Par Abdennour Abdesselam
A partir de 1973, plusieurs nouveaux jeunes chanteurs apparaîtront. En leur qualité d’universitaires, ils furent d’un grand apport. En effet, ils élargiront l’entrebâillement de l’ouverture à travers une touche scientifique qui consiste d’une part à réhabiliter le catalogue du terroir traditionnel en le modernisant et en faisant une rampe de lancement vers l’avenir et un nouveau discours plutôt élitiste mais nécessaire. La chanson de Idir « Baba inu ba », interprétée sur un fond de texte ancien et aménagé par le poète Ben Mohamed est devenu un centre d’intérêt autour duquel l’attention du public est mobilisée, la communication se fait et le sujet est commenté. Cette chanson mythique fera le tour du monde et sera adaptée dans plusieurs langues. L’écho produit engagera un incontestable effet d’entraînement avec une pléiade de nouveaux chanteurs avec des styles plus ou moins nuancés mais poursuivant le même but : la revendication Amazighe. On citera Ferhat Imazighen Imoula, les Abranis, Djamal Allam, Noureddine Chennoud, Amar Sersour, Isoulas, Inesliyen, Agraw etc. C’est dire combien la chanson amazighe de Kabylie a rempli des fonctions sociales diverses à travers sa textuelle. Ideflawen, le groupe Tagrawla et bien d’autres encore. L’embellie de la langue à travers la chanson à texte s’impose d’elle-même. Un autre nouveau type de textes s’orientera sur la chanson dite chanson didactique à but lexicale et de forme parascolaire. Elle a permis une large diffusion des nouveaux termes néologiques de la langue, scientifiquement élaborés par le professeur Mouloud Mammeri. C’est ainsi que les nouveaux mots comme tilelli, amazigh, tagrawla, agdud, aselway, aneghlaf, izerfan, aselmed, adlis, tanemmirt, amentag, azarug, ont pris corps dans le langage courant. Cette nouveauté a installé les prémices d’éléments linguistiques, allant dans le sens du renforcement de l’unification de la langue Amazighe sur l’espace Nord-africain. Aujourd’hui l’ensemble des médias, télévisuel, radiophonique et de presse, ont adopté ces termes unificateurs sachant déjà que la structure de la langue est la même pour toutes les variantes amazighes. Même le choix des noms des artistes ne fut pas fortuit. Ils sont tous porteurs d’évocations historiques reléguées par le pouvoir dans les oubliettes, Imazighen Imoula, Abranis, Gouloussa, Takfarinas, Dihiya, Yugerten, Koceila etc. Le texte de la chanson Kabylie a également traité de la condition de la femme réduite à être mineure à vie, de l’école qui a tourné le dos à la science, des droits de l’homme et de la liberté d’expression. Depuis les deux dernières décades, et après un timide début de la réparation des injustices faites à la berbérité la chanson kabylie renoue avec le texte à forte teneur littéraire. Zedek Mouloud est le parfait exemple de cette nouvelle page évolutive de la textuelle de la chanson kabyle. La nouvelle chanson d’amour s’est désenclavée des anciens tabous, pour occuper un large espace, particulièrement chez les jeunes, avec les Heddad Fateh, Allaoua, Alilou, Taous, Sihem Stiti, Jedjiga, Belaid Branis, Guerbas et bien d’autres encore qui ne cessent de bercer les coeurs.
A. A