinion internationale. J’ai fait des déclarations compte tenu de cette trahison sur le plan politique et j’ai demandé en mon âme et conscience le retrait de confiance à Abdelaziz Belkhadem. Tout de suite après, il s‘en est suivi une adhésion à cet appel et nous avons commencé à collecter des signatures des militants et des membres du comité central pour demander légalement le départ de ce dernier de la tète du parti du FLN. Belkhadem, rusé qu’il est prit le soin de cadenasser tous les bureaux du siège du parti. Et c’est dans un bureau de 3 mètres carrés qui me servait de lieu travail en ma qualité de Membre du CC et directeur des études et analyses au FLN ( Think Tank) qu’on a fait le reste de la collecte de signatures demandant son départ. A partir de là les choses sont allées très vite. La levée de boucliers des Kasmas et des Mouhafadhas qui ont décrié les listes établies par Belkhadem et ce une heure avant la clôture des listes. Quand ils ont vu ces listes, ils se sont rendus compte qu’ils ont été floués. Ils ont trouvé des listes de candidats sans rapport avec le parti. Des indu-occupants, et des nouveaux riches dont les sources de l’enrichissement restent évidement douteuses, « Shab Ch’kara », pour reprendre une expression très galvaudée. Le QG étant fermé par qui vous savez, de peur évidement de voir les rangs de la contestation s’amplifier, nous avons alors opté pour une Mouhafadha acquise à notre cause pour nous réunir. Ceci fut un acté politique très fort. Pour ce qui est de l’acte statuaire, nous avons décidé de nous réunir samedi( ndlr : entretien réalisé vendredi) au sein de la Mouhafadha d’El Harrach. A partir de là s’il s’avère que le décompte des signatures est atteint, comme le veut l’article 37 de la loi organique, à ce moment là il ne nous restera qu’à demander le retrait de confiance. Et pour donner un caractère légal à cette action, il a été décidé de faire assister un huissier de justice pour constater de la justesse des arguments mis en avant. De toutes manières, pour moi et ceux qui partagent mes opinions, Depuis le 9 avril, date de la tenue de la rencontre dans la cour du siège, Belkhadem, en sa qualité de secrétaire général du FLN relève désormais du passé. Un directoire sera alors installé pour gérer les affaires courantes, préparer la campagne électorale, et si des militants sont intéressés, ils ont tout à fait le droit de postuler, pour peu que cela se fasse dans la transparence et la clarté. Loin de tout leader-ship ou « zaimisme ».
Mais, Belkhadem, en réaction à toutes ces manœuvres a défié les frondeurs en leur assénant ceci : «ayez le courage de publier votre liste dans la presse si vous avez réellement obtenu le quorum pour l’organisation d’un Comité central extraordinaire».
Oui j’ai appris ça à travers la presse, mais sachez une chose : Ce personnage qui a de tout temps géré le parti par des méthodes infâmes veut, à travers cette déclaration qui ne l’honore pas, « acheter le silence » avec l’argent qu’il a amassé de manière très douteuse Mais nous ne sommes pas tombés dans son piège. Nous savons qui il est et connaissons parfaitement ses méthodes.
Vous serez candidat à la succession de Belkhadem ?
Oui naturellement, mais avant cela, j’aimerais être proposé par mes pairs ou la base militante pour que ma candidature ait davantage de crédibilité. Vous savez, mon parcours militant plaide largement pour moi. Je suis viscéralement convaincu qu’il faut un nouveau souffle au FLN. La deuxième génération post-indépendance, celle des réseaux sociaux, Facebook, Twitter est en droit d’exiger qu’on fasse avec eux. Et vous me voyez tout à fait d’accord pour que ces jeunes prennent les rênes du pays. Aujourd’hui à l’âge de 60 ans, je suis de ceux qui ont propulsé Ali Benflis au poste de secrétaire général du parti. Je suis fondamentalement fidèle au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, et je suis militant du FLN depuis les années soixante-dix. C’est vous dire que bien des militants au sein du FLN envieraient mon parcours. Pour toutes ces raisons, je suis, par conséquent en mesure de me porter candidat et de diriger le FLN avec l’aide de Dieu et des militants. Sur un autre registre, j’aimerais rajouter que je suis un homme qui a une vision identitaire qui se définit comme suit : Amazighité Islamité et arabité.
Interview réalisée par Ferhat Zafane

