Par Abdennour Abdesselam
A la conquête française et dans ces premières années d’occupation à partir de 1857, les grandes voix des Mohand Oumoussa Awaguennoun, Smail Azikiou, Sidi Qala, Yemma Khlidja Tamcheddalt, Ssi Mouhand Oumhend, Lbachir Amellah… etc, prennent le relai face au nouvel occupant. Smail Azikiou, dira Mammeri dans « poèmes kabyles anciens », « compose, autour de 1880, ses poèmes sur la révolte de 1871 ». Il ajoute que : « c’est une multitude de neuvains anonymes qui déploreront l’expédition de Madagascar (1896) à laquelle beaucoup de Kabyles ont participé contrains par la force de l’occupant colonialiste ». Le chant « moderne », soutenu par la mélodie, est apparu à partir des années 1920, après la création de la première organisation syndicale des algériens émigrés en France, en majorité kabyles. Cette organisation du nom de Congrès des Ouvriers Nord Africains, le CONA, a été dirigée par Amar Imache. Depuis, la conscientisation nationale sera soutenue par le chant révolutionnaire. On citera le jeune nationaliste Ali Laïmeche, mort prématurément à l’âge de 24 ans, qui avait composé nombre de chants révolutionnaires. Il faut également signaler ceux de ses camarades de combats, tels que Idir Ait Amrane, Mohand Saïd Aïch, entre autres. On citera deux chants très populaires : « Nekwni s warrac n Lezayer » et « Kker a mmis umazigh ». Le chant « Min djibalina » est une traduction du chant patriotique «Yeffegh-ed ssouth deg’durar », chanté déjà par les scouts de Kabylie en 1945. C’est le maquisard Ssi Moh Nnachid qui l’a déclaré à l’occasion d’une célébration du 1er novembre. Durant la guerre d’indépendance, le chant révolutionnaire kabyle n’a pas perdu sa voix. Les auteurs qui activaient au sein de la troupe du FLN sont connus, à l’image de Farid Ali qui offrira le célèbre hymne à la liberté « yemma aâzizen our ttsru ». Les plus exposés étaient surtout les chanteurs qui passaient sur les ondes de la chaine kabyle et qui ont réussi des tournures poétiques exceptionnelles. Il est notoire que les guerres ont toujours inspiré les poètes et les chanteurs. Girodeau disait, à juste titre, que « dés que la guerre est déclarée, impossible de tenir les poètes ; la rime, c’est encore le meilleur tambour». Il est très difficile d’écouter ces chansons sans les repérer ou ne pas les comprendre. Se sont les chansons de Slimane Azem avec « Ffegh ay ajradh tamurt-iw » (l’invasion des criquets allusion faite au colonialisme) – « ideher-ed waggur » (apparition de l’emblème national), Taleb Rabeh avec « a tacekkirt n lghaba » (allusion faite à la terre des ancêtres) ou encore l’hommage rendu à un des héros de la guerre de libération, le colonel Amirouche, chanté et glorifié par Allaoua Zerrouki. À côté de ce genre de chansons, se faisait également le genre lié directement au phénomène de l’émigration, abondamment chanté…. A suivre.