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Autour de la représentativité dans la région des Igawawen (2)

Par Abdennour Abdesselam :

Chih Mohand s’est donc de fait installé a Igawawen à At Hmed dans le Arch d’At Yahya. Le plébiscite populaire dont jouissait Chikh Mohand Oulhoucine dévoile un aveu d’impuissance d’un ordre confrérique, à supplanter la pensée kabyle. Chikh Mohand, écrira Boualem B dans « La Dépêche de Kabylie »: «Bravant les interdits imposés par la Rahmania, s’opposant aux méthodes ésotériques, va instituer une nouvelle méthode d’appréhender l’homme, de le conseiller, de l’orienter… Mohand Oulhoucine va innover dans un siècle où l’innovation est considérée comme une bidâa). Chikh Aheddad est surpris par la réponse hautement significative du Chikh Mohand en lui disant qu’il avait été choisi par Dieu. Mhend Waâba, son accompagnateur, tente d’apaiser la ferveur du Chikh. C’est alors qu’il lui dira : « Dgha ahheq amkan-a ; ard tchcegh ayen ur yi-nahw’ara; d ar d-inigh ayen i yi-hwan. » (Je jure par Dieu ; que je puisse être obligé de manger ce que je répugne ! Mais je dirai librement ce que me dictera ma conscience). Bien que Chikh Mohand affronte son chef, il demeure respectueux des lieux de la rahmania. Aussi jura-t-il par eux (ahheq amkan a). Il était attendu que face à cette «insubordination», Chikh Mohand allait être voué à la sanction dictée par le règlement de l’ordre et dont le prolongement serait populaire ce qui l’aurait poussé au ban du groupe social kabyle. Libéré du dogme Rahmanien, Chikh Mohand libérera du coup la pensée kabyle. Face à l’inattendue et inédite attitude de Chikh Mohand, Chikh Aheddad rentre dans une violente colère. Il lui dit : « Muh at Lhusin aziyar ; yettak lewrad ur itchawar; awal n ­Rebi ur t-yeqqar ; ula di lqed ur yennejbar.» Dés l’introduction et sur un ton autoritaire, on remarquera que Chikh Aheddad tente de réduire l’influence de Chikh Mohand. Il le désigne moins qu’un simple membre de l’ordre. Il le nomme comme simple visiteur : «aziyar». Il ne veut lui reconnaître aucun titre dans le cadre de la confrérie, ni même en dehors de celle-ci. Il faut dire que Chikh Mohand devait sans nul doute s’y attendre. Chikh Aheddad va plus loin. Il savait que Chilkh Mohand était illettré dans la langue coranique. Débordé de colère devant «l’insolente» réponse de son disciple, Chikh Aheddad chercha à complexer son hôte en le prenant par son illettrisme : «awal n ­Rebbi ur t-yeqqar». Il encra encore plus loin le complexe en se jouant de la petite taille de Chikh Mohand : «ula di lqedd ur yennejbar». (A suivre) .

A. A.

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