Mariage insensé

Partager

(3e partie et fin)

Dès que Silyouna montre son petit doigt à travers l’interstice du rocher, son frère, rapide comme l’éclair lui coupe deux phalanges, avec son cimeterre. Voyant son sang couler et son petit doigt coupé, elle s’écrie meurtrie.“- Ak’ifk rebbi a gmak AsseNaN d’i thg’chriRthe ak’inToOu-d ithèkes our ih’elou Ala s-iffasen b-outma-k’ ith djith djidh thesrou” (Que Dieu te donne une épine au genou, qui ne s’enlèvera ni ne guérira que par les mains de ta sœur que tu as estropiée et laissée pleurer !)Le frère de Silyouna n’ayant pas réussi à extirper sa sœur de l’anfractuosité retourne chez lui avec ses parents plein d’amertume et de dépit.Sur le chemin du retour, en faisant une halte, s’étant accroupi sur ses genoux pour soulager sa vessie, une épine se fiche dans son genou. Il pousse un cri.La malédiction que Silyouna a proféré s’est réalisée. Il essaye de l’enlever mais en vain, son genou commence à enfler. Dès qu’il arrive au palais, il ne peut plus bouger.Devenu impotant, il ne peut plus faire le moindre mouvement.La maladie étrange du jeune prince est bientôt connue. Les spéculations vont bon train à son sujet : colportée par la vox-populi, la nouvelle arrive aux oreilles de Silyouna, à l’endroit où elle s’est réfugiée.Malgré le mal qu’il lui a fait, prise de compassion elle veut le voir pour s’enquérir de sa santé.Afin de ne pas être reconnue elle se déguise en mendiante et se rend au palais. Les gardes lui refusent l’entrée. Ce n’est qu’après avoir parlementé et prétendu guérir le jeune prince de sa maladie qu’elle est enfin autorisée.Mise en présence du prince, Silyouna lui prend le genou endolori et enflé et devant les yeux ébahis de toute la famille, elle dit à haute voix : – “Ay azgen n-etdhad’chthe id iqimen sili-d assenan ih’çlen” (Petit doigt dont il ne reste que la moitié extirpe l’épine qui s’est fichée !)”Les présents assistent médusés à un étrange phénomène. Dès que Silyouna touche de son petit doigt dont il ne reste que la moitié, l’épine comme par enchantement est retirée.Aussitôt le jeune prince se sent soulagé, tout le monde est content du dénouement de l’heureux événement. Reprenant ses esprits, le jeune prince se rend compte que cette femme déguisée en mendiante n’est autre que sa sœur qu’il a voulu épouser et qu’il a estropiée. Avant qu’il ne lui dise quoi que ce soit Silouna est déjà dehors.Il la suit et lui dit :- “Silyouna semh’iyi khd’em gh’-ma ayen n diri” (Pardonne-moi Silyouna ma sœur bien-aimée pour tout le mal que je t’ai fait !)”Silyouna ne lui dit rien mais continue son chemin. Elle était incapable de rester dans cette famille, qui s’est liguée contre elle, et qui a approuvé un mariage insensé. Pour oublier le mal qui lui a été fait, elle quitte définitivement le pays.“Our kefount eth’houdjay i nou our kefoun ird’en tsemz’ine. As n-elâid’ anetch ak’soum ts h’em’zine ama ng’a thiouanz’iz’ine. » (Mes contes ne se terminent, comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’Aïd, nous mangerons de la viande avec des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).”

Benredjal Lounès

Partager