C’est une opération qui débute normalement le 15 avril de chaque année selon le calendrier agricole ancestral, mais cette année le retard de 3 semaines s’explique par un récent décalage des saisons observé depuis 2004, soit depuis le retour du cycle humide. Un cycle qui s’étale pour rappel sur 36 ans de décalage qui explique les perturbations atmosphériques durant le mois d’avril survenues avec la même densité que celles de l’hiver. Un climat qui a retardé le démarrage de la campagne de la tonte d’ovins (brebis et moutons) cela pour plusieurs raisons, la première étant le risque des coups de froid (grippe et bronchite) auquel on expose une bête qu’on débarrasse de sa toison alors que les températures sont encore sensiblement basses, ensuite ce sont les enclos et bergeries qui ne sont pas complètement secs à cause toujours des températures basses. Le cheptel se salirait aussitôt à cause du fumier humide qui est comme une matière adhésive et colle aux bêtes. Ainsi il a fallu aux éleveurs attendre que les espaces où sont parqués les animaux soient complètement asséchés avec l’arrivée des chaleurs qui n’ont commencé à se manifester que durant la première semaine du mois de mai. La tonte des moutons est l’une des plus pénibles opérations de l’élevage ovin, sachant que durant cette période la plupart des femelles sont pleines, ce qui rend la tâche plus difficile car dans ces conditions la bête ne doit pas être entravée et allongée par terre. Les risques d’avortement sont très élevés et ensuite elle étouffe rapidement et peut mourir facilement. Elle doit être tondue debout et surtout avec beaucoup de prudence ce qui n’est pas une tâche facile d’autant plus que les tondeuses électriques dont l’utilisation s’est généralisée dans les pays développés en Europe et l’Amérique notamment ne sont toujours pas disponibles en Algérie et que l’on continue à utiliser de gros ciseaux qu’il faut manipuler avec beaucoup de précautions au risque d’éventrer le bête.
Un éleveur expérimenté peut tondre un maximum de 4 brebis par jour, ce qui explique l’effervescence qui s’est emparée d’eux en menant cette opération avec fébrilité notamment par les propriétaires de troupeaux importants. D’autant plus que ces derniers sont talonnés par la campagne de fenaison qui démarre dans moins de 10jours. Cette période entre mai et juillet est la plus chargée pour les éleveurs avec de nombreuses tache qui arrivent à la fois, entre autre le grand nettoyage des enclos qu’il faut débarrasser du fumier accumulé durant tout l’hiver, la tonte des moutons et la fenaison pour certains. Vient ensuite la campagne des moissons, des opérations qui ne peuvent souffrir d’aucun retard au risque d’en perdre la récolte tel que le foin ou les céréales. Pour les brebis qui ne sont pas en gestation, une fois débarrassées de leurs toisons, elles dégagent une odeur qui attire les males pour l’accouplement dont la mise à bas intervient vers le mois de septembre (la portée est de 5mois) dénommée localement «amenzou» soit après la fin des grandes chaleurs.
Notons enfin qu’en absence d’ateliers de transformation de laine dans la région, les éleveurs ne tirent pas de grands profits des toisons, surtout que la transformation de la laine de façon traditionnelle qui se fait à la main et destinée au tapissage de tapis traditionnels et burnous, est en net recul sinon en voie de disparition. Rares sont les femmes qui maîtrisent encore cette technique ancestrale de la transformation de la laine manuellement qui passe par plusieurs opérations avant d’être prête à l’utilisation, et il est dommage que personne n’envisage d’investir dans ce créneau de la laine, malgré l’abondance de la matière première.
Jusqu’aux matelassiers de jadis qui utilisaient la laine. Ils ont disparu depuis plus de 20ans. Voila un créneau ou filière qui doit intéresser le ministère de la formation professionnelle, qui a introduit dans son programme d’apprentissage la tapisserie traditionnelle.
Plusieurs centres de la daïra de M’Chedallah et Bechloul sont équipés de la gamme complète des «métiers à tisser», composés de plusieurs éléments.
Il suffirait d’accompagner cette filière (tissage) par la dotation d’ateliers de transformation de laine pour éliminer d’abord la contrainte de la matière première, ensuite cela se révélera un moyen de soutien direct pour la relance de l’élevage ovin, qui reste l’un des plus importants créneaux de l’agriculture au niveau de la wilaya de Bouira.
Oulaid Soualah