Le handicapé mental, un être à part entière

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Dans nos sociétés archaïques, les croyances culturelles perpétuent les idées reçues. Beaucoup de maladies souffrent d’une mauvaise représentation sociale et sont frappées de tabou. De ce fait, de nombreuses maladies échappent au circuit de la médecine conventionnelle moderne. Les affections mentales et autres maladies qui se caractérisent par une atteinte des capacités mentales sont, à ce titre entourées d’une part d’irrationnel, d’une crainte irraisonnée. Le handicapé mental est considéré comme un ensorcelé, un envoûté, un possédé. Selon les spécialistes dans ce domaine, qui sont formels, «le milieu familial et social joue un rôle primordial dans le milieu thérapeutique – Le handicapé mental est une personne qui, suite à une maladie congénitale ou acquise, à un traumatisme ou à un choc psychologique, perd ses capacités mentales. Ce déficit mental fait de lui un infirme incapable d’avoir une activité normale», nous expliquera un professeur en psychiatrie à l’Institut national de santé publique (INSP). Hélas, souvent la maladie s’installe progressivement et neuf fois sur dix, le milieu familial ne sollicite pas le médecin en raison des préjugés et des tabous. Tout est essayé, sauf l’avis du spécialiste médical. Ainsi, le psychiatre, le psychologue, perdent les quelques chances de pouvoir arrêter l’évolution de la maladie. Pourtant, dans notre pays, un vaste travail de promotion de la santé mentale a été mis en œuvre par un dispositif comprenant la réorganisation des soins, la révision de la législation sur la santé mentale, la réhabilitation des malades mentaux, ainsi que la communication sociale. Actuellement, la psychiatrie moderne n’est plus celle des asiles ou des hospices-prisons où on enfermait les malades comme des parias. Les affections mentales sont bien déterminées et codifiées selon une classification internationale. Leur traitement et leur prise en charge sont également bien codifiés et font appel à des méthodes modernes, conformément aux troubles concomitants entre la santé mentale et psychique engagés depuis 2001 par l’OMS.On est loin de l’électrochoc des années 1970, tout est fait pour que le malade récupère et reprenne sa place parmi la société. Parmi certaines maladies congénitales comme la trisomie 21 (mongolisme) ou l’hyperthyroïdie, l’atteinte mentale, c’est-à-dire le retard mental parfois sévère est le symptôme central, comme nous l’explique le professeur Ahmed A., exerçant à l’hôpital psychiatrique Franz-Fanon de Blida, avant de poursuivre «En raison de ce retard de l’âge mental sur l’âge physique de quelques années, le milieu scolaire,le milieu familial, voire toute la société condamnent l’enfant à un isolement total, le privant ainsi d’une éducation normale». De nombreuses personnes handicapées mentales congénitales ou acquises, mises dans un milieu spécialisé (centre de rééducation, ateliers protégés d’ergothérapie, etc), retrouvent peu des capacités quasi normales à leur propre rythme et sont capables d’une activité productive normale. Le malade ou le handicapé mental est toute personne qui a perdu momentanément ses aptitudes au travail. La raison d’être d’une société digne de ce nom ne devrait-elle pas être de favoriser sa réinsertion sociale et professionnelle par tous les moyens ? C’est à toutes ces questions que le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, M. Redjimi, lors d’un débat à l’INSP, le mois d’octobre de l’année écoulée, a largement mis en exergue le rapport étroit existant entre la santé mentale la santé physique et le bien-être, tout en soutenant les actions entamées par son département visant la sensibilisation du grand public et les professionnels sur la notion de la concomitance des deux catégories d’intervention. Il n’a pas omis également de mettre l’accent sur les contraintes et les insuffisances qui règnent dans son secteur. Son intervention était aussi une opportunité pour réfléchir sur la politique de la santé mentale en matière d’approvisionnement en médicaments, de développement des ressources humaines et de soutenir la recherche dans ce domaine. A ce propos, le ministre a assuré en outre que dans les perspectives de son programme de l’année en cours, il prévoit l’amélioration des conditions de vie dans les milieux hospitaliers, la révision de la nomenclature des médicaments destinés à cette catégorie, la mise en place d’un programme national de prévention du suicide, des formations complémentaires et continues de toutes les compétences en place dans le dispositif de soins de santé mentale ainsi que l’amélioration de l’intégration de la santé mental dans les soins de santé généraux pour prévenir et traiter efficacement ces maladies. Nul n’est à l’abri d’un coup du mauvais sort et le mode de vie moderne et urbain actuel n’a pas seulement des avantages (accidents, stress, violence, etc…).En attendant, quelques associations des parents de malades, le plus souvent dans l’anonymat le plus total et avec des moyens très limités, sacrifient de leur temps et de leurs ressources propres et militent pour faire admettre le statut «d’être à part entière», aux personnes handicapées mentales.

Saïd Seddik Khodja

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