Il l’avait voulu de toutes ses tripes, c’était même devenu pour lui une obsession, il a dû ruminer sa souffrance pendant bien des années.
Enfin il a fini par l’avoir : un concert, chez lui à Tizi-Ouzou. Takfarinas a donc fini par chanter, à nouveau, à Tizi-Ouzou, 22 ans après. Il était déjà dit que ça allait être grandiose. Takfarinas en a fait un événement énorme. Tout simplement du jamais vu sous le ciel de la ville de Tizi-Ouzou. Plus de quinze mille personnes venues remplir le stade Oukil Ramdane rien que pour lui. L’assistance était de tous les âges et des deux sexes. Ce fut beau. Tak l’était encore plus, toujours sur son 31, il a régné durant la soirée seul en maître. A voir l’affluence record enregistrée, pour chercher l’équivalence, il faut plutôt chercher dans les annales des grandes confrontations de football. Et pas n’importe lesquelles SVP ! Devant une telle grandeur, les nouvelles têtes qui se la jouent artistes, devant une derbouka et une boite à rythme, ont de quoi penser à se mettre la tête entre les pieds. On le disait pourtant en perte de vitesse, mais à voir le spectacle qu’il a assuré le moins que l’on puisse dire c’est que ça roule bien pour lui… Il a fait du public ce qu’il voulait : le mettre debout, le faire danser, lui dicter une minute de silence au milieu du concert…
Et l’assistance restera acquise jusqu’à la fin, parce qu’elle a tout simplement aimé admiré apprécier. Ce n’était pas sorcier, mais ça se sentait que la foule avait surtout de la fierté pour lui. « La musique est un langage universel. Mais elle n’est pas aussi facile à faire. Elle s’adresse à la tête, au cœur, elle titille surtout les sentiments avant les hanches… » Ce n’est pas de la politique, mais juste des mots d’un cinquantenaire accompli qui a toujours la pêche et la franchise de dire son amour pour la musique, pour celle qui le fait toujours souffrir, comme du temps où il avait 20 ans, et pour son public… Fou-Fou par moment, extravagant par d’autres, ses fans ont fini par lui concéder tous les portraits qu’il enfile. Il a tout d’un grand. Les nombreux titres qu’il a passés en revue, avant-hier, au bonheur des présents, furent autant de thérapies pour tous. La « bête » s’est bien lâchée sur scène ! Ceux qui l’entouraient ont aussi bien apprécié. Tak, qui n’espérait pas autant, est reparti comblé. Il a réussi un rendez-vous qui lui fera certainement énormément de bien pour repartir du bon pied. Ses proches y voient même une renaissance de l’artiste. Magnifique ! Ne cessait-il de répéter, sur scène et même après.
S. Benedine