Tentative de l’administrateur de Michelet

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Par Abdennour Abdesselam:

Après la défaite du soulèvement engagé par Chikh Aheddadd en 1871, l’autorité administrative française s’est étendue sur le vaste territoire de Kabylie. Dans chaque centre administratif était installé un administrateur. Ils avaient comme mission de contrôler la société et d’empêcher tout nouveau soulèvement. L’œuvre coloniale s’accomplissait sans trop de difficultés dans le reste du pays. L’administrateur de Michelet savait que Chikh Mohand officiait et jouait un rôle important et prépondérant dans la société. Le Chikh paraissait intrigant pour la nouvelle administration. Aussi, était-il surveillé de près. Sans doute pour mieux contrôler son œuvre, Dda Moqrane Agawa rencontré en son village d’Aït Atelli, tient de son père, alors disciple du maître, que l’administrateur avait tenté de soudoyer le Chikh en lui proposant une aide financière de même qu’une médaille pour services rendus à la société. Le Chikh les refusa d’un bloc. Le dit ci-dessous confirme l’information. Chikh Mohand voyait à travers cette offrande une tactique et un moyen pour le compromettre, le corrompre et réduire enfin son influence dans la société. Mais c’était compter sans la vigilance du Chikh et son souci d’homme libre et indépendant dans sa pensée et ses actes. Il dira : «Auhdegh Rebbi ur qqinegh lherz, ur âmidegh i ulexxez, cciâ urumi d asderbez, yis ad yekrez, ar zdat a k-yarez. » (je jure par Dieu de ne point accepter de médaille, je ne me laisserai pas traîner à terre car la médaille coloniale est compromission faite pour me domestiquer et devenir leur serviteur.) On notera que dans cette réalisation, le Chikh donne et attribue le même sens à la fois à «lherz» (talisman ou amulette) et à «cciâa» (médaille). Ce rapprochement en sens tient de ce que le Chikh réfute l’un et l’autre des subterfuges. Il n’était donc que toléré par la nouvelle administration. Sans doute que sous l’angle de cette tolérance, l’administrateur ne désirait pas s’encombrer des affaires qu’il considérait alors relevant de l’indigénat, avec tout ce que cela suggérait comme sens péjoratif et vision réductrice. Il laissa donc ce qu’il considérait être de “basses besognes” au Chikh. Mais vite, il se rendra compte que l’autorité du Chikh débordait sur ses propres missions et prérogatives. La société lui échappait sur bien des aspects pour lesquels il avait était installé à Michelet. Il apprend par exemple que Chikh Mohand Oulhoucine s’opposait à l’ordre de mobilisation pour l’enrôlement des jeunes kabyles dans l’armée coloniale s’en allant conquérir des territoires en Afrique et en outre-mer. L’impuissance à domestiquer un homme d’une telle envergure est assez significative de la détermination du personnage qu’était Chikh Mohand Oulhoucine à aller dans le sens de ses convictions inébranlables.

A. A. (kocilnour@yahoo.fr)

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