Comme toute association culturelle qui se flatte de proposer un produit de manière à honorer les objectifs qu’elle s’est fixé, la Fondation Lounès Matoub se préparait à diffuser un travail artistique conçu en DVD, riche par son contenu et soigneusement travaillé sur le plan technique. Intitulé Igoujilen, au nom des orphelins de la fragrance Rebelle de nos montagnes si précieuses au rebelle trahi, le contenu met en exergue l’emblème national sur lequel apparaît indubitablement le symbole Amazigh. Une fresque qui s’ouvre sur l’immense espoir que nourrissent les voix pleines d’humanité, celles de nos femmes embaumées d espérances dans des chemins semés d’embûches aux côtés de nos hommes qui se battent pour que disparaissent à jamais le germe de la discorde et de la perfidie. Cette traversée de la poésie s’offre comme une image saine, dépouillée de tout parasite sectaire et infécond. Une floraison de voix aux couleurs méditerranéennes, portées par Hubert Félix Thiefaine, le trio Soledonna, Amina, Chérine, Jura, Karima, Baâziz, Ahrès, Mesbahi, MBS, Adjroud, Berrahma, Hamid Matoub. Ils ont su maîtriser leur talent pour redonner vie à El Hasnaoui, El Anka, Slimane Azem, Kamel Messaoudi, Moh Saïd Oubelaid, Mahboubati. Autour de l’auteur de Kenza, tous ces artistes venus d’horizons divers ont voyagé sans visa dans la Kabylie (celle de Matoub), enchantés d’apporter à travers elle, soutien et amitié aux enfants d’Algérie. Le DVD n’accompagnera pas les veillées du Ramadhan cette année. Il a été freiné, menacé de non-parution. La haine sabre tout ce qui a trait à l’image du Rebelle en s’octroyant iniquement l’excuse d’une bataille contre le commerce de sa mémoire. C’est brillant et abject à la fois. Bigrement malins et bourrés de références à l’esprit financier arbitrairement – voire tendancieusement- mis en relief, nos ennemis tentent d’éloigner de la Fondation toute sympathie. Et il est vrai que de ce côté, ils nous ont lésé.Ce procédé est un des principaux ressorts de leur fiction dont ils usent pour étouffer une des revendications des plus légitimes à savoir Matoub a été tué par qui ? comment ? et pourquoi ? Sinon, soyons responsables et sérieux. Au nom de quelle vertu, au nom de quel principe, une association qui ne bénéficie d’aucune subvention et soumise à des charges faramineuses peut-elle s’enorgueillir de distribuer gratuitement un travail conçu par des professionnels qui l’ont enrichi d’une grande qualité technique ? Cette entreprise vient d’être, cette fois-ci, cérémonieusement reprise par Malika Domrane qui, de connivence avec Nadia Brahmi, veuve de Lounès, donne un assaut irréfléchi à notre projet. Grimées en femmes mûres, sûres de leur mise commune, les deux femmes saisissent la Fondation par l’intermédiaire d’une avocate parisienne pour interdire la parution du DVD en question.Malika Domrane, la sœur spirituelle de Lounès, refuse que « La fondation se serve de son image filmée au Zénith 95 interprétant un duo avec Matoub Lounès ».En effet, ce projet comporte une séquence dans laquelle Malika, invitée à l’occasion, chante Assaru aux côtés de Lounès confiné humblement dans le contre-chant. Une séquence qui ne peut que lui servir et dont elle se révélerait plus haute si ce n’est l’entrée en scène des hargneux manipulateurs. Peut-être, a t-elle supposé une maladresse de notre part ? Cela pouvait être réparé si elle avait fait l’effort. N’empêche, elle a cru bon de nous réserver une désillusion et un gâchis au grand dam de tous ces artistes qui ont confié leur souffle à la mémoire du vecteur de notre culture, Lounès Matoub.Quand à Nadia Brahmi, ce n’est pas la première fois qu’elle commet une incartade qui modifie- force est de le penser- les chiffres de la bourse que les Staline d’aujourd’hui se font un devoir de lui attribuer… pour peu qu’elle contrarie la mémoire de Lounès, en maltraitant son âme, en brutalisant sa grandeur, en malmenant sa mère dont elle disait dans son livre qu’elle » louait ses bras aux villageois les plus aisés « . Voilà à quoi est réduite la mère courage Na Aldjia par Nadia fille, dit-elle encore, de parents possédant « une troisième maison si vaste qu’elle donnait le tournis ». A lire et à entendre Nadia Brahmi, qui tait jusqu’à présent les circonstances de l’assassinat du Rebelle dont elle a été témoin, on ne peut qu’endurer, désabusés, les accrocs du dégoût que provoque en nous l’addition des délires, des complexes et les instincts longtemps refoulés d’une inconnue subitement éclairée par l’auréole d’une légende. Elle use de la grandeur de son mari pour se tisser une intelligence avisée des expériences des plus compliquées. Dans son bouquin, elle commet d’autres articles, en page 27 : « J’ai découvert le monde en écoutant Lounès Matoub, j’avais deux ans… » !!!. « Il arrive aux aigles de s’abaisser au niveau des poules mais une poule ne peut jamais atteindre la hauteur d’un aigle ».L’avocate de Nadia- également celle de Malika Domrane- a pour mandant le producteur avec lequel la famille de Matoub a entamé une procédure judiciaire pour lui interdire d’exploiter les œuvres de Lounès, sans contrat ni autorisation des héritiers, Nadia y compris. Le dit producteur s’était, en outre, arrogé le droit de substituer “Le Maghreb en musique” à “Au nom de tous les miens..” Mais à force de n’intervenir dans ce qui touche au nom de Matoub que pour être rémunéré, on se taille évidemment une réputation de mauvaise héritière ; la veuve spoliée de ses droits et le producteur fraudeur se retrouvent main dans la main avec inévitablement des entorses à la conscience.En ce qui nous concerne, notre serment reste le même, nous poursuivrons, dans la dignité, notre tâche qui n’est autre que de préserver, protéger et pérenniser la mémoire de Lounès, n’en déplaise aux ennemis de la culture qui « peuvent nous tuer et venir nous rendre hommage ensuite ».
Taourirt Moussa, le 15 octobre 2005.Le bureau exécutif
